Mat 367, Méthodes numériquesBernard.Parisse@ujf-grenoble.fr2016 |
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exécuter toutes les commandes interactives en cliquant sur le bouton
Exécuter (attention cela peut prendre un certain temps!),
le champ suivant est la console de l’interpréteur du
logiciel de calcul formel.
Les commandes sont exécutées par la version javascript de
Giac/Xcas. Bien que le thème de ce cours soit numérique, on verra
sur de nombreuses commandes qu’il est fort utile de disposer
d’un logiciel capable de faire du calcul formel!
Table des matières
- 1 Présentation du module
- 2 Représentation des nombres et autres données, calcul exact/approché
- 3 Algèbre linéaire
- 4 Approximation polynomiale
- 5 Intégration numérique
- 5.1 Les rectangles et les trapèzes
- 5.2 Ordre d’une méthode
- 5.3 Simpson
- 5.4 Newton-Cotes
- 5.5 Calcul des poids
- 5.6 En résumé
- 5.7 Accélération de Richardson-Romberg
- 5.8 Cas des fonctions périodiques.
- 5.9 Quadratures gaussiennes.
- 5.10 Méthode adaptative.
- 5.11 Accélération de Richardson-Romberg
- 5.12 Méthodes probabilistes.
- 6 Suites itératives et applications
- 7 Réduction approchée des endomorphismes
- 8 Equations différentielles (résolution numérique)
- 9 Quelques références
- A Développement de Taylor, séries entières, fonctions usuelles
- B La moyenne arithmético-géométrique.
Index
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1 Présentation du module
Les thèmes abordés seront :
- calcul approché, représentation des données (flottants, vecteurs, matrices), erreurs (normes, de calcul, d’arrondi...).
- Pivot de Gauss, factorisation LU, conditionnement, Cholesky, factorisation QR.
- Interpolation polynômiale (évaluation, interpolation de Lagrange, Hermite, Bézier)
- Intégration numérique
- Méthode du point fixe, de Newton, méthodes itératives en algèbre linéaire
- Méthode de la puissance, valeurs propres et vecteurs propres.
- Résolution d’équations différentielles.
L’évaluation se fait sur :
- 1/2 : un DS à mi-semestre et certains compte-rendus de TP (à rédiger seul ou en binome),
- 1/2 : l’examen final
Les calculatrices et les netbooks de taille d’écran plus petits que 13 pouces sont autorisées au DS et à l’examen final (prêt possible de netbooks pour le semestre).
2 Représentation des nombres et autres données, calcul exact/approché
Mot-clefs:
Types de base : entier machine, entier long, flottant machine et
multiprécision (Base 2, base 10).
Erreur relative, erreur absolue, erreur d’arrondi, +/-, */%
Algorithme de Horner.
Types composés : complexes, polynomes (représentation dense/creuse),
symboles, listes (vecteurs, matrices), expressions, fonctions.
Les principaux ensembles de nombres en mathématiques sont les entiers
positifs et relatifs , les rationnels , les réels
et les complexes . Sur ordinateur, on peut représenter ces
nombres de manière exacte dans certains cas, approchée dans d’autres.
2.1 Représentation des entiers
Preuve : On prend pour le plus grand entier tel que .
Exemple :
La division euclidienne permet d’écrire un nombre entier, en utilisant
une base et des caractères pour représenter les entiers
entre 0 et . Nous écrivons les nombres entiers en base
avec comme caractères les chiffres de 0 à 9.
Les ordinateurs utilisent des circuits binaires pour stocker
les informations, il est donc naturel d’y travailler en base 2
en utilisant comme caractères 0 et 1 ou en base 16 en utilisant
comme caractères les chiffres de 0 à 9 et les lettres de A à F.
En général, pour trouver l’écriture d’un nombre en base (par
exemple ),
on effectue des divisions euclidienne successives par du nombre puis
de ses quotients successifs jusqu’à ce que le quotient soit 0 et on
accolle les restes obtenus (premier reste à droite, dernier
reste à gauche).
Inversement, pour retrouver un entier à partir
de son écriture , on traduit les divisions euclidiennes
successives en
Par exemple, vingt-cinq s’écrit en base 16 0x19
car 25 divisé
par 16 donne quotient 1, reste 9
En base 2, on trouverait 0b11001
car .
On peut effectuer les opérations arithmétiques de base
(+,-,*, division) directement en base 2 (ou 16). Par exemple
la table de l’addition est 0+0=0, 0+1=1+0=1 et 1+1=0 je retiens 1,
donc :
01001111 + 01101011 ---------- 10111010
Exercice : comment passe-t-on simplement de la représentation d’un nombre en base 2 à un nombre en base 16 et réciproquement ?
Les microprocesseurs peuvent effectuer directement les opérations arithmétiques de base sur les entiers “machine” (déclinés en plusieurs variantes selon la taille et la possibilité d’avoir un signe). Noter que la division de deux entiers et n’a pas la même signification que la division de deux réels, comme elle ne tomberait pas forcément juste, on calcule le quotient et le reste de la division euclidienne.
Ces entiers machines permettent de représenter de manière exacte des petits entiers relatifs par exemple un entier machine signé sur 4 octets est compris entre .
Ces entiers machines permettent de faire très rapidement du calcul exact sur les entiers, mais à condition qu’il n’y ait pas de dépassement de capacité, par exemple pour des entiers 32 bits, renverra 0. Ils sont utilisables avec tous les langages de programmation traditionnels.
Les logiciels de calcul formel et certains logiciels de programmation permettent de travailler avec des entiers de taille beaucoup plus grande, ainsi qu’avec des rationnels, permettant de faire du calcul exact, mais on paie cette exactitude par un temps de calcul plus long, de plus pas mal de méthodes numériques ne gagnent rien à faire des calculs intermédiaires exacts. Néanmoins, l’utilisation d’un logiciel de calcul formel permettra dans certains cas d’illustrer certains phénomènes dus au calcul approché.
2.2 Les réels
On se ramène d’abord au cas des réels positifs, en machine on garde traditionnellement un bit pour stocker le signe du réel à représenter.
2.2.1 Virgule fixe et flottante.
La première idée qui vient naturellement serait d’utiliser
un entier et de déplacer la virgule
d’un nombre fixe de position, ce qui revient à mulitplier
par une puissance (négative) de la base. Par exemple en base 10 avec un
décalage de 4, 1234.5678
serait représenté par 12345678
et 1.2345678
par
12345
(on passe de l’entier au réel par multiplication
par . L’inconvénient d’une telle représentation est
qu’on ne peut pas représenter des réels grands ou petits,
comme par exemple le nombre d’Avogadro, la constante de Planck, etc.
D’où l’idée de ne pas fixer la position de la virgule, on parle
alors de représentation à virgule flottante ou de nombre flottant : on
représente un nombre par deux entier, l’un appelé mantisse
reprend les chiffres significatifs du réel sans virgule, l’autre
l’exposant, donne la position de la virgule. Attention, le séparateur
est un point et non une virgule dans la grande
majorité des logiciels scientifiques.
On sépare
traditionnellement la mantisse de l’exposant par la lettre e
.
Par exemple 1234.5678
peut être représenté
par 12345678e-8
(mantisse 12345678
, exposant -8)
mais aussi par 1234567800e-10
.
Naturellement, sur un ordinateur, il y a des limites pour les entiers représentant la mantisse et l’exposant . Si on écrit les nombres en base , la mantisse s’écrira avec un nombre fixé de chiffres (ou de bits en base 2), donc . Soit un réel représenté par Si , alors on peut aussi écrire avec , quelle écriture faut-il choisir? Intuitivement, on sent qu’il vaut mieux prendre le plus grand possible, car cela augmente le nombre de chiffres significatifs (alors que des 0 au début de ne sont pas significatifs). Ceci est confirmé par le calcul de l’erreur d’arrondi pour représenter un réel. En effet, si est un réel non nul, il ne s’écrit pas forcément sous la forme , on doit l’arrondir, par exemple au plus proche réel de la forme . La distance de à ce réel est inférieure ou égale à la moitié de la distance entre deux flottants consécutifs, et , donc l’erreur d’arrondi est inférieure ou égale à . Si on divise par , on obtient une erreur relative d’arrondi majorée par . On a donc intérêt à prendre le plus grand possible pour minimiser cette erreur. Quitte à mulitplier par , on peut toujours se ramener (sauf exceptions, cf. ci-dessous), à , on a alors une erreur d’arrondi relative majorée par
On appelle flottant normalisé un flottant tel que . Pour écrire un réel sous forme de flottant normalisé, on écrit le réel en base , et on déplace la virgule pour avoir exactement chiffres non nuls avant la virgule et on arrondit (par exemple au plus proche). L’exposant est égal au décalage effectué. Notez qu’en base 2, un flottant normalisé commence forcément par 1, ce qui permet d’économiser un bit dans le stockage.
Ainsi, l’erreur d’arrondi commise lorsqu’on représente un réel (connu exactement) par un double normalisé est une erreur relative inférieure à de ( et pour les doubles).
Exemples :
-
en base 10 avec , pour représenter
, on doit décaler la virgule de 5 positions,
on obtient
314159.265...
on arrondit à donc on obtient314159e-5
. - en base 2 avec , pour représenter trois cinquièmes (
en base 10, noté en base 2),
on pose la division en base 2 de
11
par101
, ce qui donne11 | 101 110 --------- -101 | 0.1001 ---- | 010 | 100 | 1000 | - 101 | ----- | 011 |
on retrouve le nombre de départ donc le développement est périodique et vaut0.1001 1001 1001 ...
. On décale le point de 10 positions, on arrondit, donc trois cinquièmes est représenté par la mantisse1001100110
et l’exposant-10
. On observe aussi sur cet exemple que dont l’écriture en base 100.6
est exacte, n’a pas d’écriture exacte en base 2 (de même que 1/3 n’a pas d’écriture exacte en base 10).
Il existe une exception à la possibilité de normaliser les flottants, lorsqu’on atteint la limite inférieure de l’exposant . Soit en effet le plus petit exposant des flottants normalisés et considérons les flottants et . Ces flottants sont distincts, mais leur différence n’est plus représentable par un flottant normalisé. Comme on ne souhaite pas représenter par 0, (puisque le test renvoie faux), on introduit les flottants dénormalisés , il s’agit de flottants dont l’exposant est l’exposant minimal représentable sur machine et dont la mantisse appartient à . Par exemple 0 est représenté par un flottant dénormalisé de mantisse 0 (en fait 0 a deux reprśentation, une de signe positif et une de signe négatif).
Enfin, on utilise traditionnellement une valeur de l’exposant pour représenter les nombres plus grands que le plus grand réel reprśentable sur machine (traditionnellement appelé plus ou moins infini) et les erreurs (par exemple 0./0. ou racine carrée d’un nombre réel négatif, traditionnellement appelé NaN, Not a Number).
Exercice : quels sont les nombres réels représentables exactement en base 10 mais pas en base 2 ? Si on écrit en base 2 avec 53 bits de précision, puis que l’on arrondit avec 64 bits de précision, ou si on écrit en base 2 avec 64 bits de précision, obtient-on la même chose ?
Les ordinateurs reprśentent généralement les flottants en base 2
(cf. la section suivante pour
plus de précisions), mais cette représentation n’est pas utilisée
habituellement par les humains, qui préfèrent compter
en base 10. Les ordinateurs effectuent donc la conversion dans
les routines d’entrée-sortie. Le format standard utilisé
pour saisir ou afficher un nombre flottant dans un logiciel
scientifique est composé d’un nombre à virgule
flottante utilisant le point comme séparateur décimal (et
non la virgule) suivi si nécessaire de la lettre e
puis de l’exposant,
par exemple 1.23e-5
ou 0.0000123
. Dans les
logiciels de calcul formel, pour distinguer un entiers
représentés par un entier
d’un entier représenté par un flottant on écrit
l’entier suivi de .0
par exemple 23.0
.
Remarque :
Les microprocesseurs ayant un mode BCD peuvent avoir un format
de représentation des flottants en base 10, les nombres décimaux
comme par exemple 0.3 peuvent être représentés exactement.
Certains logiciels, notamment maple, utilisent par défaut des
flottants logiciels en base 10 sur des microprocesseurs sans mode BCD,
ce qui entraine une baisse de
rapidité importante pour les calculs numériques (on peut
partiellement améliorer les performances en utilisant evalhf
en maple).
2.2.2 Les flottants au format double
Cette section développe les notions de la section précédente pour les flottants machine selon la norme IEEE-754, utilisables dans les langage de programmation usuels, elle peut être omise en première lecture. La représentation d’un double en mémoire se compose de 3 parties : le bit de signe sur 1 bit, la mantisse sur 52 bits, et l’exposant sur 11 bits. Pour les nombres “normaux”, l’exposant est en fait compris entre 1 et , le nombre représenté est le rationnel Pour écrire un nombre sous cette forme, il faut d’abord chercher par quel multiple de 2 il faut le diviser pour obtenir un réel dans , ce qui permet de déterminer l’exposant . Ensuite on écrit la représentation en base 2 de . Exemples :
-
-2
Signe négatif. Il faut diviser sa valeur absolue 2 par pour être entre 1 et 2 dont , l’exposant est . On a alors , . Représentation
1 10000000000 00000000...0000
- 1.5=3/2
Signe positif, compris entre 1 et 2 dont l’exposant vérifie soit . On a . D’où la représentation
0 01111111111 10000000...0000
- 6.4=32/5
Positif. Il faut le diviser par pour avoir donc soit . Ensuite qu’il faut écrire en base 2 (cf. section précédente), on écrit donc les 52 premiers éléments du développement avec une règle d’arrondi du dernier bit au nombre le plus proche. Ici le bit suivant le dernier1001
est un1
, on arrondit donc à1010
. D’où la représentation
0 1000000001 100110011001...10011010
On observe que la représentation en base 2 de 6.4 a du être
arrondie (car elle est infinie en base 2) bien qu’elle soit exacte
(finie) en base 10.
Seuls les entiers et les rationnels dont le dénominateur est une puissance
de 2 peuvent être représentés exactement.
Ceci entraine des résultats qui peuvent surprendre
comme par exemple le fait que
0.5 - 5*0.1
n’est pas nul.
Des représentations spéciales (avec ou ) ont été introduites pour représenter (pour les flottants plus grands en valeur absolue que le plus grand flottant représentable), et pour représenter les nombres non nuls plus petits que le plus petit flottant représentable de la manière exposée ci-dessus (on parle de flottants dénormalisés), ainsi que le nombre NaN (Not a Number) lorsqu’une opération a un résultat indéfini (par exemple 0/0).
Remarque : Sur les processeurs compatibles avec les i386,
le coprocesseur arithmétique i387 gère en interne des flottants
avec 80 bits dont 64 bits de mantisse. Sur les architectures 64 bits
(x86 ou AMD), le jeu d’instruction SSE permet de travailler avec
des flottants de 128 bits. Le compilateur gcc permet d’utiliser
ces flottants longs avec le type long double
ou
les types __float80
et __float128
en utilisant
un drapeau de compilation du type -msse
2.2.3 Opérations sur les flottants
Les opérations arithmétiques de base sur les flottants se font de la manière suivante :
- addition et soustraction : on détecte s’il faut additionner ou soustraire en valeur absolue en analysant les signes, on détermine l’exposant le plus grand et on décale la partie mantisse du flottant dont l’exposant est le plus petit pour se ramener à additionner deux entiers (partie mantisses correspondant au même exposant), on décale à nouveau la partie mantisse en modifiant l’exposant après l’opération pour normaliser le flottant
- multiplication : on additionne les exposants et on multiplie les parties mantisses (vus comme des entiers), on arrondit et on ajuste l’exposant si nécessaire
- division : on soustrait les exposants et on divise les parties mantisses (division “à virgule”), on tronque et on ajuste l’exposant si nécessaire
2.2.4 Erreurs
La représentation des nombres réels par des doubles présente
des avantages, les opérations arithmétiques
sont faites au plus vite par le microprocesseur.
Les coprocesseurs arithmétiques (intégrés sur les microprocesseurs
de PC) proposent même
le calcul des fonctions usuelles (trigonométriques, racine carrée, log et exp)
sur le type double et utilisent des formats de représentation interne
ayant plus de 64 bits pour les doubles, ce qui permet de limiter
les erreurs d’arrondi.
Par contre, des erreurs vont être introduites,
on parle de calcul approché par opposition au calcul exact sur les
rationnels. En effet, la représentation doit d’abord arrondir
tout réel qui n’est pas un rationnel dont le dénominateur
est une puissance de 2. Ensuite chaque opération va entrainer
une propagation de ces erreurs et va y ajouter une erreur d’arrondi
sur le résultat.
Enfin, l’utilisation du type double peut provoquer un dépassement
de capacité (par exemple 100!*100!
).
Pour diminuer ces erreurs et les risques de dépassement de capacité, il existe des types flottants multiple précision, qui permettent de travailler avec un nombre fixé à l’avance de décimales et une plage d’exposants plus grande. Les calculs sont plus longs mais les erreurs plus faibles. Attention, il s’agit toujours de calcul approché! De plus, pour des quantités dont la valeur est déterminée de manière expérimentale, la source principale de propagation d’erreurs est la précision des quantités initiales, il ne sert souvent à rien d’utiliser des types flottants multiprécision car les erreurs dus à la représentation (double) sont négligeables devant les erreurs de mesure. Dans ce cas, il est pertinent lorsqu’on évalue avec mal connu de calculer aussi , en effet : l’erreur relative sur est donc au premier ordre multipliée par Par exemple, l’erreur relative sur est au premier ordre l’erreur relative sur multipliée par .
2.2.5 Erreur absolue, relative, arrondi propagation des erreurs.
On a vu précédemment que pour représenter un réel, on devait l’arrondir, ce qui introduit une erreur même si le réel est connu exactement (par exemple 1/10). Voyons comment se propagent les erreurs dans les opérations arithmétiques de base : on distingue l’addition, la multiplication et l’inversion. La soustraction se ramène à l’addition car le calcul de l’opposé n’introduit aucune erreur nouvelle. Pour l’addition, si et si alors par l’inégalité triangulaire (), on a : on dit que les erreurs absolues s’additionnent.
Mais comme il faut représenter en machine, on doit ajouter une erreur d’arrondi, qui est proportionnelle à la valeur absolue de d’où la notion d’erreur relative :
Remarquons au passage que les erreurs de mesure expérimentales sont pratiquement toujours des erreurs relatives.
Donc lorsqu’on effectue une addition (ou une soustraction) de deux réels sur machine, on doit additionner les deux erreurs absolues sur les opérandes et ajouter une erreur d’arrondi (relative de , à titre d’exercice, on pourra vérifier que cette erreur d’arrondi est majorée par l’erreur absolue de la somme dès l’instant où et ont eux-même une erreur d’arrondi).
Lorsqu’on effectue une multiplication de deux nombres dont les représentants sont non nuls, on a l’erreur relative est donc la somme des erreurs relatives et du produit des erreurs relatives (on peut souvent négliger le produit devant la somme). Il faut aussi y ajouter une erreur relative d’arrondi de sur .
On observe que la multiplication est une opération posant moins de problèmes que l’addition, car on manipule toujours des erreurs relatives, par exemple si l’erreur relative sur deux doubles et non nuls est de , alors l’erreur relative sur sera de Lorsque l’erreur relative sur les données est grande devant , l’erreur relative d’arrondi final est négligeable, on peut alors dire que les erreurs relatives s’additionnent pour un produit (c’est aussi vrai pour un quotient: exercice!). Par contre, si on additionne deux nombres dont le représentant de la somme est proche de 0, la somme des erreurs absolues peut devenir non négligeable par rapport à la somme des représentants, entrainant une erreur relative très grande. Par exemple si est représenté par avec une erreur d’arrondi de et par avec la même erreur d’arrondi, l’addition de et renvoie avec une erreur absolue de (ici il n’y a pas d’arrondi lorsqu’on fait la somme). C’est une erreur relative de (qui domine largement l’erreur d’arrondi) ce qui signifie que dans la mantisse, seul le premier bit sur les 52 a un sens, la perte de précision est très grande.
Une autre conséquence importante est que l’addition de réels sur machine n’est pas une opération associative, par exemple alors que Dans Xcas, il n’y a que 48 bits de mantisse :
Exercice : pour calculer la valeur numérique d’une dérivée de fonction, il vaut mieux calculer que car le terme d’erreur est en et non en . Attention toutefois à ne pas prendre trop petit, sinon en flottants et même si , l’erreur absolue sur est (au moins) d’ordre , donc l’erreur relative est d’ordre . Par exemple pour h=1e-8 le reste est en donc de l’ordre des erreurs d’arrondi mais l’erreur relative sur est d’ordre largement supérieure (en flottants double-précision). On choisira plutôt tel que soit proche de , donc de l’ordre de 1e-5, qui fournira une valeur approchée avec une erreur relative de l’ordre de 1e-10. Exemple : calcul de la dérivée numérique de en
Remarquons néanmoins que les erreurs calculées ici sont des majorations
des erreurs réelles (ou si on préfère l’erreur obtenue dans le pire
des cas), statistiquement les erreurs sur les résultats sont moindres,
par exemple si on effectue calculs susceptibles de provoquer
des erreurs indépendantes suivant une même loi d’espérance nulle, la moyenne des
erreurs divisée par l’écart-type de la loi
tend vers une loi normale centrée réduite. De manière plus
déterministe, on a l’inégalité de Bienaymé-Tchebyshev
où est la variable aléatoire somme des erreurs,
l’erreur et la variance de la somme erreurs
supposées indépendantes, cette probabilité tend vers 0 pour
grand si est d’ordre , et ne tend
pas vers 0 si est de l’ordre de .
Exemple : somme de nombres répartis sur selon la loi
uniforme (représentant des erreurs), on divise par 20,
on effectue plusieurs tirages (par exemple 500) on trace l’histogramme et
on compare avec la loi normale de moyenne
nulle (l’espérance de la somme) et d’écart-type celui de la loi
uniforme.
Il est d’ailleurs souvent trop difficile de calculer une majoration rigoureuse de l’erreur pour des calculs sauf les plus simples. Lorsqu’on doute de la précision d’un calcul, un test peu couteux consiste à refaire ce calcul en utilisant des flottants en précision plus grande et tester si le résultat varie en fonction du nombre de chiffres significatifs utilisés, ou faire varier légèrement les données et observer la sensibilité du résultat. Si on veut travailler en toute rigueur sans pour autant calculer les erreurs à priori, il faut utiliser un logiciel utilisant des intervalles pour représenter les réels (section suivante)
2.3 L’arithmétique d’intervalle.
Certains systèmes de calcul formel peuvent manipuler directement
des intervalles réels, par exemple par l’intermédiaire de la
bibliothèque C MPFI. Les opérations arithmétiques sur des
intervalles renvoient alors le meilleur intervalle possible contenant
toutes les valeurs possibles lorsque les opérandes parcourent
leurs intervalles respectifs.
Exemple en Xcas (version 1.1.1 et ultérieures) :
[-1..2]*[-1..2]
renvoie [-2..4]
.
Attention ici on parcourt toutes les valeurs possibles de
. Ce qui est différent du carré
d’un intervalle ou plus généralement de l’évaluation
d’un polynôme en un intervalle, horner(x^2,[-1..2])
renvoie ainsi [0..4]
.
Les fonctions disponibles sont souvent moins riches qu’en arithmétique flottante, le calcul d’une fonction non monotone sur un intervalle peut s’avérer délicat, alors que si la fonction est monotone, il suffit de calculer l’image des deux bornes de l’intervalle. Pour les polynômes, Xcas décompose les coefficients en deux parties en fonction du signe, puis utilise la monotonie de et sur et respectivement.
L’arithmétique d’intervalle dans est beaucoup plus difficile à mettre en oeuvre puisqu’il n’y a plus d’ordre ni de monotonie, on doit alors s’en remettre à des estimations sur les parties réelles et imaginaires qui ne tiendront pas compte du phénomène ci-dessus sur la différence entre et .
2.4 Types composés.
Après les nombres réels, on passe aux nombres complexes : on utilise un couple (partie réelle, imaginaire) de fractions (exacts) ou de flottants et les règles habituelles sur les complexes.
On peut représenter les polynôme de la facon suivante :
- les polynômes à 1 variable, représentation dense, on stocke la liste des coefficients du polynôme par ordre croissant ou décroissant
- les polynômes à 1 variable, représentation creuse, on stocke des paires coefficients, degré pour les coefficients non nuls
- les polynômes à plusieurs variables, représenté récursivement de manière dense ou creuse (i.e. vu comme polynôme en à coefficients polynômes dépendant des variables ), ce sont des cas particuliers des 2 cas précédents
- les polynômes à plusieurs variables distribués, on stocke des monômes, qui sont des paires coefficient, liste d’entiers, la liste représentant les exposant des variables dans le monôme.
- la représentation symbolique (par exemple ) beaucoup plus difficile à manipuler directement
Algorithmes de base sur les polynômes : l’évaluation en un point (Horner, cf. TD/TP), la multiplication et division euclidienne et le PGCD (même algorithme que pour les entiers mais avec la division euclidienne des polynômes, attention toutefois aux erreurs d’arrondis)
Les symboles ou noms de variable désignent par exemple le nom d’une inconnue dans un polynôme, ils sont représentés par une chaine de caractére et peuvent être affectés à une valeur pendant une session (la valeur dépend d’un contexte d’exécution et le remplacement du symbole par sa valeur affectée est appelé évaluation).
Les expressions, par exemple sin(x)+2*x^2
,
elles peuvent être représentées par des arbres. L’évaluation
d’une expression consiste à remplacer les symboles de l’expression
par leur valeur, puis à effectuer les opérations en tenant compte
de la substitution. Il est parfois souhaitable de ne pas
effectuer certaines opérations de substitution, on empêche
l’évaluation, explicitement (''
) ou implicitement
(par exemple l’affectation n’évalue pas le symbole qu’on va affecter).
Les fonctions ne doivent pas être confondues avec les
expressions, elles associent à leurs arguments une expression. Par
exemple sin
est une fonction, alors que sin(x)
est une expression.
Les conteneurs contiennent plusieurs objets et permettent d’associer
à un indice un objet. Il en existe de plusieurs types, par exemple
les listes et les séquences
dont l’indice est un
entier compris entre 1 (ou 0) et la taille (-1), les tables dont
l’indice est plus général, et les tableaux
(utilisés pour les vecteurs, matrices)
qui sont essentiellement des listes ou des listes de listes de même taille.
Les séquences sont des listes d’objets ordonnés “non récursifs”
(ils ne peuvent contenir des séquences), alors que les listes
peuvent contenir des listes, sinon il n’y a pas de différences.
Dans les logiciels de calcul formel, la plupart du temps
les séquences se notent en indiquant les éléments séparés par
des virgules. Les listes s’en distinguent par les délimiteurs []
.
Il faut prendre garde au fait qu’en général affecter par exemple
l[1]:=3;
à une variable libre l
crée une table et
non une liste.
Remarque: certains logiciels accédent à certains types de
conteneurs uniquement par référence (par exemple maple pour les
vecteurs et matrices), dans ce dernier cas une seule copie des objets
du conteneur existe si on copie de la manière habituelle
une variable contenant un vecteur ou
une matrice dans une autre variable,
la modification d’un élément du conteneur modifie
alors toutes les copies pointant sur ce conteneur. Cette méthode
est plus efficace mais peut être surprenante.
3 Algèbre linéaire
3.1 Le pivot de Gauss
Cet algorithme permet de créer des zéros en effectuant des manipulations réversibles sur les lignes d’une matrice. Ces lignes peuvent représenter les coefficients d’un système linéaire, on obtient alors un système linéaire équivalent, ou les coordonnées d’un système de vecteur, on obtient alors les coordonnées d’un système de vecteur engendrant le même sous-espace vectoriel. On peut également représenter 2 matrices et reliés par une relation , cette relation reste alors vraie au cours et donc après la réduction.
3.1.1 L’algorithme
L’algorithme est le suivant:
- on initialise et , désigne le numéro de colonne à réduire, et le numéro de ligne à partir duquel on cherche un “pivot” (au début et valent donc 1, en général les 2 augmentent de 1 à chaque itération)
- Si ou est plus grand que le nombre de colonnes ou de lignes on arrête.
- Si la colonne n’a que des coefficients nuls à partir de la ligne , on incrémente le numéro de colonne de 1 et on passe à l’étape 2. Sinon, on cherche la ligne dont le coefficient est en valeur absolue le plus grand possible (en calcul approché) ou le plus simple possible (en calcul exact), on échange cette ligne avec la ligne . Puis on effectue pour toutes les lignes sauf ou pour toutes les lignes à partir de (selon qu’il s’agit d’une réduction de Gauss complète ou d’une réduction de Gauss sous-diagonale) la manipulation réversible On incrémente et de 1 et on passe à l’étape 2.
3.1.2 Efficacité de l’algorithme
Si la matrice possède lignes et colonnes, le nombre maximal d’opérations pour réduire une ligne est opérations (une opération=1 multiplication + 1 soustraction, en calculant une seule fois le quotient). Si on a déjà réduit colonnes, ce nombre est en fait puisqu’on ne calcule pas les 0 des colonnes déjà réduites. Il y a lignes à réduire à chaque étape et min étapes à effectuer, on en déduit que le nombre maximal d’opérations pour réduire une matrice est . Pour une matrice carrée de taille , cela fait opérations.
3.1.3 Erreurs d’arrondis du pivot de Gauss
Comme , une étape de réduction multiplie au plus l’erreur absolue des coefficients par 2. Donc la réduction complète d’une matrice peut multiplier au pire l’erreur absolue sur les coefficients par (où est le nombre d’étapes de réduction, inférieur au plus petit du nombre de lignes et de colonnes). Ceci signifie qu’avec la précision d’un double, on peut au pire perdre toute précision pour des matrices pas si grandes que ça (). Heureusement, il semble qu’en pratique, l’erreur absolue ne soit que très rarement multipliée par un facteur supérieur à 10, par exemple si on multiplie une matrice à coefficients flottants aléatoires dans selon la loi uniforme par son inverse, on trouve une erreur absolue très faible même pour des valeurs de largement plus grandes que 100.
Par contre, si on ne prend pas la précaution de choisir le pivot
de norme maximale dans la colonne, les erreurs d’arrondis se
comportent de manière bien moins bonnes, comme le montre l’ :
Exemple
Soit à résoudre le système linéaire
avec (pour une machine utilisant des doubles pour
les calculs en flottant,
plus généralement on choisira tel que
soit indistinguable de 0.0).
Si on résoud le système exactement,
on obtient (environ 1)
et (environ 1).
Supposons que l’on n’utilise pas la stratégie du pivot partiel,
on prend alors comme pivot , donc on effectue la
manipulation de ligne ce qui
donne comme 2ème équation .
Comme les calculs sont numériques, et à cause des erreurs
d’arrondis, cette 2ème équation sera remplacée par
d’où , qui sera remplacé
dans la 1ère équation, donnant donc
.
Inversement, si on utilise la stratégie du pivot partiel, alors
on doit échanger les 2 équations et puis on effectue
, ce qui donne
, remplacée en raison
des erreurs d’arrondi par donc , puis on remplace
dans ce qui donne .
On observe dans les deux cas que la valeur de est proche de la
valeur exacte, mais la valeur de dans le premier cas est
grossièrement eloignée de la valeur correcte.
On peut aussi s’intéresser à la sensibilité de la solution d’un système linéaire à des variations de son second membre. Cela fait intervenir le nombre de conditionnement de la matrice (voir plus bas) du système (qui est essentiellement la valeur absolue du rapport de la valeur propre la plus grande sur la valeur propre la plus petite), plus ce nombre est grand, plus la solution variera (donc plus on perd en précision).
3.2 Applications de Gauss
3.2.1 Base d’un sous-espace
On réduit la matrice des vecteurs écrits en ligne, puis on prend les lignes non nulles, dont les vecteurs forment une base du sous-espace vectoriel engendré par les vecteurs du départ.
Exemple : base du sous-espac engendré par . On réduit la matrice, la 3ème ligne est nulle donc on ne garde que les 2 premières lignes (remarque: une réduction sous-diagonale aurait suffi).
3.2.2 Déterminant
On réduit la matrice (carrée) en notant le nombre d’inversions de ligne, et on fait le produit des coefficients diagonaux, on change le signe si le nombre d’inversions de lignes est impair.
3.2.3 Réduction sous forme échelonnée (rref)
On réduit la matrice puis on divise chaque ligne par son premier coefficient non nul. Si la matrice représentait un système linéaire inversible on obtient la matrice identité sur les colonnes sauf la dernière et la solution en lisant la dernière colonne. La relation conservée est en effet où est la solution de l’équation, et à la fin de la réduction .
Par exemple pour résoudre le système
on réduit sous forme échelonnée la matrice
ce qui donne
[[1,0,0,-9],[0,1,0,8],[0,0,1,-2/3]]
, d’où la solution
.
3.2.4 Inverse
On accolle la matrice identité à droite de la matrice à inverser. On effectue la réduction sous forme échelonnée, on doit obtenir à droite l’identité si la matrice est inversible, on a alors à gauche la matrice inverse. La relation conservée est en effet où est l’inverse de la matrice de départ, et en fin de réduction .
Par exemple, pour calculer l’inverse
de [[1,2,3],[4,5,6],[7,8,0]]
, on réduit :
3.2.5 Noyau
On réduit la matrice sous forme échelonnée. Puis on introduit des lignes de 0 afin que les 1 en tête de ligne se trouvent sur la diagonale de la matrice. On enlève ou on rajoute des lignes de 0 à la fin pour obtenir une matrice carrée. Une base du noyau est alors formée en prenant chaque colonne correspondant à un 0 sur la diagonale, en remplaçant ce 0 par -1. On vérifie qu’on obtient bien 0 en faisant le produit de ce vecteur par la matrice réduite. De plus les vecteurs créés sont clairement linéairement indépendants (puisqu’ils sont échelonnés), et il y en a le bon nombre (théorème noyau-image).
Exemple : calcul du noyau de [[1,2,3,4],[1,2,7,12]]
, on
réduit la matrice avec rref, ce qui donne
[[1,2,0,-2],[0,0,1,2]]
, on ajoute une ligne de 0 entre
ces 2 lignes pour mettre le 1 de la 2ème ligne sur la diagonale
ce qui donne [[1,2,0,-2],[0,0,0,0],[0,0,1,2]]
, puis
on ajoute une ligne de 0 à la fin pour rendre la matrice carrée.
On obtient ainsi le système équivalent de matrice :
[[1,2,0,-2],[0,0,0,0],[0,0,1,2],[0,0,0,0]]
La 2ème colonne donne le premier vecteur de la base du noyau,
, la 4ème colonne donne le deuxième vecteur
, on vérifie aisément que ces 2 vecteurs
forment une famille libre du noyau, donc une base car
la dimension du noyau est égale à 2 (dimension de l’espace de départ
moins le rang de la matrice, c’est-à-dire le nombre de lignes
non nulles de la matrice réduite).
3.3 La méthode de factorisation
Dans sa forme la plus simple, elle permet d’écrire une matrice comme produit de deux matrices triangulaire inférieures et supérieures, ce qui ramène la résolution de système à la résolution de deux systèmes triangulaires. Pour tenir compte d’éléments diagonaux nuls et pour optimiser les erreurs d’arrondi, il est nécessaire d’effectuer des permutations sur les lignes de la matrice.
3.3.1 Interprétation matricielle du pivot de Gauss
On notera et le nombre de lignes et colonnes de (pour éviter la confusion avec le facteur ) et on supposera non singulière pour simplifier l’exposition.
Lorsqu’on réduit la colonne d’une matrice (partiellement réduite) à partir de la ligne (en supposant ), cela revient à multiplier à gauche par une matrice créée en partant de la matrice identité de taille où on remplace les 0 colonne , lignes à par le coefficient de la combinaison de ligne effectuée : donc : On vérifie facilement que l’inverse de cette matrice est Donc est le produit des matrices par une matrice réduite qui est triangulaire supérieure On vérifie ensuite que le produit des matrices revient à remplacer les coefficients de la colonne sous la diagonale par ceux de , ce qui donne une matrice triangulaire inférieure (avec des 1 sur la diagonale). Pour l’obtenir il suffit au cours de l’algorithme de réduction sous-diagonale du pivot de Gauss de stocker le coefficient de la combinaison linéaire dans une matrice initialisée à la matrice identité (on peut aussi le faire en place dans la matrice á réduire).
Attention, le produit ne s’obtient pas en copiant la colonne de pour variant de 1 à ! On peut l’obtenir en faisant une réduction sous-diagonale de la matrice bloc obtenue en collant avec la matrice identité ayant lignes.
3.3.2 Factorisation
Si on veut mettre en oeuvre la stratégie du pivot partiel (ou en calcul exact si un coefficient diagonal est nul), il est nécessaire d’intervertir une ligne de la matrice partiellement réduite avec une ligne en-dessous. Cela revient à réduire la matrice de départ après échange de ces mêmes lignes. En conséquence ce n’est pas qui est le produit mais une matrice obtenue par permutations de lignes de , que l’on peut écrire comme produit à gauche de par une matrice de permutation .
Remarque : si à une étape de réduction, tous les coefficients de la colonne à partir de la ligne sont nuls, on peut simplement ignorer cette colonne, on remplit la colonne de la matrice avec la colonne de à partir de la ligne .
3.3.3 Applications
On peut résoudre des systèmes linéaires par la factorisation . En effet soit à résoudre . On effectue la permutation de lignes sur et (correspondant à la matrice de permutation ), ce qui donne , puis on résoud (système triangulaire inférieur), puis on résoud (système triangulaire supérieur).
Comparaison avec la réduction complète sous forme échelonnée de :
-
La factorisation peut reservir plus tard pour résoudre le même
système linéaire avec un autre second membre.
Avec
rref
il faut dès le départ mettre tous les vecteurs colonnes second membre à . - Le nombre d’opérations pour résoudre un système est moindre. La réduction sous-diagonale nécessite de réduire les colonnes de 1 à , avec pour réduire la colonne combinaisons linéaire de lignes ayant coefficients non nuls, soit opérations (1 opération = 1 multiplication et 1 soustraction). La résolution des systèmes triangulaires est en .
- Le calcul est plus favorable au cache mémoire, puisqu’on travaille sur une portion de plus en plus petite de la matrice.
On peut inverser une matrice en utilisant la décomposition . Supposons pour simplifier que la permutation est l’identité. On calcule d’abord en utilisant le fait que est triangulaire inférieure, voici comment cela est implémenté dans Xcas ( est noté l) :
first step compute l^-1, solve l*a=y for y a canonical basis vector a0=y0, a1=y1-l_{1,0}*a0, ..., ak=yk-sum_{j=0..k-1}(l_kj*aj) if y=(0,..,0,1,0,...0) (1 at position i), a0=..=a_{i-1}=0, a_i=1 and we start at equation k=i+1 and sum_{j=i...} -> n^3/6 operations To store the result in place of l we first compute all the a2 (there is only 1), then all the a3 (2), etc. a0=y0, a1=y1-l_{1,0}*a0, ..., ak=yk-sum_{j=0..k-1}(l_kj*aj)
Puis on résoud colonne par colonne
second step, solve u*inverse=l^-1 (now under the diagonal) we compute a column of inverse by solving the system: u*col(inverse)=corresponding row of l^-1, and overwrite the row of l^-1 by solution u*[x0,..,xn-1]=[a0,...,an] x_{n-1}=a_{n-1}/u_{n-1,n-1} x_{n-2}=(a_{n-2}-u_{n-2,n-1}*x_{n-1})/u_{n-2,n-2} ... x_k=(a_{k}-sum_{j=k+1..n-1} u_{k,j}x_j)/u_{k,k} -> n^3/2 operations To store the solution in place, we first compute all the x_{n-1} put them in the last line of m, then all the x_{n-2}, etc.
3.4 La factorisation de Cholesky
Dans le cas où la matrice est réelle symétrique définie positive (ou plus généralement hermitienne), on peut obtenir une écriture analogue mais où est la transconjuguée de reste triangulaire inférieure, mais n’a plus des 1 sur sa diagonale en général. Si est définie positive, on peut rendre l’écriture unique en imposant aux coefficients diagonaux de d’être réels positifs.
L’algorithme de calcul de est la traduction matricielle de l’algorithme de Gauss de réduction des formes quadratiques. On a en effet les lignes de (ou les colonnes de ) sont donc les coefficients des formes linéaires indépendantes qui interviennent dans l’écriture de la forme quadratique comme somme/différence de carrés de formes linéaires. Si est définie positive, seules des sommes interviennent, et les variables s’éliminent l’une après l’autre (le coefficient de est forcément non nul lorsqu’on a éliminé et ainsi de suite), ceci explique la forme triangulaire de et .
Le calcul de se fait donc colonne par colonne, en calculant d’abord le coefficient diagonal comme racine carrée du coefficient diagonal . Ensuite on effectue les combinaisons de ligne sous la forme
On peut aussi tout simplement effectuer le produit de et chercher les inconnues en commencant par puis on calcule les pour , etc. En suivant wikipedia, pour une matrice réelle : La matrice étant symétrique, il suffit que les relations ci-dessus soient vérifiées pour , c’est-à-dire que les éléments de la matrice doivent satisfaire Pour , on détermine la première colonne de donc On détermine la -ième colonne de ( après avoir calculé les premières colonnes d’où Pour une matrice hermitienne complexe, il suffit de remplacer par et par .
Le nombre d’opérations arithmétiques à effectuer est asymptotiquement 2 fois plus faible que celui pour . En effet, pour la première ligne, il faut 1 racine et divisions, pour la deuxième ligne, 1 racine, additions, multiplications et divisions, ..., pour la -ième ligne 1 racine, additions, multiplications et divisions, au final le cout est dominé par les additions et multiplications en pour chaque, contre pour la factorisation . Mais le temps réel dépend de l’optimisation de l’implémentation, en particulier des accès mémoire plus couteux que les opérations arithmétiques, ainsi avec Xcas, l’algorithme de Cholesky n’est pas plus rapide que la factorisation .
La commande Xcas correspondante est cholesky
et renvoie
la matrice .
3.5 Conditionnement
Le conditionnement mesure la sensibilité de la solution renvoyée d’un système linéaire aux données du problème.
3.5.1 Rappel sur les normes matricielles
On utilisera les normes suivantes sur l’espace vectoriel des matrices :
-
la norme infinie =max
- les normes subordonnées à une norme de ou
dite norme triple
Xcas reconnait trois normes triples, subordonnées aux normes ,
(euclidienne) et sur ou
- la norme de Frobénius
Si on prend comme norme la norme , le calcul de nécessite de maximiser pour de norme 1, ce qui revient à maximiser . En diagonalisant la matrice hermitienne , on voit qu’il suffit d’en trouver la plus grande valeur propre et d’en prendre la racine carrée. Les valeurs propres de sont appelées valeurs singulières de (ce sont des réels positifs).
Le calcul de la normes triple infinie est plus simple, si avec égalité si les valent avec le bon choix de signe. On en déduit que aussi appelé norme de ligne (on prend le max sur les lignes de la somme des valeurs absolues des coefficients de la ligne).
Pour la norme 1, on trouve la norme colonne (max sur les colonnes de la somme des valeurs absolues des coefficients d’une colonne) : Pour réaliser la norme triple, on prend si qui réalise le max, et .
3.5.2 Nombre de condition
Soit le système linéaire de solution , supposons connu avec une erreur , alors la solution renvoyée sera , on a donc une erreur relative sur la solution de (la dernière inégalité s’obtient en écrivant ). On en déduit que le rapport de l’erreur relative sur la solution par l’erreur relative du second membre est majorée par le produit de la norme de (en tant qu’application linéaire) par la norme de , ce produit est appelé conditionnement de la matrice (ou parfois nombre de condition de en adoptant la terminologie anglo-saxonne).
On remarquera que le conditionnement dépend du choix de la norme sur l’espace vectoriel. Pour la norme 2, on sait que est la plus grande valeur singulière de le même calcul pour (dont les valeurs singulières sont les inverses des valeurs singulières de ) nous donne alors le :
Ce facteur d’amplification des erreurs relatives est évidemment supérieur ou égal à 1. Il est égal à 1 si la matrice est unitaire (puisque est une matrice d’isométrie ou car ). S’il est de l’ordre de on perdra (au plus) bits de précision sur la mantisse de .
Avec Xcas, les valeurs singulières s’obtiennent par l’instruction
SVL(A)
, le conditionnement par cond(A,2)
(cond(A,1)
donne le conditionnement et cond(A,inf)
donne le conditionnement ).
Attention, les valeurs singulières de ne sont pas les valeurs
absolues des valeurs propres de (c’est le cas si
commute avec sa transconjuguée mais ce n’est pas général).
On peut utiliser la méthode de la puissance (cf. infra) pour estimer
rapidement la plus
grande valeur singulière de (donc sans diagonaliser complètement
la matrice ), et de même sur (en utilisant
ou Cholesky pour trouver les itérées sans calculer ).
On remarque que si est une matrice orthogonale, alors son nombre de conditionnement vaut 1, si on doit utiliser des matrices orthogonales dans un algorithme, ce sera stable numériquement.
On peut aussi prendre la norme sur l’espace vectoriel, dans ce
cas la norme de matrice correspondante est la norme de colonne (exercice!),
le maximum des sommes valeurs absolues des éléments
des colonnes (colNorm(A)
en Xcas) et le conditonnement
est le produit de colNorm(A)
par colNorm(inv(A))
qui est renvoyé par COND(A)
en Xcas.
Si la matrice du système (de nombre de condition noté ) est elle-même connue avec une certaine incertitude, alors pour suffisamment petit, la solution de vérifie En effet, on a donc en norme puis :
3.6 Quelques méthodes alternatives au pivot
3.6.1 Factorisation
La factorisation consiste à écrire une matrice comme produit d’une matrice orthogonale (ou unitaire dans ) et d’une matrice triangulaire supérieure. Les matrices orthogonales ayant un conditionnement de 1 (en norme ) cette factorisation peut s’obtenir de manière numériquement stable.
Il existe plusieurs algorithmes pour effectuer cette factorisation. On peut voir cette factorisation comme l’orthonormalisation de Gram-Schmidt appliqué aux vecteurs colonnes de si est non singulière. Mais la procédure de Gram-Schmidt n’est pas numériquement stable (car on retranche d’un vecteur une combinaison linéaire des vecteurs précdents pour rendre le nouveau vecteur orthogonal et les erreurs d’arrondi s’accumulent rendant l’orthogonalité plus aléatoire). La méthode de Householder utilise des matrices de symétrie par rapport à un hyperplan et ne souffre pas de ce problème d’instabilité. Pour annuler les coefficients de la première colonne de , on construit le vecteur où est le premier vecteur de base et le signe est le signe de la première composante de (pour assurer la stabilité numérique). On fait alors la symétrie par rapport à l’hyperplan orthogonal à , qui laisse invariant et transforme en . Comme est vecteur directeur de la bissectrice intérieure ou extérieure de et , la symétrie échange ces deux vecteurs, éventuellement au signe près. La matrice a donc comme première colonne un multiple de , on continue ensuite en faisant le même raisonnement sur la matrice en se limitant et lignes et colonnes d’indice . Après itérations, on a qui est triangulaire supérieure d’où la factorisation annoncée.
Matriciellement, où , pour calculer il faut effectuer , on calcule donc en opérations (ou une opération est une addition et une multiplication) puis on soustrait de en opérations. En faisant de même aux étapes qui suivent, sans tenir compte de la simplification progressive du vecteur , on effectue opérations. La constante 2 peut être un peu améliorée en tenant compte des 0 initiaux de aux étapes 2 et ultérieures, elle est toutefois supérieure à LU (et Cholesky), mais en contrepartie la méthode est très stable numériquement.
On peut aussi utiliser des rotations (méthode de Givens) pour annuler les coefficients de sous la diagonale. C’est par exemple très efficace pour des matrices tridiagonales.
Lorsque la matrice n’est pas carrée, mais possède lignes et colonnes, la factorisation est encore possible, la matrice est alors une matrice carrée d’ordre , et a les mêmes dimensions que . En particulier si a plus de lignes que de colonnes (matrice verticale), aussi. Par exemple si est de rang maximal , alors se décompose en un premier bloc inversible et un deuxième bloc entièrement nul.
Applications :
On peut alors écrire sous la forme
donc qui est un système triangulaire supérieur,
donc résoudre en opérations une fois
la factorisation effectuée.
Mais c’est surtout pour résoudre au sens des moindres carrés un système sur-déterminé que la factorisation trouve tout son intérêt. Soit la matrice d’un système sur-déterminé avec lignes et colonnes, (matrice “verticale” ou mince). Le système n’a en général pas de solution, on cherche alors à minimiser . Ceci revient à chercher la projection orthogonale de sur Im. Soit cette projection, on a avec orthogonal à Im donc dans Ker, donc .
Si on a alors . Si est de rang maximal , on décompose en avec inversible de taille et , donc et le système devient et comme est inversible, on a les premières lignes de . Il vaut mieux résoudre ce système que car le conditionnement de est le carré du conditionnement de (le nombre d’opérations est un peu supérieur : a une constante nettement plus grande que Cholesky mais il n’y a pas de multiplication de matrice à faire, et le résultat est plus précis).
Notons qu’on peut résoudre de manière assez analogue un système sous-déterminé au sens des moindres carrés. On considère toujours le système mais cette fois-ci est une matrice “horizontale” (nombre de lignes le nombre de colonnes). Si Im (on peut génériquement supposer que est de rang ), il y a une infinité de solutions, on cherche alors la solution de norme minimale. On cherche donc le projeté orthogonal de l’espace affine des solutions (dirigé selon Ker) sur l’orthogonal de Ker qui est Im. Ainsi vérifie , donc . Si est de rang alors est inversible et donc . En utilisant la factorisation de (attention pas celle de ), on a , donc . Si est de rang , on a alors en posant avec matrice inversible : où désigne les premières colonnes de .
Exemple 1 : la régression linéaire :
On se donne points de coordonnées où les
sont distincts 2 à 2 et on cherche
la droite qui approche le mieux ces points au sens de l’écart en
au carré. Il s’agit donc de trouver et qui minimisent :
Ici on a :
Pour trouver de manière précise, on préferera
donc calculer la factorisation de plutôt que calculer , est
une matrice carrée d’ordre 2, une matrice carrée d’ordre ,
la première colonne de est le vecteur de coordonnées
.
Exemple : on se donne les points . La
matrice et sont donc
Exemple 2: régression polynomiale :
C’est une généralisation de l’exemple précédent, on cherche un polynôme
de degré fixé tel que soit minimal. Si on
choisit la base canonique des polynômes, la
matrice est alors une matrice de Vandermonde
et son conditionnement est en général très
mauvais. De plus, plus le degré augmente, plus l’extrapolation
est hasardeuse :
On préfèrera utiliser une base de polynômes orthogonaux pour le produit scalaire ou minimiser une autre fonctionnelle quadratique, par exemple une intégrale du carré de la différence entre une fonction à approcher et un polynôme ou un polynôme trigonométrique.
Remarque : La factorisation peut s’obtenir en calculant la factorisation de Cholesky de qui donne , mais on lui préfère une méthode de calcul direct pour des raisons de stabilité, en tout cas pour des matrices denses (pour des matrices creuses des considérations d’efficacité peuvent faire préférer la factorisation de Cholesky).
3.6.2 Jacobi, Gauss-Seidel, relaxation
Lorsqu’on a une matrice creuse (peu d’éléments non nuls), l’algorithme du pivot de Gauss a tendance à densifier rapidement la matrice réduite (surtout avec le pivot partiel où on ne controle pas le nombre de zéros de la ligne contenant le pivot). Il peut alors être intéressant d’utiliser des méthodes alternatives ne faisant intervenir que des produits de matrice, donnant éventuellement un résultat seulement approché.
Par exemple pour calculer l’inverse d’une matrice , avec facile à inverser (par exemple diagonale) et petit en norme et creuse, on peut écrire :
De même pour résoudre un système linéaire avec , on considère la suite , donc est obtenu en résolvant le système : pour laquelle on vérifiera les hypothèses du théorème du point fixe, il suffit par exemple de vérifier que la plus grande valeur singulière de est strictement plus petite que 1. Lorsque la matrice n’est pas creuse, le procédé est intéressant pour résoudre approximativement un système si est grand et si chaque itération est en (ceci veut dire qu’on ne calcule pas sauf si c’est évident, par exemple si est diagonale), mais le procédé n’est pas intéressant pour le calcul de l’inverse de .
Notons la partie diagonale de ,
sa partie triangulaire inférieure stricte, sa partie
triangulaire supérieure stricte,
La méthode de Jacobi utilise pour la
diagonale de , alors
que la méthode de Gauss-Seidel prend pour la partie triangulaire
inférieure de (diagonale comprise).
Pour Jacobi, on a donc
En Xcas, l’instruction préprogrammée est jacobi_linsolve
,
on peut aussi programmer la méthode par
jacobi(A,b,eps,N):={ local D,x0,x1,n,j; n:=size(A); D:=diag(A).^-1; x0:=seq(0,n); pour j de 1 jusque N faire x1:=b-A*x0; si l2norm(x1)<eps alors return x0; fsi; x0:=x0+D .*x1; fpour; return "non convergent"; }:;
Un cas simple où on a convergence :
En effet,
car :
On retrouve ce cas pour une petite perturbation d’une matrice
diagonale, par exemple
Pour assez grand, la méthode de Jacobi devient plus rapide. Cela
se vérifie encore plus vite si est une matrice creuse.
Pour Gauss-Seidel, le calcul de n’est pas effectué, on résoud directement le système triangulaire soit Gauss-Seidel est moins adapté à la parallélisation que Jacobi. On adapte le programme précédent
seidel(A,b,N,eps):={ local L,U,x0,x1,n,j; n:=size(A); L:=diag(A,left); U:=A-L; x0:=seq(0.0,n); pour j de 1 jusque N faire x1:=b-U*x0; x1:=linsolve(L,x1); si l2norm(x1-x0)<eps*l2norm(x0) alors return x0; fsi; x0:=x1; fpour; return "non convergent"; }:;
Dans la méthode de relaxation, on pose pour la matrice triangulaire
inférieure où , donc
et on utilise la récurrence donc
puis
puis
On remarque que Gauss-Seidel correspond à .
L’instruction correspondante de Xcas est gauss_seidel_linsolve
et
peut prendre en paramètre le coefficient de relaxation,
dont la valeur par défaut est 1.
On utilise la norme correspondant à la forme quadratique de matrice et on calcule la norme subordonnée de , on a avec donc Conséquence : si symétrique définie positive, alors Gauss-Seidel converge, car . Pour la relaxation, on a qui est définie positive si .
Remarque : Jacobi et Gauss-Seidel sont implémentées dans les commandes Xcas jacobi_linsolve et gauss_seidel_linsolve.
3.6.3 Le gradient conjugué
Il s’agit de résoudre , où est définie positive. Si on a une base orthogonale pour le produit scalaire induit par , on peut calculer la -ième coordonnée de dans cette base en faisant le produit scalaire de par le -ième vecteur de la base. On construit donc petit à petit une base orthogonale pour par un procédé à la Gram-Schmidt, mais on ne part pas de la base canonique : on construit cette famille orthogonale pour en meme temps qu’on calcule les composantes de . On pose , à la i-ième itération si on a terminé, sinon est linéairement indépendant des éléments de la famille orthogonale dejà construite, on complète la famille orthogonale avec un nouveau vecteur, on calcule la -ième composante de sur la famille orthogonale, et on ajoute le tout à pour obtenir . On s’arrête en au plus la dimension itérations lorsque la famille orthogonale est devenue une base.
La commande conjugate_gradient(A,b)
de Xcas permet de faire ce
calcul, on peut préciser une valeur initiale de recherche x0
et une précision eps
en tapant
conjugate_gradient(A,b,x0,eps)
.
Voir aussi le menu Exemple, analyse, gradconj
4 Approximation polynomiale
On présente dans cette section quelques méthodes d’approximation de fonctions par des polynômes sur un intervalle, la section suivante présente des méthodes d’approximation près d’un point ou de l’infini.
4.1 Polynôme de Lagrange
Étant donné la facilité de manipulation qu’apportent les polynomes, on peut chercher à approcher une fonction par un polynôme. La méthode la plus naturelle consiste à chercher un polynôme de degré le plus petit possible égal à la fonction en certains points et à trouver une majoration de la différence entre la fonction et le polynôme. Le polynome interpolateur de Lagrange répond à cette question.
4.1.1 Existence et unicité
Soit donc des réels distincts et les valeurs de la fonction à approcher en ces points (on posera pour approcher la fonction ). On cherche donc tel que pour .
Commencons par voir s’il y a beaucoup de solutions. Soit et deux solutions distinctes du problème, alors est non nul et va s’annuler en donc possède racines donc est de degré au moins. Réciproquement, si on ajoute à un multiple du polynome , on obtient une autre solution. Toutes les solutions se déduisent donc d’une solution particulière en y ajoutant un polynome de degré au moins multiple de .
Nous allons maintenant construire une solution particulière de degré au plus . Si , on prend constant. On procède ensuite par récurrence. Pour construire le polynôme correspondant à on part du polynoôme correspondant à et on lui ajoute un multiple réel de Ainsi on a toujours pour , on calcule maintenant pour que . En remplacant avec l’expression de ci-dessus, on obtient Comme tous les sont distincts, il existe une solution unique :
On a donc prouvé le :
Exemple : déterminons le polynome de degré inférieur ou égal
à 2 tel que . On commence par .
Puis on pose .
Comme on en tire
donc . Puis on pose , on a
donc , finalement .
4.1.2 Majoration de l’erreur d’interpolation.
Reste à estimer l’écart entre une fonction et son polynome interpolateur, on a le :
Ainsi l’erreur commise dépend d’une majoration de la taille de la dérivée -ième sur l’intervalle, mais aussi de la disposition des points par rapport à . Par exemple si les points sont équidistribués, le terme sera plus grand près du bord de qu’au centre de .
Preuve du théorème : Si est l’un des l’égalité est vraie. Soit on considère maintenant la fonction : elle s’annule en pour variant de 0 à ainsi qu’en suite au choix de la constante , donc s’annule au moins fois sur l’intervalle contenant les et , donc s’annule au moins fois sur ce même intervalle, donc s’annule au moins fois, etc. et finalement s’annule une fois au moins sur cet intervalle. Or car est de degré inférieur ou égal à et est de degré inférieur ou égal à . Donc il existe bien un réel dans l’intervalle contenant les et tel que
Attention, l’erreur d’interpolation peut devenir très grande lorsqu’on utilise beaucoup de points d’interpolation.
4.1.3 Calcul efficace du polynôme de Lagrange.
Avec la méthode de calcul précédent, on remarque que le polynôme de Lagrange peut s’écrire à la Horner sous la forme : ce qui permet de le calculer rapidement une fois les connus. On observe que On va voir que les peuvent aussi se mettre sous forme d’une différence. On définit les différences divisées d’ordre par récurrence On va montrer que . C’est vrai au rang 0, il suffit donc de le montrer au rang en l’admettant au rang . Pour cela on observe qu’on peut construire le polynôme d’interpolation en à partir des polynômes d’interpolation en et en par la formule : en effet on vérifie que pour car , et pour et , on a aussi et . Or est le coefficient dominant de donc c’est la différence du coefficient dominant de et de divisée par , c’est-à-dire la définition de en fonction de et .
Exemple : on reprend . On a donc .
On peut naturellement utiliser l’ordre que l’on souhaite pour les , en observant que le coefficient dominant de ne dépend pas de cet ordre, on en déduit que est indépendant de l’ordre des , on peut donc à partir du tableau ci-dessus écrire par exemple avec l’ordre 2,1,0, sous la forme
Le nombre d’opérations nécessaires pour faire ce calcul est proportionnel à .
La commande Xcas interp
ou son synonyme lagrange
effectue ce calcul. Pour avoir les différences divisées,
on peut créer le programme suivant :
dd(X,Y):={ // Algorithme des différences divisées local k,l,n,A,old,cur; si size(X)!=size(Y) alors return "erreur" fsi; n:=size(X)-1; A:=[Y[0]]; old:=Y; pour k de 1 jusque n faire // calcul de cur en fonction de old cur:=[]; pour l de 0 jusque n-k faire cur[l]:=(old[l+1]-old[l])/(X[l+k]-X[l]) fpour; A[k]:=cur[0]; old:=cur; fpour; retourne A; }:;
(N.B. pour rendre ce programme optimal, il faudrait utiliser
l’affectation en place =<
au lieu de :=
)
4.1.4 Sensibilité aux erreurs sur les données.
Si les sont connus avec une certaine erreur, alors le polynôme
d’interpolation est connu de manière approchée. Plus
précisément, si on note
le -ième polynome de Lagrange valant 1 en et 0 ailleurs,
l’erreur vaut :
Si l’erreur relative sur les est majorée par ,
l’erreur sur le polynôme d’interpolation est majorée par :
il y a amplification de l’erreur par un facteur majoré par
Ce facteur s’appelle constante de Lebesgue relative à la
subdivision de . On peut le calculer
numériquement pour une subdivision équidistribuée,
et montrer qu’il croit comme ,
par exemple pour , il vaut environ 5e9.
Illustration avec Xcas :
puis essayer avec . Pour , en observant que le max est atteint dans , on peut remplacer les valeurs absolues par la bonne puissance de -1
on a alors un polynôme, dont on calcule l’abscisse du maximum par
puis
qui donne environ 4.7e9.
4.2 Interpolation aux points de Tchebyshev
L’idée la plus naturelle pour interpoler un polynôme en
points d’un intervalle consiste à couper en morceaux
de même longueur. Mais ce n’est pas le plus efficace car le
terme est plus grand près des bords. Il est
donc plus judicieux d’avoir plus de points près des bords et moins
à l’intérieur. C’est là qu’interviennent les polynômes de
Tchebyshev, ils sont définis par développement de
en puissances de :
Sur , le polynôme vaut en valeur absolue au plus 1, et
atteint cette valeur exactement fois lorsque donc
.
De plus cette majoration est optimale. En effet
soit un polynôme de degré au plus
qui vérifie sur
et tel que ait le même coefficient dominant que
. Alors la différence est du signe de en
puisqu’en ces points est
extrêmal de valeur absolue 1. Donc s’annule fois sur
, mais son degré est au plus donc absurde.
On a donc intérêt à prendre les abscisses des points
d’interpolation en les racines de
On pourra observer que le phénomène de
Runge qui apparait par
exemple pour sur avec des points d’interpolation
équidistants n’apparait plus si on prend des points de Tchebyshev.
Ceci est relié à la constante de Lebesgue qui pour des points de Tchebyshev vaut un peu moins de 4 pour (se comporte comme pour grand), on peut montrer que les polynômes de Lagrange aux points de Tchebyshev convergent uniformément vers (c’est plus généralement vrai pour toute fonction sur l’intervalle).
Remarque : ce n’est pas le polynôme de meilleure approximation, de (celui qui minimise la norme de la différence) car la dérivée -ième varie en général sur . Mais il est trop difficile de le calculer en général.
Exemple de calcul explicite de constante de Lebesgue pour avec Xcas
purge(x); t(k,n):={ local T; T:=seq(cos(pi*(k+.5)/(n+1)),k,0,n); return product((x-T[j])/(T[k]-T[j]),j,0,k-1)* product((x-T[j])/(T[k]-T[j]),j,k+1,n); }:;
4.3 Interpolation de Hermite
Si on fait tendre un des points d’interpolation vers un autre, la donnée de la valeur en ces 2 points serait redondante, elle est remplacée par la valeur de la dérivée. Dans le calcul des différences divisées ci-dessus on fera comme si les 2 points étaient distincts et successifs, disons et , on remplace le rapport indéterminé par . On montre qu’une fois ce changement réalisé tout le reste est identique (y compris la majoration d’erreur). On peut bien sur généraliser au cas de plusieurs paires de points identiques ou des multiplicités plus grandes faisant intervenir des dérivées d’ordre supérieures, dans ce cas la différence divisée sera remplacée par .
4.4 Polynômes de Bernstein et courbes de Bézier
Les polynômes de Bernstein de degré sont les On reconnait la probabilité d’avoir succès si on effectue tirages indépendants (avec remise) avec probabilité de succès par tirage. Ceci donne une relation de récurrence qui peut servir à calculer les . On en déduit aussi que l’espérance de selon cette loi vaut (somme de variables d’espérance ) et l’espérance de vaut (variance de la somme de variables indépendantes de variance ). On en déduit qu’on peut approcher uniformément une fonction continue sur un intervalle par des polynômes, en se ramenant à , on pose : En effet, par continuité uniforme de sur , pour , il existe tel que , dans on décompose la somme sur en deux parties, et , pour la première somme, on majore par puis par , pour la deuxième somme, on majore par et on utilise pour se ramener au calcul de la variance de , au final il suffit de choisir assez grand pour rendre le membre de droite plus petit que .
Les polynômes de Bernstein ne sont pas des polynômes interpolateurs aux points , et la convergence n’est pas forcément très rapide. On les utilise pour approcher rapidement des morceaux de courbes, si on se donne des “points de controle” on construit la courbe paramétrée appelée courbe de Bézier. En pratique on les utilise pour .
4.5 Polynômes orthogonaux.
Il s’agit d’une autre méthode d’approximation, particulièrement important pour l’intégration : les polynômes de meilleur approximation au sens de normes ou à poids sur l’intervalle de bornes et (finis ou infinis). On considère le produit scalaire et on projette alors la fonction à approcher sur une base de polynômes orthogonaux de degrés croissants construit par la procédure de Gram-Schmidt à partir de la base canonique pour le produit scalaire ci-dessus.
En effet, soit le nombre de racines réelles de , on pose et , est de signe constant et non identiquement nul donc donc sinon serait de degré strictement plus petit que donc orthogonal à .
On peut aussi construire ces polynômes en cherchant les valeurs propres de où est un polynôme de degré au plus 2 sur , tel que s’annule (ou tend vers 0) aux bornes de l’intervalle d’intégration : si et sont finis . On a alors car le terme tout intégré s’annule (puisque s’annule en et ). Donc est symétrique, les vecteurs propres de correspondant à des valeurs propres distinctes sont donc orthogonaux entre eux. Pour trouver ces valeurs propres/polynômes vecteurs propres, on écrit pour un polynôme de degré . Si est un polynôme de degré au plus 1, le terme de degré dominant de cette équation donne la valeur de et les termes de degré plus petits permettent en général de déterminer de manière unique les coefficients de en fonction du coefficient dominant.
Pour certains poids standards, les polynômes obtenus ont un nom :
- Legendre pour sur ,
- Hermite pour sur ,
- Laguerre pour sur ,
- Tchebyshev de première espèce pour sur ,
- Tchebyshev de deuxième espèce pour sur ,
Ainsi, les polynômes de Legendre vérifient
Le terme de degré de cette équation donne ,
le terme sous-dominant est nul. Plus générallement,
le terme de degré vérifie
Ceci permet de calculer le polynôme , on normalise
par .
Le calcul de ces polynômes peut aussi se faire par une récurrence à 2 crans du type : La valeur de est définie par la normalisation de la famille de polynômes, ensuite et sont déterminés respectivement par et donc Les autres relations d’orthogonalité sont automatiquement vérifiées puisque et est orthogonal aux polynômes de degré .
Dans l’exemple des polynômes de Legendre, les polynômes obtenus sont pairs si est pair et impairs sinon, la relation de récurrence a donc un coefficient nul. La convention de normalisation usuelle est , on peut montrer qu’on a et donc . En effet la normalisation en 1 donne donc , les termes de degré et de donnent On applique alors (??) et on déduit de la deuxième équation ci-dessus : puis on applique la première : d’où
Remarques
- On peut utiliser la récurrence à deux crans pour évaluer le polynôme en un réel, il n’est alors pas nécessaire de calculer dans la base canonique.
- La récurrence à deux crans se généralise pour les degrés plus petits que au produit scalaire où les sont des abscisses distinctes 2 à 2. Le calcul d’une base orthogonale permet de faire des calculs de régressions polynomiales mieux conditionnés qu’en utilisant la base canonique (et la matrice de Vandermonde).
- On peut voir l’interpolation trigonométrique (séries de Fourier, transformée de Fourier discrète) comme une généralisation en remplaçant une base orthonormalisée de polynômes par une base orthogonale de sinus, cosinus ou exponentielles.
4.6 Les splines
Il s’agit de fonctions définies par des polynomes de degré borné sur des intervalles, dont on fixe la valeur aux extrémités des intervalles (comme pour le polynome de Lagrange) ce qui rend la fonction continue, de plus on exige un degré de régularité plus grand, par exemple etre de classe . Enfin, on fixe des conditions aux bornes de la réunion des intervalles, par exemple avoir certaines dérivées nulles.
Par exemple supposons qu’on se donne intervalles, donc points , on se fixe une régularité . Ceci entraine conditions de recollement, on y ajoute conditions de valeur en , on a donc conditions, la borne sur le degré des polynomes doit donc etre (ou plus, mais suffit) ce qui donne degrés de liberté, on peut donc ajouter conditions, par exemple pour les splines naturelles, on impose que les dérivées d’ordre à soient nulles en et (si est pair, on commence à la dérivée -ième nulle en ).
Pour trouver les polynomes, on doit donc résoudre un grand système linéaire. Une méthode permettant de diminuer la taille du système linéaire à résoudre dans le cas des splines naturelles consiste à se fixer inconnues représentant les dérivées -ième de la spline en sur à sur , et inconnues , représentant la valeur de la dérivée de en pour variant de 1 à . On peut alors écrire le polynome sur l’intervalle car on connait son développement de Taylor en . On effectue un changement d’origine (par application répétée de Horner) en . On obtient alors le polynome sur en remplaçant uniquement la dérivée -ième par . On continue ainsi jusqu’en . Le système s’obtient en calculant la valeur du polynome en et la nullité des dérivées d’ordre à en . On résoud le système et on remplace pour avoir les valeurs numériques des coefficients du polynome.
4.7 Autres approximations polynomiales.
On peut citer le polynôme de Taylor en un point qui donne une bonne approximation près du point (voir aussi ci-dessus le polynôme de Hermite), les approximants de Padé où on approche par le quotient de 2 polynômes (ceci donne parfois de très bons résultats comme pour la fonction exponentielle près de 0 par exemple).
On utilise aussi souvent des approximations distinctes selon l’intervalle considéré, par exemple l’interpolation linéaire par morceaux, les fonctions splines ... ou la réduction d’arguments pour se ramener à un intervalle avec une bonne apprixomation (par exemple )
5 Intégration numérique
Les fractions rationnelles admettent une primitive que l’on calcule en décomposant la fraction avec Bézout comme expliqué précédemment. Mais elles font figure d’exceptions, la plupart des fonctions n’admettent pas de primitives qui s’expriment à l’aide des fonctions usuelles. Pour calculer une intégrale,on revient donc à la définition d’aire sous la courbe, aire que l’on approche, en utilisant par exemple un polynome de Lagrange.
Le principe est donc le suivant : on découpe l’intervalle d’intégration en subdivisions , où est le pas de la subdivision, et sur chaque subdivision, on approche l’aire sous la courbe.
5.1 Les rectangles et les trapèzes
Sur une subdivision , on approche la fonction par un segment. Pour les rectangles, il s’agit d’une horizontale : on peut prendre , (rectangle à droite et gauche) ou (point milieu), pour les trapèzes on utilise le segment reliant à .
Exemple : calcul de la valeur approchée de (on en connait la valeur exacte ) par ces méthodes en subdivisant en 10 subdivisions (pas ), donc et pour variant de 0 à 9. Pour les rectangles à gauche, on obtient sur une subdivision que l’on multiplie par la longueur de la subdivision soit : Pour les rectangles à droite, on obtient Pour le point milieu Enfin pour les trapèzes, l’aire du trapèze délimité par l’axe des , les verticales , et les points sur ces verticales d’ordonnées respectives et vaut donc Dans la somme des trapèzes, on voit que chaque terme apparait deux fois sauf le premier et le dernier.
Plus généralement, les formules sont donc les suivantes :
où est le pas de la subdivision, le nombre de
subdivisions.
On observe sur l’exemple que le point milieu et les trapèzes donnent une bien meilleure précision que les rectangles. Plus généralement, la précision de l’approximation n’est pas la même selon le choix de méthode. Ainsi pour les rectangles à gauche (le résultat est le même à droite), si est continument dérivable, de dérivée majorée par une constante sur , en faisant un développement de Taylor de en , on obtient Ainsi dans l’exemple, on a , l’erreur est donc majorée par sur une subdivision, donc par sur les 10 subdivisions.
Pour le point milieu, on fait le développement en à l’ordre 2, en supposant que est deux fois continument dérivable : Dans l’exemple, on a , donc l’erreur sur une subdivision est majorée par , donc sur 10 subdivisions par .
Pour les trapèzes, la fonction dont le graphe est le segment reliant à est , c’est en fait un polynome de Lagrange, si est deux fois continument dérivable, on peut donc majorer la différence entre et en utilisant (??), on intègre la valeur absolue ce qui donne où est un majorant de sur .
Lorsqu’on calcule l’intégrale sur par une de ces méthodes, on fait la somme sur subdivisions de longueur , on obtient donc une majoration de l’erreur commise sur l’intégrale :
- pour les rectangles à droite ou gauche
- pour le point milieu
- pour les trapèzes .
Lorsque tend vers 0, l’erreur tend vers 0, mais pas à la même vitesse, plus rapidement pour les trapèzes et le point milieu que pour les rectangles. Plus on approche précisément la fonction sur une subdivision, plus la puissance de va être grande, plus la convergence sera rapide lorsque sera petit, avec toutefois une contrainte fixée par la valeur de , borne sur la dérivée -ième de (plus est grand, plus est grand en général). Nous allons voir dans la suite comment se comporte cette puissance de en fonction de la facon dont on approche .
5.2 Ordre d’une méthode
On appelle méthode d’intégration l’écriture d’une approximation de l’intégrale sur une subdivision sous la forme où les sont dans l’intervalle , par exemple équirépartis sur . On utilise aussi la définition : On prend toujours (ou ) pour que la méthode donne le résultat exact si la fonction est constante.
On dit qu’une méthode d’intégration est d’ordre si il y a égalité ci-dessus pour tous les polynômes de degré inférieur ou égal à et non égalité pour un polynôme de degré . Par exemple, les rectangles à droite et gauche sont d’ordre 0, le point milieu et les trapèzes sont d’ordre 1. Plus généralement, si on approche par son polynôme d’interpolation de Lagrange en points (donc par un polynôme de degré inférieur ou égal à ), on obtient une méthode d’intégration d’ordre au moins .
Si une méthode est d’ordre avec des et si est fois continument dérivable, alors sur une subdivision, on a :
En effet, on fait le développement de Taylor de par exemple en à l’ordre Donc De plus, Donc comme la méthode est exacte pour , on en déduit que Si les , alors et on obtient finalement (??)
On remarque qu’on peut améliorer la valeur de la constante en faisant tous les développement de Taylor en au lieu de , Après sommation sur les subdivisions, on obtient que :
On observe que cette majoration a la bonne puissance de sur les exemples déja traités, mais pas forcément le meilleur coefficient possible, parce que nous avons traité le cas général d’une méthode d’ordre , et utilisé une majoration pas toujours optimale du reste. Pour obtenir la meilleure valeur possible de la constante, il faut exprimer le reste de la formule de Taylor sous forme intégrale et utiliser la forme précise de la méthode : donc où max. En intervertissant les deux intégrales (Fubini), on obtient : D’autre part : Donc : On appelle noyau de Péano l’expression On a alors :
5.3 Simpson
Il s’agit de la méthode obtenue en approchant la fonction sur la subdivision par son polynome de Lagrange aux points . On calcule l’intégrale par exemple avec un logiciel de calcul formel, avec Xcas :
qui donne la formule sur une subdivision et sur :
Si on intègre sur en 1 subdivision par cette méthode, on obtient c’est-à-dire le résultat exact, ceci est aussi vérifié pour polynome de degré inférieur ou égal à 2 puisque l’approximation de Lagrange de est alors égale à . On en déduit que la méthode de Simpson est d’ordre 3 (pas plus car la méthode de Simpson appliquée à l’intégrale de sur n’est pas exacte). On peut améliorer la constante générale de la section précédente pour la majoration de l’erreur en : En effet sur une subdivision élémentaire , le noyau de Péano vaut : on observe que sur
et son intégrale vaut :
La méthode de Simpson nécessite évaluations de (le calcul de est un point étant presque toujours l’opération la plus couteuse en temps d’une méthode de quadrature), au lieu de pour les rectangles et le point milieu et pour les trapèzes. Mais on a une majoration en au lieu de donc le “rapport qualité-prix” de la méthode de Simpson est meilleur, on l’utilise donc plutot que les méthodes précédentes sauf si n’a pas la régularité suffisante (ou si est trop grand).
5.4 Newton-Cotes
On peut généraliser l’idée précédente, découper la subdivision en parts égales et utiliser le polynôme d’interpolation en ces points . Ce sont les méthodes de Newton-Cotes, qui sont d’ordre au moins. Comme le polynôme d’interpolation dépend linéairement des ordonnées, cette méthode est bien de la forme : De plus les sont universels (ils ne dépendent pas de la subdivision), parce qu’on peut faire le changement de variables dans l’intégrale et le polynôme d’interpolation et donc se ramener à .
Exemple : on prend le polynôme d’interpolation en 5 points équidistribués sur une subdivision (méthode de Boole). Pour calculer les , on se ramène à , puis on tape
et on lit les coefficients de f0
à f4
qui sont les à : 7/90, 32/90, 12/90,
32/90, 7/90. Voir aussi la section 5.5
La méthode est d’ordre au moins 4 par construction, mais on vérifie
qu’elle est en fait d’ordre 5 (exercice), la majoration de l’erreur
d’une méthode d’ordre 5 est
elle peut être améliorée pour cette méthode précise en
En pratique, on ne les utilise pas très souvent, car d’une part pour , les ne sont pas tous positifs, et d’autre part, parce que la constante devient trop grande. On préfère utiliser la méthode de Simpson en utilisant un pas plus petit.
Il existe aussi d’autres méthodes, par exemple les quadratures de Gauss (on choisit d’interpoler en utilisant des points non équirépartis tels que l’ordre de la méthode soit le plus grand possible, cf. infra) ou la méthode de Romberg qui est une méthode d’accélération de convergence basée sur la méthode des trapèzes (on prend la méthode des trapèzes en 1 subdivision de , puis 2, puis , ..., et on élimine les puissances de du reste en utilisant un théorème d’Euler-Mac Laurin qui montre que le développement asymptotique de l’erreur en fonction de ne contient que des puissances paires de ). De plus, on peut être amené à faire varier le pas en fonction de la plus ou moins grande régularité de la fonction.
5.5 Calcul des poids
Si la méthode d’intégration consiste à interpoler en points , alors la méthode est exacte pour tout polynôme de degré . Si on prend , on en déduit : Par exemple en interpolant en sur , on obtient
On peut aussi résoudre un système linéaire en prenant pour les polynômes de la base canonique, la matrice du système est la transposée de la matrice de Vandermonde en les et le second membre a pour -ième composante .
5.6 En résumé
Intégration sur , pas d’une subdivision, majorant
de la dérivée -ième de la fonction sur
formule | Lagrange degré | ordre | erreur | |
rectangles | (??), (??) | 0 | 0 | |
point milieu | (??) | 0 | 1 | |
trapèzes | (??) | 1 | 1 | |
Simpson | (??) | 2 | 3 |
5.7 Accélération de Richardson-Romberg
Pour montrer ce résultat, il faut établir la formule d’Euler-Mac Laurin. On commence par se placer sur une subdivision de l’intervalle , on intègre par parties en faisant apparaitre la formule des trapèzes, on intègre donc 1 en où encore Pour poursuivre, on pose , qu’on va intégrer en , où on choisit pour que l’intégrale soit nulle, donc . On pose , on a : Plus généralement, on pose ce qui définit de manière unique les . La nullité de l’intégrale montre que ce qui simplifiera l’expression des termes tout intégrés. De plus, on montre par récurrence que les ont une symétrie paire ou impaire selon la parité de par rapport à . Après intégrations par parties, on obtient : En faisant le même raisonnement sur pour et en sommant, on obtient la formule d’Euler-Mac Laurin : On pose alors (donc ) et (donc ), on obtient donc
L’accélération consiste à éliminer les puissances de en
commençant par avec des subdivisions deux fois plus fines
à chaque itération.
Ainsi n’a plus de termes en
et tend vers l’intégrale à approcher lorsque tend vers 0.
On peut d’ailleurs vérifier qu’il s’agit de la méthode de Simpson.
On élimine ensuite le terme en en posant
et ainsi
de suite. On construit un tableau triangulaire T
dont chaque
ligne contient
(avec des indices qui commencent à 0). Pour
calculer le terme d’indice 0 de la ligne courante
on fait une méthode des trapèzes sur 2 fois plus
de subdivisions que la précédente, puis pour le -ième terme
T[l,j]
on effectue (4^j*T[l-1,j-1]-T[l,j-1])/(4^j-1)
(on n’a donc besoin que de la ligne précédente pour calculer
la ligne courante).
On s’arrête par exemple lorsque la valeur absolue de la différence
entre les derniers termes de deux lignes consécutives est inférieur
à la précision souhaitée (erreur empirique).
5.8 Cas des fonctions périodiques.
Si est une fonction périodique régulière (), alors la méthode des trapèzes sur une période est d’ordre arbitrairement grand. En effet, pour une série de Fourier tronquée à l’ordre , la formule des trapèzes avec subdivisions donne le résultat exact de dès que . Il suffit ensuite d’utiliser que le reste de la série de Fourier () a des coefficients à décroissance rapide.
La méthode des trapèzes donne donc de bons résultats pour une fonction périodique, on peut d’ailleurs aussi l’appliquer pour calculer une valeur approchée des coefficients de Fourier de la fonction. La liste des valeurs approchées obtenue est alors la transformée de Fourier discrète des valeurs de la fonction aux points de la subdivision, elle se calcule donc rapidement avec la transformée de Fourier rapide. Par exemple, pour approcher , on peut utiliser les commandes suivantes en Xcas :
f(x):=exp(sin(x)); N:=16; F:=seq(f(k/N*2.*pi),k,0,N-1); G:=fft(F); k:=4; g:=G[0]+sum(G[j]*exp(i*j*x),j,1,k)+sum(G[N-j]*exp(-i*j*x),j,1,k); h:=normal(re(exp2trig(g)/N));
Ou directement 2*re(G[j]/N)
est une valeur approchée du
-ième coefficient de Fourier de , et -2*im(G[j]/N)
de , par exemple :
On observe en effet une très bonne concordance (11 décimales).
Bien entendu, cela n’est pas très utile pour approcher (il vaut mieux composer exponentielle et sinus), mais cela pourrait le devenir pour une fonction périodique plus compliquée ou pour une fonction périodique dont on ne connait qu’un échantillonage régulier (par exemple un fichier numérique audio).
5.9 Quadratures gaussiennes.
5.9.1 Description
On a vu que l’interpolation polynomiale était de meilleure qualité en prenant les points de Tchebyshev plutot que des points équidistants, il est donc naturel de calculer des approximations d’intégrale de cette manière ou encore d’optimiser le choix des abscisses pour avoir une méthode d’intégration d’ordre maximal.
Si on se fixe abscisses à , on peut obtenir l’ordre
. En effet, considérons le polynôme ,
qui est de degré , si la méthode est d’ordre alors
il sera orthogonal à tous les polynômes de degré inférieur
strict à pour le produit scalaire
puisque sera combinaison linéaire des
en (car la formule d’intégration est exacte puisque le degré
du polynôme est au plus ). Donc est à une constante
multiplicative près le -ième polynôme orthogonal pour
l’integrale sur , si c’est legendre(n)
.
Réciproquement, si les sont les racines de ce polynôme,
alors la formule d’intégration est exacte, on effectue la division
euclidienne du polynôme de degré au plus à
intégrer par
On a par orthogonalité et la combinaison
linéaire correspondante en les est nulle, et on a exactiture
pour , car de degré au plus .
Exemple :
5.9.2 Calcul des poids
On peut calculer les poids en appliquant la section 5.5. On peut ainsi montrer que les poids sont positifs en appliquant la formule d’intégration au polynôme (la formule est exacte à cause du degré du polynome). On peut d’ailleurs montrer que le poids en une racine du polynôme de Legendre sur est donné par :
Preuve de la dernière formule :
On a la valeur de en est par définition de la limite lorsque tend vers (rappelons que ). Par exactitude de la formule d’intégration la dernière égalité résulte du fait que est un polynôme de degré au plus donc orthogonal à . Donc Or est un polynôme de degré , si on fait son quotient par on obtient une constante qui vaut en utilisant la relation de récurrence à 2 crans . Le reste est de degré donc orthogonal à , d’où On conclut en utilisant la valeur de et de .
5.9.3 Erreur d’une quadrature gaussienne
On considère une quadrature gaussienne d’ordre obtenue par interpolation aux racines du -ième polynome de Legendre sur .
Rappelons que le polynôme d’interpolation de aux points s’écrit Si on ajoute on obtient un polynôme d’interpolation de degré qui coincide avec en donc Le même calcul fait avec un point en plus donne On a donc montré la formule : mais en fait on va ajouter plus qu’un point, on va en ajouter puis on intègre sur , on obtient à gauche l’erreur et à droite, seul le dernier terme est non nul, car le polynôme de Legendre proportionnel à , de degré , est orthogonal à tous les polynôme de degré D’autre part, le résultat sur l’erreur d’interpolation ?? donne en particulier D’où la majoration Il suffit ensuite de faire tendre les vers pour enlever la valeur absolue et obtenir où est proportionnel au -ième polynôme de Legendre de coefficient dominant 1.
Par exemple, pour , on a 2 points d’interpolation en les racines de et l’erreur d’interpolation est majorée par .
5.10 Méthode adaptative.
On calcule une valeur approchée de l’intégrale sur par deux quadratures gaussiennes emboitées, on estime l’erreur, si elle est supérieure à la tolérance on divise en 2. On recommence en subdivisant en 2 l’intervalle où l’erreur est maximale. On s’arrête lorsque l’erreur estimée est inférieure à la tolérance.
L’estimation de l’erreur se fait par exemple avec deux quadratures gaussiennes emboitées (c’est-à-dire que les points d’interpolation de la moins fine sont contenues dans les points d’interpolation de la plus fine, pour éviter de devoir calculer la fonction en de nouveaux points, on considére alors l’erreur sur la quadrature la moins fine comme la valeur absolue de la différence des deux valeurs). Ou avec trois quadratures emboitées, Hairer propose de prendre comme quadrature la plus fine en (15 points), intermédiaire en (avec les mêmes points sauf le point central), moins fine en (avec les points 1, 3, 5, 9, 11, 13), et d’estimer l’erreur par On observe en effet que est en , comme l’ordre de la méthode.
5.11 Accélération de Richardson-Romberg
Pour montrer ce résultat, il faut établir la formule d’Euler-Mac Laurin. On commence par se placer sur une subdivision de l’intervalle , on intègre par parties en faisant apparaitre la formule des trapèzes, on intègre donc 1 en où encore Pour poursuivre, on pose , qu’on va intégrer en , où on choisit pour que l’intégrale soit nulle, donc . On pose , on a : Plus généralement, on pose ce qui définit de manière unique les . La nullité de l’intégrale montre que ce qui simplifiera l’expression des termes tout intégrés. De plus, on montre par récurrence que les ont une symétrie paire ou impaire selon la parité de par rapport à . Après intégrations par parties, on obtient : En faisant le même raisonnement sur pour et en sommant, on obtient la formule d’Euler-Mac Laurin : On pose alors (donc ) et (donc ), on obtient donc
L’accélération consiste à éliminer les puissances de en
commençant par avec des subdivisions deux fois plus fines
à chaque itération.
Ainsi n’a plus de termes en
et tend vers l’intégrale à approcher lorsque tend vers 0.
On peut d’ailleurs vérifier qu’il s’agit de la méthode de Simpson.
On élimine ensuite le terme en en posant
et ainsi
de suite. On construit un tableau triangulaire T
dont chaque
ligne contient
(avec des indices qui commencent à 0). Pour
calculer le terme d’indice 0 de la ligne courante
on fait une méthode des trapèzes sur 2 fois plus
de subdivisions que la précédente, puis pour le -ième terme
T[l,j]
on effectue (4^j*T[l-1,j-1]-T[l,j-1])/(4^j-1)
(on n’a donc besoin que de la ligne précédente pour calculer
la ligne courante).
On s’arrête par exemple lorsque la valeur absolue de la différence
entre les derniers termes de deux lignes consécutives est inférieur
à la précision souhaitée (erreur empirique).
5.12 Méthodes probabilistes.
Pour déterminer , on l’interprète comme
une espérance, plus précisément comme
où est une variable aléatoire
qui suit la loi uniforme sur , et on approche cette valeur
par
où est obtenu par un générateur pseudo-aléatoire
(selon la loi uniforme).
Par exemple
La convergence en fonction de est assez lente, on peut l’observer en faisant plusieurs estimations :
En effet, les tirages sont équidistribués selon la même loi,
la loi des grands nombres s’applique donc : on fait fois
une moyenne de
tirages, si est grand, on converge vers une loi normale
dont l’écart-type est en .
La valeur de la constante
peut se calculer à partir de
par exemple ici
mais on ne fait pas ce calcul en pratique (puisqu’il faudrait calculer une intégrale), on estime l’écart-type de la loi normale par l’écart-type de l’échantillon des estimations
stddevp(I)
.On peut donc obtenir rapidement une estimation de en prenant
l’écart-type d’une séquence de valeurs de
Cette méthode converge donc beaucoup moins vite que les quadratures, en dimension 1. Mais elle se généralise très facilement en dimension plus grande en conservant la même vitesse de convergence alors que le travail nécessaire pour une méthode de quadrature croit comme une puissance de la dimension, et ne nécessite pas de paramétrer des domaines d’intégration compliqués (il suffit par exemple d’utiliser la méthode du rejet pour avoir un générateur uniforme dans un domaine inclus dans un cube).
6 Suites itératives et applications
Résumé:
Théorème du point fixe, méthode de Newton,convexité.
Exemple: calcul de valeur approchée de racines carrées,
Résolution d’équations.
6.1 Le point fixe dans
Soit une fonction continue sur un intervalle de , et à valeurs dans (attention à bien choisir pour que l’image de par reste dans ). On s’intéresse à la suite Supposons que converge vers une limite lorsque , alors la limite doit vérifier puisque est continue. On dit que est un point fixe de . Ceci amène à l’idée d’utiliser ces suites pour résoudre numériquement l’équation . Nous allons donner un théorème permettant d’assurer que la suite (??) converge, et que la limite est l’unique solution de sur .
En pratique, les fonctions que l’on considèrera seront continument dérivables, donc d’après le théorème des accroissements finis ainsi pour vérifier que est contractante, on étudie la valeur absolue de sur , il suffit de montrer que cette valeur absolue est strictement inférieure à un réel pour conclure (il faut donc chercher le maximum de sur . Attention, il s’agit du maximum de et pas du maximum de , ce qui revient à chercher le maximum de et de ).
On a alors le
si est contractante de dans de rapport alors la suite (??) converge vers l’unique solution de dans . On a de plus les encadrements :
Démonstration : Tout d’abord si est contractante, on montre à partir de la définition de la continuité que est continue. Soit , alors est continue, positive en et négative en , il existe donc tel que (théorème des valeurs intermédiaires). Soit une suite définie par (??). On a alors pour tout Donc par une récurrence évidente : ce qui entraine d’ailleurs que . Comme , la suite géométrique converge vers 0 lorsque tend vers l’infini, donc tend vers . Notons que est unique car si est une autre solution alors donc , or et donc doit être nul. Passons à la preuve de la majoration (??) qui est importante en pratique car elle donne un test d’arrêt de calcul des termes de la suite récurrente, on écrit pour : puis on majore avec l’inégalité triangulaire puis on applique le fait que est contractante de rapport soit On fait alors tendre vers l’infini d’où le résultat.
Exemples : Cherchons une valeur approchée de par cette méthode. Il faut d’abord trouver une fonction dont est un point fixe, par exemple On vérifie que , puis que donc décroit. On va voir si les hypothèses du théorème du point fixe s’appliquent sur par exemple . Comme est décroissante qui est bien inclus dans . De plus est comprise entre et donc , est contractante de rapport . On peut donc itérer la suite à partir par exemple de et on va converger vers (en s’en rapprochant à chaque cran d’un rapport inférieur à ).
Considérons l’équation en c’est l’équation du temps utilisée en astronomie pour trouver la position d’une planète sur son orbite elliptique ( étant l’excentricité de l’ellipse). Il n’y a pas de formule exacte permettant de calculer en fonction de . Si on a une valeur numérique pour , on peut trouver une valeur numérique approchée de par la méthode du point fixe, en réécrivant l’équation sous la forme On observe que envoie dans donc on peut prendre , de plus , est contractante de rapport , le théorème s’applique, il suffit de prendre une valeur initiale dans et d’itérer la suite jusqu’à obtenir la précision désirée. Par exemple si on veut une valeur approchée de à près, il suffira que la différence entre deux termes successifs de la suite vérifie on aura alors bien :
Cette méthode n’est pas toujours optimale, car la vitesse de convergence vers la limite est dite “linéaire”, c’est-à-dire que le temps de calcul pour avoir décimales est proportionnel à (ou encore il faut effectuer un nombre d’itérations proportionnel à , chaque itération faisant gagner en précision de l’ordre du rapport de contractance). En effet, supposons que est continue en et que . Il existe alors un intervalle tel que Le théorème des accroissements finis donne alors Si , alors donc et , par récurrence on a pour tout , on a donc par récurrence Donc pour avoir il suffit que et il faut que
Si est suffisamment régulière, il existe une méthode plus rapide lorsqu’on est proche de la racine ou lorsque la fonction a des propriétés de convexité, c’est la méthode de Newton. Et même si Newton n’est pas applicable, une simple dichotomie peut être plus efficace si la constante de contractance est supérieure à (y compris prés de la solution de ). Toutefois la méthode du point fixe reste intéressante si la constante de contractance est suffisamment petite (par exemple garantit 15 décimales en 15 itérations) et présente l’avantage de se généraliser en dimension plus grande, cf. la section suivante.
6.2 Le point fixe dans
Le théorème précédent se généralise.
La démonstration de la convergence est un peu différente de celle donnée en dimension 1, on montre que est une suite de Cauchy, car pour donc est convergente puisque nous sommes dans un fermé d’un espace complet. (Cela permet d’ailleurs de généraliser l’énoncé donné en dimension 1 au cas où ou est infini)
La vitesse de convergence est linéaire, la démonstration est identique à celle de la dimension 1.
Remarque :
- L’existence d’un point fixe sans hypothèse de contractance se généralise si est un convexe compact préservé par (théorème de Brouwer ou de Schauder).
- Pour vérifier les hypothèses du théorème dans , il suffit de montrer que dans la norme triple de subordonnée à la norme choisie dans est inférieure à . Pour linéaire, cela revient à calculer une norme subordonnée de matrice, et donne lieu à des méthodes itératives alternatives à l’inversion de matrice, cf. la section 3.6.2.
- l’algorithme de recherche PageRank de google utilise le point fixe, en très grande dimension : est le nombre de pages Web, est l’ensemble des vecteurs de dont toutes les coordonnées sont positives ou nulles et dont la somme des coordonnées vaut 1, est la somme d’un vecteur constant et du produit du vecteur par une matrice transposée d’une matrice stochastique.
6.3 La méthode de Newton dans .
La méthode de Newton est une méthode de résolution de l’équation , attention à la différence avec le théorème du point fixe qui permet de résoudre numériquement . Si est proche de la racine on peut faire un développement de Taylor à l’ordre 1 de la fonction en : Pour trouver une valeur approchée de , on ne garde que la partie linéaire du développement, on résout : donc (si ) : Graphiquement, cela revient à tracer la tangente à la courbe représentative de et à chercher où elle coupe l’axe des . On considère donc la suite récurrente définie par une valeur proche de la racine et par la relation :
Il y a deux théorèmes importants, l’un d’eux prouve que si est “assez proche” de alors la suite converge vers , malheureusement il est difficile de savoir en pratique si on est “assez proche” de pour que ce théorème s’applique. Le second théorème donne un critère pratique facile à vérifier qui assure la convergence, il utilise les propriétés de convexité de la fonction.
Si on a et sur un intervalle contenu dans , alors on peut prendre tout réel tel que et .
Démonstration : on a En appliquant un développement de Taylor de en à l’ordre 2, on obtient pour un réel situé entre et : donc : d’où : On commence par choisir un intervalle contenant strictement et tel que et sur (c’est toujours possible car et sont continues au voisinage de puisque ). Si est dans cet intervalle, alors aussi donc On a , on diminue si nécessaire pour avoir , on a alors : donc d’une part est encore dans l’intervalle ce qui permettra de refaire le même raisonnement au rang suivant, et d’autre part on a une convergence au moins géométrique vers . En fait la convergence est bien meilleure lorsqu’on est proche de grace au carré dans , plus précisément, on montre par récurrence que il faut donc un nombre d’itérations proportionnel à pour atteindre une précision donnée.
Remarque : ce théorème se généralise sur et même sur (cf. la section suivante).
Exemple : pour calculer , on écrit l’équation qui a comme racine simple sur , on obtient la suite récurrente Si on prend , on a et donc on peut prendre et car sur . On a , on peut donc prendre , la suite convergera pour tout .
Plus généralement, on peut calculer une racine -ième d’un réel en résolvant par la méthode de Newton.
L’inconvénient de ce théorème est qu’il est difficile de savoir si la valeur de départ qu’on a choisie se trouve suffisamment près d’une racine pour que la suite converge. Pour illustrer le phénomène, on peut par exemple colorer les points du plan complexe en couleurs selon que la suite définie par la méthode de Newton converge vers l’une des racines d’un polynôme de degré fixé au bout de par exemple 50 itérations (la -ième couleur servant aux origines de suite qui ne semblent pas converger).
Passons maintenant à un critère très utile en pratique :
Une fonction continument dérivable sur un intervalle de est dite convexe si son graphe est au-dessus de la tangente en tout point de .
Il existe un critère simple permettant de savoir si une fonction de classe est convexe :
Démonstration :
L’équation de la tangente au graphe en est
Soit
on a :
donc est croissante, comme , est négative
pour et positive pour , donc est décroissante
pour et croissante pour . On conclut alors que
puisque . Donc est bien au-dessus
de sa tangente.
On arrive au deuxième théorème sur la méthode de Newton
Démonstration :
On a donc si alors
sur , est donc strictement croissante sur
on en déduit que sur donc .
Comme la courbe représentative de est au-dessus de la tangente,
on a (car est l’abscisse du point
d’intersection de la tangente avec l’axe des ).
La suite est donc décroissante minorée par , donc convergente
vers une limite . À la limite, on a
donc car sur .
Comme est décroissante, on a bien , pour montrer l’autre inégalité, on applique le théorème des accroissements finis, il existe tel que comme , on a et la deuxième inégalité du théorème en découle parce que est croissante.
Variantes :
Il existe des variantes, par exemple si et
sur . Si , on considère .
Application :
On peut calculer la valeur approchée de la
racine -ième d’un réel en appliquant ce deuxième
théorème. En effet si
, alors est 2 fois continument dérivable et
de dérivée première et
seconde strictement positives sur (car ).
Il suffit donc de prendre une valeur de départ plus grande que
la racine -ième, par exemple (en effet
).
En appliquant l’inégalité du théorème, on a :
Pour avoir une valeur approchée de à près,
on peut donc choisir comme test d’arrêt
Par exemple pour , le test d’arrêt serait
.
6.4 La méthode de Newton dans .
Le premier énoncé du cas de la dimension 1 se généralise en :
Si on a et sur une boule centré en de rayon contenue dans , alors on peut prendre tout réel tel que et .
La démonstration est calquée sur la dimension 1, mais il faut prendre le reste intégral dans la formule de Taylor puis on applique Taylor le long du segment : donc : et on en déduit (??) et on conclut de même en remplaçant intervalle centré en de rayon par boule de rayon .
Remarque : la convergence “numérique” (au sens du calcul en flottant) de la suite ne suffit pas à montrer l’existence d’une racine proche de . Une méthode de preuve alternative au calcul des constantes et consiste à trouver un rectangle ou une boule autour de préservée par l’application .
6.5 Calcul approché des racines complexes simples
La section précédente nous a montré qu’on pouvait se ramener à la recherche de racines simples, ce qui donne envie d’essayer la méthode de Newton. On a malheureusement rarement la possibilité de pouvoir démontrer qu’à partir d’une valeur initiale donnée, la méthode de Newton converge, parce que les racines peuvent être complexes, et même si elles sont réelles, on n’a pas forcément de résultat sur la convexité du polynôme (cf. cependant une application des suites de Sturm qui permet de connaitre le signe de sur un intervalle sans le factoriser).
On effectue donc souvent des itérations de Newton, en partant de 0.0, en espérant s’approcher suffisamment d’une racine pour que le théorème de convergence théorique s’applique. On se fixe un nombre maximal d’itérations, si on le dépasse on prend alors une valeur initiale aléatoire complexe et on recommence.
Une fois une racine déterminée, on l’élimine en calculant le quotient euclidien de par (par l’algorithme de Horner), puis on calcule les racines du quotient (qui sont des racines de ).
Un problème pratique apparait alors, c’est que n’est pas exact donc le quotient non plus, au fur et à mesure du calcul des racines de , on perd de plus en plus de précision. Il existe une amélioration simple, si est une racine approchée de , alors elle est racine approchée de et on a toutes les chances qu’elle soit suffisamment proche d’une racine de pour que le théorème s’applique, on effectue alors 1 ou 2 itérations de Newton avec mais pour (et non ) afin d’améliorer sa précision comme racine de .
Une méthode de calcul plus stable utilise la recherche des valeurs
propres de la matrice companion en double précision,
puis affine par la méthode de
Newton pour obtenir des valeurs approchées multi-précision,
c’est ce que fait proot
, par exemple proot(x^3+x+1,50)
.
Enfin, on peut appliquer directement la méthode de Newton pour trouver dans toutes les racines simultanément, c’est la méthode de Durand-Kerner, Weierstrass. On pose , il s’agit de résoudre en . On a a l’ordre 1 en pour trouver , on pose , on obtient donc On peut aussi calculer le produit du dénominateur en effectuant (la dérivée porte sur ). On retrouve la méthode de Newton à une variable où la dérivée du polynôme au dénominateur est remplacée par la valeur approchée du polynôme. D’où le programme
dw(P,N,eps):={ // Weierstrass, Durand-Kerner polynomial rooter local l,v,w,n,j,k,q,q1; P:=P/lcoeff(P); n:=degree(P); assume(l,symbol); v:=seq(exp(i*l/n*2.0*pi),l,0,n-1); w:=v; for k from 1 to N do q:=pcoeff(v); q1:=q'; for j from 0 to n-1 do w[j]:=v[j]-horner(P,v[j])/horner(q1,v[j]); od; if (l2norm(w-v)<eps*l2norm(v)) return w; v:=w; od; retourne "max iter reached"; }:;
Par exemple dw(x^3+x+1,100,1e-10)
renvoie des valeurs
approchées des racines de .
Si on s’intéresse seulement à la racine de module maximal d’un polynôme, on peut en trouver une estimation assez simplement en appliquant la méthode de la puissance à la matrice companion du polynôme. On peut améliorer la précision d’une racine par des itérations inverses ou par la méthode de Newton en une variable.
7 Réduction approchée des endomorphismes
On pourrait trouver des valeurs propres approchées d’une matrice en calculant le polynome caractéristique ou minimal puis en le factorisant numériquement. Mais cette méthode n’est pas idéale relativement aux erreurs d’arrondis (calcul du polynome caractéristiaue, de ses racines, et nouvelle approximation en calculant le noyau de ), lorsqu’on veut calculer quelques valeurs propres on préfère utiliser des méthodes itératives directement sur ce qui évite la propagation des erreurs d’arrondi.
7.1 Méthode de la puissance
Elle permet de déterminer la plus grande valeur propre en valeur absolue d’une matrice diagonalisable lorsque celle-ci est unique. Supposons en effet que les valeurs propres de soient avec et soient une base de vecteurs propres correspondants. On choisit un vecteur aléatoire et on calcule la suite . Si a pour coordonnées dans la base propre, alors L’hypothèse que est l’unique valeur propre de module maximal entraine alors que puisque la suite géométrique de raison converge vers 0. Autrement dit, si (ce qui a une probabilité 1 d’être vrai pour un vecteur aléatoire), est équivalent à . Lorsque est grand, est presque colinéaire au vecteur propre (que l’on peut estimer par divisé par sa norme), ce que l’on détecte en testant si et sont presques colinéaires. De plus le facteur de colinéarité entre et est presque , la valeur propre de module maximal.
Exercice : tester la convergence de vers l’espace propre
associé à pour la matrice [[1,-1],[2,4]]
et le vecteur . Attention à ne pas calculer pour
déterminer , utiliser la relation de récurrence!
Si on n’observe pas de convergence ou si elle est trop lente, alors est proche de ou égal, il est judicieux de faire subir à la matrice un shift, on remplace par . On peut prendre aléatoirement, ou bien mieux faire des itérations inverses sur si est une estimation d’une valeur propre (voir les itérations inverses ci-dessous).
Lorsqu’on applique cette méthode a une matrice réelle, il peut arriver quíl y ait deux valeurs propres conjuguées de module maximal. On peut appliquer la méthode ci-dessus avec un shift complexe non réel, mais on doit alors travailler en arithmétique complexe ce qui est plus couteux. Le même type de raisonnement que ci-dessus montre que pour grand, est presque colinéaire à l’espace engendré par et , la recherche d’une relation permet alors de calculer les valeurs propres qui sont les deux racines de .
La convergence est de type série géométrique, on gagne le même nombre de décimales à chaque itération.
Applications :
- la méthode de la puissance peut donner une estimation du nombre de condition d’une matrice . On calcule puis on effectue cette méthode sur pour avoir une estimation de la plus grande valeur propre, puis “sur ” par itérations inverses et on fait le rapport des racines carrées. C’est une méthode intéressante si la matrice est creuse et symétrique (pour pouvoir faire Cholesky creux pour les itérations inverses).
- la méthode de la puissance peut donner une estimation
rapide de la taille de la plus grande racine d’un polynôme (en
module), en itérant sur la matrice companion du polynôme,
matrice qui contient beaucoup de 0, donc le produit avec un vecteur
se fait en temps , où est le degré du polynôme.
f(P,eps,N):={ local k,l,n,v,old,new,oldratio,tmp; l:=coeffs(P); n:=degree(P); l:=revlist(l[1..n]/l[0]); v:=randvector(n,uniform,-1,1); oldratio:=-1; for k from 1 to N do old:=maxnorm(v); tmp := -l[0]*v[n-1]; for j from 1 to n-1 do v[j] =< v[j-1]-l[j]*v[n-1]; od; v[0] =< tmp; new:=maxnorm(v); if (abs(new/old-oldratio)<eps) return new/old; oldratio:=new/old; od; retourne undef; }:;
Ceci peut par exemple servir à déterminer pour un polynôme donné
squarefree (de degré et coefficient dominant )
l’écart minimal entre 2 racines, on calcule
R:=normal(resultant(P,subst(P,x=x+y),x)/x^degree(P))
c’est un polynôme bicarré dont on cherche la plus petite racine
en calculant le carré de la plus grande racine en module
de numer(subst(R,y=1/sqrt(x)))
.
On peut obtenir un minorant à priori de cette plus petit racine en calculant on isole l’écart minimal au carré, on majore les autres carrés en majorant les racines, et on peut minorer le résultant à priori par 1 si est à coefficients entiers.
7.2 Itérations inverses
La méthode précédente permet de calculer la valeur propre de module maximal d’une matrice. Pour trouver une valeur propre proche d’une quantité donnée , on peut appliquer la méthode précédente à la matrice (en pratique on effectue sur et on résoud ). En effet, les valeurs propres de cette matrice sont les dont la norme est maximale lorsqu’on se rapproche de . Attention à ne pas prendre trop proche d’une valeur propre, car le calcul de est alors peu précis (la matrice étant mal conditionnée).
7.3 Elimination des valeurs propres trouvées
Si la matrice est symétrique, et si est un vecteur propre normé écrit en colonne, on peut considérer la matrice qui possède les mêmes valeurs propres et mêmes vecteurs propres que avec même multiplicité, sauf qui est remplacé par 0. En effet les espaces propres de sont orthogonaux entre eux, donc On peut donc calculer la 2ème valeur propre (en valeur absolue), l’éliminer et ainsi de suite.
Si la matrice n’est pas symétrique, il faut considérer où est vecteur propre de associé à . En effet si car et donc (sinon est dans l’orthogonal de Vect.
7.4 Décomposition de Schur
Il s’agit d’une factorisation de matrice sous la forme où est unitaire et diagonale supérieure. Existence (théorique) : on prend une valeur propre et un vecteur propre correspondant, puis on projette sur l’orthogonal de ce vecteur propre et on s’y restreint, on prend à nouveau une valeur propre et un vecteur propre correspondant, etc.
On peut approcher cette factorisation par un algorithme itératif
qui utilise la factorisation d’une matrice quelconque comme
produit d’une matrice unitaire par une matrice triangulaire supérieure
à coefficients positifs sur la diagonale. On fait l’hypothèse que les
valeurs propres de sur la diagonale sont classées par ordre de module
strictement décroissant
(développement inspiré par Peter J. Olver dans le cas symétrique
http://www.math.umn.edu/~olver/aims_/qr.pdf
). On peut toujours
s’y ramener quitte à remplacer par .
Posons , et par récurrence (avec unitaire et
triangulaire supérieure à coefficients diagonaux positifs),
. On a alors
D’autre part donc . Soit la forme diagonale
de et la matrice de passage , où est triangulaire supérieure
et où on choisit la normalisation des coefficients sur la diagonale de valant 1.
On a donc
Ensuite, on suppose
qu’on peut factoriser sans permutations, donc
qu’on ne rencontre pas de pivot nul, et quitte à multiplier
les vecteurs unitaires de par une constante complexe de module 1
on peut supposer que les pivots sont positifs donc que a
des coefficients positifs sur la diagonale, on a alors
puis en multipliant par
où est triangulaire supérieure à coefficients positifs
sur la diagonale et est unitaire. On regarde ensuite les entrées
de la matrice , sous la diagonale elles convergent (géométriquement) vers 0,
donc tend vers une matrice triangulaire supérieure
dont les coefficients diagonaux valent . On montre que cela
entraine que est équivalent à
Donc, tend à devenir diagonale, et triangulaire supérieure. De plus
la matrice est donc semblable à .
En pratique, on n’impose pas la positivité des coefficients diagonaux de dans la factorisation , ce qui ne change évidemment pas le fait que s’approche d’une matrice diagonale et d’une matrice triangulaire supérieure (avec convergence à vitesse géométrique). On commence aussi par mettre la matrice sous forme de Hessenberg (par conjugaison par des matrices de Householder), c’est-à-dire presque triangulaire supérieure (on autorise des coefficients non nuls dans la partie inférieure seulement sur la sous-diagonale, si ). Cela réduit considérablement le temps de calcul de la décomposition , le produit ayant encore cette propriété, une itération se fait en temps au lieu de . Le calcul de à partir de est d’ailleurs fait directement, on parle d’itération implicite.
On utilise aussi des “shifts” pour accélerer la convergence, c’est-à-dire qu’au lieu de faire et sur la matrice on le fait sur où est choisi pour accélerer la convergence vers 0 du coefficient d’indice ligne colonne (idéalement il faut prendre proche de la valeur propre de module minimal, afin de minimiser ). En effet, si et alors : On peut aussi éliminer la dernière ligne et la dernière colonne de la matrice pour accélerer les calculs dès que le coefficient en ligne colonne est suffisamment petit.
On remarque que pour une matrice réelle si on choisit des shifts conjugués, alors est réel. Or si et si est inversible On a donc une matrice symétrique (car ) et triangulaire supérieure. On en déduit que est diagonale, donc . On peut donc rendre réelle en divisant chaque colonne par un , et rendre réelle en conjuguant par la matrice . Mais ce procédé de retour au réel après élimination de 2 valeurs propres complexes conjuguées d’une matrice réelle se heurte à un problème de conditionnement parce que le choix d’un shift intéressant pour la convergence va rendre la matrice proche d’une matrice non inversible (les deux derniers coefficients diagonaux de sont proches de 0). On a alors seulement Si on décompose , , par blocs , , et , on a Donc on a . Comme est unitaire, est symétrique, donc est diagonale puisque symétrique et triangulaire supérieure. On peut donc ramener et en des matrices réelles. L’algorihtme des itérations implicites traite de manière efficace le cas des couples de valeurs propres complexes conjuguées ou plus généralement de clusters de valeurs propres, c’est l’algorithme de Francis (aussi appelé bulge chasing en anglais, qu’on pourrait traduire par “à la poursuite du bourrelet”, cela vient de la forme que prend la matrice après application d’un shift, elle a des entrées non nulles en première colonne plus bas que la sous-diagonale qui forment un bourrelet non nul, l’annulation de ces entrées par des transformations de Householder déplace le bourrelet sur la colonne suivante).
Revenons à la localisation des valeurs propres (une autre approche consiste à rechercher un rectangle du plan complexe stable par itérée de la méthode de Newton). On suppose qu’on a maintenant une matrice unitaire et une matrice triangulaire supérieure (aux erreurs d’arrondi près) telles que Que peut-on en déduire ? On va d’abord arrondir en une matrice exacte à coefficients rationnels, dont les dénominateurs sont une puissance de 2 (en fait c’est exactement ce que donne l’écriture d’un flottant en base 2, une fois ramené tous les exposants à la même valeur). On a donc une matrice presque unitaire exacte et telle que est semblable à , et presque triangulaire supérieure. (comme est presque unitaire, sa norme et la norme de son inverse sont proches de 1 donc est proche de , les coefficients de sont de la même taille que les coefficients de : le changement de base est bien conditionné et c’est la raison pour laquelle on a choisi d’effectuer des transformations unitaires).
Notons les coefficients diagonaux de , soit un majorant de la norme des coefficients sous-diagonaux de , et soit un minorant de l’écart entre 2 distincts. On a donc où est triangulaire supérieure, est triangulaire inférieure avec des 0 sous la diagonale et des coefficients de module majorés par . Si est suffisamment petit devant , on va montrer qu’on peut localiser les valeurs propres de (qui sont celles de ) au moyen des .
En effet, fixons et soit un cercle de centre et de rayon . Si est une matrice diagonalisable, on sait que En prenant , et en écrivant on développe le second terme si la norme de est strictement inférieure à 1 puis on calcule la trace avec Au final, le nombre de valeurs propres dans est donné par Il suffit donc que le max soit plus petit que 1 pour avoir l’existence d’une valeur propre et une seule de dans le cercle (à distance au plus de ). Ce sera le cas si on choisit donc pour réaliser l’égalité ci-dessus, sous réserve que ne soit pas trop petit, rappelons que doit être plus petit ou égal à . Si est petit, il peut être nécessaire d’utiliser une précision plus grande pour les calculs de la décomposition de Schur en arithmétique flottante.
Typiquement, on peut espérer (pour un écart pas trop petit) pouvoir localiser les racines d’un polynôme de degré par cette méthode avec précision bits en opérations pour le calcul de la décomposition de Schur en flottant ( pour Hessenberg initial puis par itération et un nombre d’itérations proportionnel à ). Pour le calcul exact de , il faut inverser une matrice de taille avec des coefficients de taille proportionnelle à donc opérations (en modulaire, la taille des coefficients de l’inverse est ) puis calculer un produit avec une matrice de coefficients de taille proportionnelle à , soit opérations. Asymptotiquement, on peut faire mieux avec des méthodes de multiplication et d’opérations matricielles par blocs. Pour éviter la perte d’un facteur , on peut aussi ne pas faire de calculs en mode exact et controler les erreurs sur la matrice . On peut regrouper les valeurs propres par “clusters” si elles sont trop proches à la précision de bits. Pour la recherche des racines d’un polynôme , on peut montrer, en calculant le résultant de et de qui est en module plus grand ou égal à 1, et en l’écrivant comme produit des carrés de différences des racines, et en majorant toutes les différences de racine sauf une à l’aide de la norme infinie de , qu’il faut au pire bits pour séparer les racines).
8 Equations différentielles (résolution numérique)
8.1 Méthodes à un pas
On considère l’équation différentielle où est la fonction inconnue cherchée et où est une fonction régulière de et (par exemple sur un domaine pour avoir existence et non recoupement des courbes intégrales dans ce domaine). On cherche à approcher numériquement pour . On présente ici des méthodes de résolution numérique à un pas, dont le principe consiste à discrétiser l’intervalle en des subdivisions en temps de petite taille . Si est une valeur approchée de la méthode à un pas se traduit par une relation de récurrence entre et qui reflète une méthode d’intégration approchée de Par exemple, la méthode d’Euler explicite utilise la méthode des rectangles à gauche où (pour une méthode à pas variable, le pas peut dépendre de ) alors que la méthode d’Euler implicite utilise la méthode des rectangles à droite cette dernière relation nécéssite de résoudre une équation pour déterminer d’où son nom de méthode implicite. Plus généralement, la méthode de résolution revient à se donner une fonction et à poser : pour la méthode d’Euler explicite, , pour la méthode d’Euler implicite, s’obtient en résolvant une équation (par exemple avec la méthode du point fixe, pour suffisamment petit).
Lorsqu’on compare la solution de l’équation et une valeur approchée obtenue par une méthode à un pas, il faut distinguer
- l’erreur locale (ou erreur de consistance) de la méthode qui est une majoration de en fonction du pas , on dit qu’une méthode est d’ordre au moins si (cette notion est reliée à l’ordre de la méthode numérique d’intégration approchée utilisée).
- l’erreur globale de la méthode, qui accumule deux phénomènes, l’erreur locale à chaque pas et l’erreur sur la condition initiale pour les subdivisions conséquence des erreurs précédentes (en pratique il faudrait aussi ajouter les erreurs d’arrondis et l’erreur éventuelle sur la condition initiale). Pour majorer cette erreur, il est nécessaire de supposer que la fonction est lipschitzienne par rapport à la variable , l’erreur globale fera alors intervenir un terme en multiplié par l’erreur locale (accumulation exponentielle des erreurs au cours du temps).
Plus précisément, on a le résultat suivant :
Par exemple, pour Euler explicite, , la constante est la constante de Lipschitz de , et on prendra pour un majorant de dans un voisinage de la solution pour .
Pour prouver ce résultat, il faut déterminer comment se propagent les erreurs locales introduites à chaque pas. Par exemple, on a une erreur locale au pas 1 donc une condition initiale modifiée pour le pas 2 au lieu de . Cette erreur se propage au pas 2 en une erreur De même aux pas suivants, donc au pas l’erreur locale au pas 1 s’est propagée en une erreur inférieure ou égale à Il faut ensuite sommer les erreurs locales propagées de chaque pas Comme est positive décroissante sur , on peut majorer la somme par l’intégrale d’où le résultat.
(Voir aussi Demailly ou Hairer)
8.2 Méthodes de Runge-Kutta (explicites)
Ce sont des méthodes explicites qui utilisent une méthode de Newton-Cotes pour approcher sur . Pour simplifier les notations, notons , on a alors Pour estimer la valeur de , il est nécessaire d’approcher ce qui se fait par une méthode de Newton-Cotes, en utilisant les estimations des valeurs des . On a donc des méthodes de Newton-Cotes avec un sous-ensemble croissant de points d’interpolation, donc pour chaque valeur de une suite de coefficients correspondant à la méthode de Newton-Cotes utilisée. Il faut aussi indiquer la valeur de en donnant un coefficient tel que
En pratique on stocke un tableau dont les lignes donnent et les , et le calcul de se fait ligne par ligne . Par exemple pour la méthode d’Euler explicite, il y a deux lignes contenant 0 et un seul coefficient : . Pour la méthode du point milieu, il y a trois lignes, la deuxière ligne exprime comment on estime , la troisième : on a donc
La suite des temps est croissante, mais pas forcément de manière stricte, on peut avoir , la valeur de n’étant pas estimée par la même méthode de Newton-Cotes que . La valeur des coefficients est ensuite déterminée pour obtenir un ordre le plus grand possible pour l’erreur locale (ce qui peut nécessiter la résolution de systèmes avec pas mal d’inconnues).
Ainsi, la méthode RK4 utilise le tableau suivant Ce qui se traduit par Les méthodes de Newton-Cotes utilisées sont les rectangles à gauche puis à droite pour estimer le point milieu, et la méthode de Simpson (en prenant la moyenne des deux estimations pour le point milieu). On peut montrer qu’elle est d’ordre 4 (erreur locale en )
Les méthodes de résolution numériques implémentées dans Xcas sont des méthodes explicites de Runge-Kutta emboitées avec pas adaptatif, (le pas adaptatif est calculé en estimant l’erreur avec 2 méthodes emboitées RK4 et Prince-Dormand, cf. Hairer).
9 Quelques références
-
Les polycopiés du cours d’Ernst Hairer,
http://www.unige.ch/%7Ehairer/polycop.html
- Analyse numérique et équations différentielles, Demailly J.-P., Presses Universitaires de Grenoble, 1996
- Introduction à l’analyse numérique matricielle et à l’optimisation, Ciarlet P.
- The Art of Computer Programming, Vol. 2: Seminumerical algorithms, Knuth D., Addison-Wesley, 1998
- Handbook of Mathematical Functions, Abramowitz and Stegun,
disponible en ligne sur
http://www.math.sfu.ca/~cbm/aands/toc.htm
- Arithmétique flottante,
Rapport de l’INRIA de V. Lefèvre et P. Zimmermann,
téléchargeable sur
http://www.inria.fr/rrrt/rr-5105.html
- Matrix computations, Golub and Loa, Hopkins University Press, 1989
Index
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A Développement de Taylor, séries entières, fonctions usuelles
Résumé: Séries entières. Calcul des fonctions transcendantes usuelles.
Soit une fonction indéfiniment dérivable sur un intervalle de et . On peut alors effectuer le développement de Taylor de en à l’ordre et se demander si converge lorsque tend vers l’infini, si la limite est égale à et si on peut facilement majorer la différence entre et . Si c’est le cas, on pourra utiliser comme valeur approchée de .
On peut parfois répondre à ces questions simultanément en regardant le développement de Taylor de avec reste : il existe compris entre et tel que C’est le cas pour la fonction exponentielle que nous allons détailler, ainsi que les fonctions sinus et cosinus.
A.1 La fonction exponentielle
Soit et , la dérivée -ième de est , donc avec compris entre 0 et , ainsi si est positif et si est négatif, . Dans les deux cas, la limite de est 0 lorsque tend vers l’infini, car pour , on a on a donc pour tout réel
Comment en déduire une valeur approchée de ? Il suffira d’arrêter la sommation lorsque si ou lorsque si est inférieur à l’erreur absolue souhaitée, le plus tôt étant le mieux pour des raisons d’efficacité et pour éviter l’accumulation d’erreurs d’arrondi. Si on veut connaitre à une erreur relative donnée (par exemple pour stocker le résultat dans un double) il suffit que , donc si est positif, il suffit que , on peut donc arrêter la sommation lorsque le terme suivant est plus petit que .
On observe que plus est grand, plus devra être grand pour réaliser le test d’arrêt, ce qui est facheux pour le temps de calcul. De plus, le résultat final peut être petit alors que les termes intermédiaires calculés dans la somme peuvent être grands, ce qui provoque une perte de précision relative, par exemple si on veut calculer ou plus généralement l’exponentielle d’un nombre négatif de grande valeur absolue.
Exercice : combien de termes faut-il calculer dans le développement de l’exponentielle de -10 pour que le reste soit plus petit que ? Quel est la valeur du plus grand terme rencontré dans la suite ? Quelle est la perte de précision relative occasionné par cette méthode de calcul ?
On peut utiliser les propriétés de la fonction exponentielle pour éviter ce problème. Pour les nombres négatifs, on peut utiliser l’équation (ne change pas l’erreur relative). Pour les grands réels, on peut utiliser (multiplie par 2 l’erreur relative). On peut aussi, si on connait une valeur approchée de , effectuer la division euclidienne de par avec reste symétrique : puis si est positif, on somme la série de , si est négatif, on calcule et on inverse, on applique alors :
Il faut toutefois noter que n’étant pas connu exactement, on commet une erreur d’arrondi absolu sur d’ordre , où est l’erreur relative sur , il faut donc ajouter une erreur d’arrondi relative de qui peut devenir grande si est grand. Puis il faut ajouter la somme des erreurs d’arrondi due au calcul de , que l’on peut minimiser en utilisant la méthode de Horner pour évaluer (car elle commence par sommer les termes de plus haut degré qui sont justement les plus petits termes de la somme). Les coprocesseurs arithmétiques qui implémentent la fonction exponentielle ont un format de représentation interne des double avec une mantisse plus grande que celle des double (par exemple 64 bits au lieu de 53), et une table contenant des constantes dont avec cette précision, le calcul de par cette méthode entraine donc seulement une erreur relative d’arrondi au plus proche sur le résultat converti en double (donc de ).
Notons que en général lui-même a déjà été arrondi ou n’est connu qu’avec une précision relative. Or si est connu avec une erreur relative de (donc une erreur absolue de , alors donc on ne peut pas espérer mieux qu’une erreur relative de sur l’exponentielle de . Si est petit cette erreur relative (impossible à éviter, quel que soit l’algorithme utilisé pour calculer l’exponentielle) est d’ordre . Si est grand alors l’erreur relative devient de l’ordre de 1, et la valeur de l’exponentielle calculée peut être très éloignée de la valeur réelle! Notons que pour les double, il y aura dans ce cas débordement soit vers l’infini soit vers 0 (par exemple si est supérieur à 709, l’exponentielle renvoie infini).
Exercice : refaire les mêmes calculs pour les fonction sinus ou cosinus. On utilise par exemple , , pour se ramener au calcul de ou de sur .
Cette méthode a toutefois ces limites, car il peut devenir impraticable de calculer la dérivée -ième d’une fonction (par exemple avec ), et encore plus de la majorer. D’où l’intérêt de développer une théorie des fonctions qui sont égales à leur développement de Taylor à l’infini d’une part, et d’avoir d’autres méthodes pour majorer le reste, nous présentons ici le cas des séries alternées.
A.2 Séries entières.
Les séries de type prendre la limite lorsque tend vers l’infini du développement de Taylor en x=0 sont de la forme On peut s’intéresser plus généralement à lorsque est un complexe quelconque, c’est ce qu’on appelle une série entière, on peut aussi les voir comme des polynômes généralisés.
S’il existe un point tel que est borné (ce sera le cas en particulier si la série converge en ), alors la série converge donc en si et on peut majorer le reste de la série au rang par la vitesse de convergence est donc du même type que pour le théorème du point fixe (le nombre de termes à calculer pour trouver une valeur approchée avec décimales dépend linéairement , les constantes sont d’autant plus grandes que est grand).
On en déduit qu’il existe un réel positif éventuellement égal à tel que la série converge (la limite de la somme jusqu’à l’infini existe) lorsque et n’existe pas lorsque , ce réel est appelé rayon de convergence de la série. Par exemple ce rayon vaut pour l’exponentielle, le sinus ou le cosinus. Il est égal à 1 pour la série géométrique (car elle diverge si et converge si ). On ne peut pas dire ce qui se passe génériquement lorsqu’on est à la limite, c’est-à-dire lorsque (si ). Mais cela n’a en fait pas trop d’importance en pratique car même si la série converge, elle converge souvent trop lentement pour donner de bonnes approximations. En fait, la vitesse de convergence d’une série entière de rayon est en gros la même que celle d’une série géométrique de raison .
Lorsque 2 séries ont un rayon de convergence non nul, alors on peut effectuer leur somme, leur produit comme des polynômes et la série somme/produit a un rayon de convergence au moins égal au plus petit des 2 rayons de convergence des arguments. On peut inverser une série entière non nulle en 0 en appliquant et on obtient une série entière de rayon de convergence non nul. On peut aussi composer deux séries entières et en (avec les règles de calcul de composition des polynômes) si . On peut enfin dériver et intégrer une série entière terme à terme dans son rayon de convergence.
On dit qu’une fonction est développable en série entière en 0 si elle est égale à son développement de Taylor en 0 sommé jusqu’en l’infini dans un disque de centre 0 et de rayon non nul. Les fonctions exponentielle, sinus, cosinus sont donc développables en série entière en 0. La fonction tangente également car le dénominateur cosinus est non nul en 0, mais son rayon de convergence n’est pas l’infini et le calcul des est assez complexe. La fonction est développable en séries entières pour tout avec un rayon de convergence 1 (ou l’infini pour entier positif). Pour , c’est la série géométrique de raison , en effet si : En intégrant par rapport à , on obtient que est développable en série entière en 0 de rayon de convergence 1 et On peut calculer de manière analogue le développement en série entière de en iintégrant celui de , de même pour et en intégrant celui de . On peut donc calculer , , ... par ces formules, mais il faut répondre à la question où arrête-t-on la somme pour obtenir une précision donnée? Dans le cas de , on pourrait répondre comme avec l’exponentielle en majorant la dérivée -ième, mais ce n’est plus faisable pour . On va donner un autre critère qui ne nécessite pas de calculer cette dérivée mais utilise l’alternance des signes dans la somme.
A.3 Série alternée
Démonstration :
on montre que les suites et sont
adjacentes. On a
donc est décroissante, de même est croissante,
et est positif et tend vers 0. On en déduit que
et convergent vers la même limite telle que
et les inégalités du théorème s’en déduisent.
Remarque
lorsqu’on utilise une suite alternée pour
trouver une valeur approchée, il faut que tende assez
vite vers 0, sinon il y aura perte de précision sur la mantisse
lorsqu’on effectuera . On sommera aussi les termes
par ordre décroissant pour diminuer les erreurs d’arrondi.
A.4 La fonction logarithme
Si nous voulons calculer pour avec une précision , il suffit de calculer pour tel que la valeur absolue du terme suivant soit plus petit que : en effet, les signes sont alternés et la suite décroit vers 0.
Si la suite décroit lentement vers 0, cette méthode est mauvaise numériquement et en temps de calcul car il y a presque compensation entre termes successifs donc perte de précision sur la mantisse et il y a beaucoup de termes à calculer. C’est le cas pour le logarithme, si est voisin de 1, il faut calculer termes pour avoir une précision en , par exemple 1 million de termes pour avoir une précision de (sans tenir compte des erreurs d’arrondi). Si est proche de il faut de l’ordre de termes ce qui est mieux, mais encore relativement grand (par exemple 50 termes environ pour une précision en , 13 termes pour ). On a donc intérêt à se ramener si possible à calculer la fonction en un où la convergence est plus rapide (donc le plus petit possible). Par exemple pour le calcul de on peut :
- utiliser la racine carrée on observe que : il faut toutefois faire attention à la perte de précision sur par rapport à lorsque est petit.
- utiliser l’inverse lorsque est proche de 1, est proche de , on a presque divisé par 2. Attention toutefois, on se retrouve alors avec une série non alternée, mais on peut utiliser (??) pour majorer le reste dans ce cas.
- trouver une valeur approchée de à une précision faible, par exemple , et utiliser la méthode de Newton pour améliorer la précision. Soit en effet , alors , on pose , on utilise la suite itérative Comme est proche à de , on peut espérer avoir une valeur approchée de à en 2 itérations. Notez que est proche de , on est dans un domaine où le calcul de est rapide et précis et de plus la méthode de Newton “corrige” les erreurs intermédiaires.
Nous sommes donc en mesure de calculer précisément le logarithme pour disons . Pour calculer sur , on se ramène à en utilisant l’écriture mantisse-exposant, puis si on peut en prendre la racine carrée pour se retrouver dans l’intervalle souhaité. On peut aussi effectuer une division par .
Remarquons que si est connu à une erreur relative près, comme est connu à une erreur absolue de . Si est proche de 0, on a une grande perte de précision relative.
Finalement, nous savons calculer et sous réserve
d’avoir dans une table la valeur de . Pour calculer
précisément, on peut utiliser
et le développement en série calculé en mode exact avec des
fractions à un ordre suffisant, on majore le reste en utilisant
que le terme général de la série est borné par
en , donc d’après (??) :
(on peut même obtenir car on a besoin de uniquement
pour les termes d’ordre plus grand que , on peut donc prendre ).
Par exemple, pour avoir avec une mantisse de 80 bits,
on effectue une fois pour toutes avec un logiciel
de calcul formel :
a:=sum((1/2)^k/k,k=1..80)
|
puis la division en base 2 avec 81 bits de précision
iquo(numer(a)*2^81,denom(a))
Exercice : pour les fonctions trigonométriques, il faut une méthode de calcul de . On peut par exemple faire le calcul de en utilisant le développement de la fonction à un ordre suffisant.
A.5 Autres applications
On peut calculer certaines intégrales de la même manière, par exemple mais aussi des fonctions définies par des intégrales (cas de nombreuses fonctions spéciales).
A.5.1 Exemple : la fonction d’erreur (error fonction, erf)
Cette fonction est définie à une constante multiplicative près par : On peut développer en séries entières l’intégrand (rayon de convergence ), puis intégrer terme à terme, on obtient Ce développement converge très rapidement pour . Par contre, pour grand, il faut calculer beaucoup de termes avant que le reste soit suffisamment petit pour être négligeable, et certains termes intermédiaires sont grands, ce qui provoque une perte de précision qui peut rendre le résultat calculé complètement faux. Contrairement à la fonction exponentielle, il n’y a pas de possibilité de réduire l’argument à une plage où la série converge vite. Il faut donc
- soit utiliser des flottants multiprécision, avec une précision augmentée de la quantité nécessaire pour avoir un résultat fiable
- soit, pour les grandes valeurs de , utiliser un développement asymptotique (en puissances de ) de ainsi que Le développement asymptotique s’obtient par exemple en changeant de variable et en effectuant des intégrations par parties répétées en intégrant et en dérivant et ses dérivées successives. Ce type de développement asymptotique a la propriété inverse du développement en 0: les termes successifs commencent par décroitre avant de croitre et de tendre vers l’infini. Il faut donc arrêter le développement à un rang donné (dépendant de ) et il est impossible d’obtenir une précision meilleure pour cette valeur de par un développement asymptotique (on parle parfois de développement des astronomes).
Exercice : donner une valeur approchée de à près. Combien de termes faut-il calculer dans la somme pour trouver une valeur approchée de à près ? Comparer la valeur de et la valeur absolue du plus grand terme de la série, quelle est la perte de précision relative si on effectue les calculs en virgule flottante ? Combien de chiffres significatifs faut-il utiliser pour assurer une précision finale de 16 chiffres en base 10 ? Calculer le développement asymptotique en l’infini et déterminer un encadrement de par ce développement. Combien de termes faut-il calculer pour déterminer à près par le développement asymptotique et par le développement en séries ? Quelle est la meilleure méthode pour calculer ?
A.5.2 Recherche de solutions d’équations différentielles
On peut aussi appliquer les techniques ci-dessus pour calculer des solutions de certaines équations différentielles dont les solutions ne s’expriment pas à l’aide des fonctions usuelles, on remplace dans l’équation la fonction inconnue par son développement en séries et on cherche une relation de récurrence entre et . Si on arrive à montrer par exemple qu’il y a une solution ayant un développement alternée, ou plus généralement, si on a une majoration , alors le reste de la série entière est majoré par lorsque , on peut alors calculer des valeurs approchées de la fonction solution à la précision souhaitée en utilisant le développement en séries entières.
A.5.3 Exemple : fonctions de Bessel d’ordre entier
Soit un entier positif fixé, on considère l’équation différentielle dont on cherche une solution série entière . En remplacant dans l’équation, si est dans le rayon de convergence de la série (rayon supposé non nul), on obtient soit encore Par exemple, prenons le cas . On a alors quelconque, nul et pour Donc tous les d’indice impair sont nuls. Les pairs sont non nuls si , et ils sont de signe alterné. Soit fixé, on observe que pour , donc la série est alternée à partir du rang partie entière de plus un. Donc elle converge pour tout (le rayon de convergence de est ) et le reste de la somme jusqu’à l’ordre est inférieur en valeur absolue à : Par exemple, pour avoir une valeur approchée à près de pour et , on calcule , on s’arrête au rang tel que On remarque que : donc convient.
Pour , on peut faire un raisonnement analogue (les calculs sont un peu plus compliqués).
On a ainsi trouvé une solution de l’équation différentielle de départ dont on peut facilement calculer une valeur approchée (aussi facilement que par exemple la fonction sinus pour ), on peut alors trouver toutes les solutions de l’équation différentielle (en posant et en cherchant ).
Exercice : faire de même pour les solutions de (fonctions de Airy).
A.6 Développements asymptotiques et séries divergentes
Un développement asymptotique est une généralisation d’un développement de Taylor, par exemple lorsque le point de développement est en l’infini. De nombreuses fonctions ayant une limite en l’infini admettent un développement asymptotique en l’infini, mais ces développements sont souvent des séries qui semblent commencer par converger mais sont divergentes. Ce type de développement s’avère néanmoins très utile lorsqu’on n’a pas besoin d’une trop grande précision sur la valeur de la fonction.
Nous allons illustrer ce type de développement sur un exemple, la fonction exponentielle intégrale, définie à une constante près par On peut montrer que l’intégrale existe bien, car l’intégrand est positif et inférieur à (qui admet comme primitive, cette primitive ayant une limite en ). Pour trouver le développement asymptotique de en , on effectue des intégrations par parties répétées, en intégrant l’exponentielle et en dérivant la fraction rationnelle où Le développement en séries est divergent puisque pour fixé et tendant vers l’infini mais si est grand, au début la série semble converger, de manière très rapide : On peut utiliser comme valeur approchée de pour grand si on sait majorer par un nombre suffisamment petit. On a On retrouve une majoration du type de celle des séries alternées, l’erreur relative est inférieure à la valeur absolue du dernier terme sommé divisé par . Pour fixé assez grand, il faut donc trouver un rang , s’il en existe un, tel que où est la précision relative que l’on s’est fixée. Par exemple, si , convient pour (à peu près la précision relative d’un “double”). Ceci permet d’avoir une approximation de la fonction avec une bonne précision et peu de calculs, mais contrairement aux séries entières, il n’est pas possible d’améliorer cette précision de manière arbitraire en poussant le développement plus loin, il y a une précision maximale possible (qui dépend de ).
Ce type de développement asymptotique peut être effectué pour d’autres fonctions du même type, par exemple
Digression: calcul approché de la constante d’Euler
On peut montrer que
existe (par exemple en cherchant un équivalent de qui vaut
)
et on définit comme sa limite. Malheureusement, la convergence
est très lente et cette définition n’est pas applicable pour obtenir la valeur
de avec une très grande précision.
Il y a un lien entre et la fonction exponentielle intégrale, plus précisément
lorsque , admet une singularité en ,
plus précisément
admet un développement en séries (de rayon de convergence ), car :
Que vaut la constante du membre de droite :
Il se trouve que (voir plus bas une démonstration condensée) et donc :
Pour obtenir une valeur approchée de , il suffit donc de prendre un assez grand
pour pouvoir calculer par son développement asymptotique à la précision requise,
puis de calculer l’intégrale du membre de droite par le développement en séries en
(en utilisant une précision intermédiaire plus grande puisque ce développement en séries
va sembler diverger au début avant de converger pour suffisamment grand).
Par exemple, on pose , on calcule par (??)
avec (qui correspond au moment où le terme général
de la série est minimum puisque le rapport de deux termes successifs
est en )
et une erreur absolue inférieure à
exp(-13)*sum((-1)^n*n!/13.^(n+1),n=0..13)
puis on remplace dans (??), avec
dont on obtient une valeur approchée,
en faisant la somme jusqu’au rang 49 (pour lequel
le terme général est de l’ordre de 1e-12
),
le reste de cette somme est positif et est inférieur à
(-1)^
50*13.^
51/51/51!) qui est de l’ordre de
8e-12
evalf(sum((-1)^n*13^(n+1)/(n+1)/(n+1)!,n=0..49))
La somme argument de evalf
étant exacte, il n’y a pas de problèmes de perte de précision,
on peut aussi faire les calculs intermédiaires en arithmétique approchée,
on doit alors prendre 4 chiffres significatifs de plus
pour tenir compte de la valeur du plus grand terme
sommé dans la série, terme que l’on détermine par exemple par
^
(n+1)/(n+1)/(n+1)!,n=0..20)
ce terme vaut 13^11/11/11!
soit 4000 environ)
Digits:=16; sum((-1)^n*13.^(n+1)/(n+1)/(n+1)!,n=0..49)
On obtient finalement comme valeur approchée de
-exp(-13)*sum((-1)^n*n!/13.^(n+1),n=0..13)-ln(13)+
sum((-1)^n*13^(n+1)/(n+1)/(n+1)!,n=0..49)
soit 0.577215664897
avec une erreur inférieure à 1.2e-11
.
Bien entendu, cette méthode est surtout intéressante si on veut calculer
un grand nombre de décimales de la constante d’Euler, sinon
on peut par exemple appliquer la méthode d’accélération de Richardson à
la suite convergente (??) qui définit
ou d’autres méthodes d’accélération (en transformant par
exemple la série en série alternée). On calcule alors
de deux manières différentes pour plus grand (déterminé
par la précision qu’on peut obtenir par le développement
aymptotique de ).
On peut calculer de la même manière avec le développement en séries et asymptotique de la fonction sinus intégral (on remplace exponentielle par sinus dans la définition de ) et l’égalité (dont un schéma de preuve est aussi donné plus bas)
Calcul de (et preuve de (??)):
Pour cela on effectue une intégration par parties, cette fois en intégrant
et en dérivant l’exponentielle (moins 1 dans la première intégrale).
Pour calculer cette intégrale, on utilise
l’égalité (qui se démontre par récurrence en faisant une
intégration par parties) :
On va à nouveau intégrer par parties,
on intègre un facteur multiplicatif 1
et on dérive l’intégrand, on simplifie, puis
on intègre et on dérive l’autre terme, puis , etc.
où
Pour déterminer on fait le changement de variables
Or en faisant le même changement de variables :
Donc
Lorsque tend vers l’infini, on peut montrer que , en effet les intégrales
sont équivalentes à leur valeur sur un petit intervalle autour de , point où l’argument
de l’exponentielle est maximal,
et comme l’intégrand du numérateur a une amplitude qui s’annule en ,
il devient négligeable devant le dénominateur. Finalement on a bien .
On peut remarquer qu’en faisant le même calcul que mais en remplacant par pour , donne (car le point critique où la dérivée de la phase s’annule est alors ). Ceci peut aussi se vérifier pour réel en faisant le changement de variables En faisant tendre vers , tend vers et on obtient dont la partie imaginaire nous donne (??), et la partie réelle une autre identité sur faisant intervenir la fonction cosinus intégral.
B La moyenne arithmético-géométrique.
B.1 Définition et convergence
Soient et deux réels positifs, on définit les 2 suites On va montrer que ces 2 suites sont adjacentes et convergent donc vers une limite commune notée et il se trouve que la convergence est très rapide, en raison de l’identité : la convergence est quadratique.
On suppose dans la suite que sans changer la généralité puisque échanger et ne change pas la valeur de et pour . On a alors (d’après (??) pour ) et car et . Donc est décroissante minorée (par ), est croissante majorée (par ), ces 2 suites sont convergentes et comme , elles convergent vers la même limite qui dépend de et et que l’on note . On remarque aussi que .
Précisons maintenant la vitesse de convergence lorsque . On va commencer par estimer le nombre d’itérations nécessaires pour que et soient du même ordre de grandeur. Pour cela, on utilise la majoration donc Donc si alors (par exemple, on peut prendre pour avoir . Le nombre minimum d’itérations est proportionnel au log du log du rapport . Ensuite on est ramené à étudier la convergence de la suite arithmético-géométrique de premiers termes et et même en tenant compte de à et donc . Alors l’équation (??) entraine puis (par récurrence) Donc comme est compris entre et , l’erreur relative sur la limite commune est inférieure à une précision donnée au bout d’un nombre d’itérations proportionnel au .
Typiquement dans la suite, on souhaitera calculer avec de l’ordre de en déterminant chiffres significatifs, il faudra alors itérations pour se ramener à avec puis itérations pour avoir la limite avec chiffres significatifs.
Le cas complexe
On suppose maintenant que avec . On va voir que
la suite arithmético-géométrique converge encore.
Étude de l’argument
On voit aisément (par récurrence)
que ; de plus car par définition de la racine carrée
et est de plus non nul car le produit de deux complexes d’arguments dans
ne peut pas être un réel négatif.
On en déduit que
se trouve dans l’intervalle de bornes
et et que
donc
Après itérations, on a
Après quelques itérations, et seront donc presque alignés.
Faisons 4 itérations.
On peut factoriser par exemple et on
est ramené à l’étude de la suite de termes initiaux d’argument
petit
(inférieur en valeur absolue à ) et . On suppose donc dans la suite que
Étude du module
On a :
Posons , on a :
Si désigne le max de et , on a alors la majoration
donc en prenant les logarithmes
On rappelle qu’on a la majoration
qui va nous donner la minoration de
en prenant les log et en minorant par
Finalement avec (??)
On en déduit
La convergence du vers 0 est donc géométrique, donc et convergent
quadratiquement.
B.2 Lien avec les intégrales elliptiques
Le calcul de la limite commune des suites et en fonction de et n’est pas trivial au premier abord. Il est relié aux intégrales elliptiques, plus précisément on peut construire une intégrale dépendant de deux paramètres et et qui est invariante par la transformation (??) On a en effet On pose alors où est une bijection croissante de vers , donc On note au passage que est définie si vérifient , on peut montrer que la relation ci-dessus s’étend (par holomorphie).
Lorsque (par exemple lorsqu’on est à la limite), le calcul de est explicite donc On peut transformer en posant Puis en posant () et enfin en posant Si on définit pour alors on peut calculer en fonction de , en posant soit d’où l’on déduit la valeur de l’intégrale elliptique en fonction de la moyenne arithmético-géométrique : Dans l’autre sens, pour et positifs et finalement
B.3 Application : calcul efficace du logarithme.
On peut utiliser la moyenne arithmético-géométrique pour calculer le logarithme efficacement, pour cela on cherche le développement asymptotique de lorsque tend vers 1. Plus précisément, on va poser avec , donc en posant , et la singularité de l’intégrale pour proche de 0 apparait lorsque est proche de 0. Si on effectue un développement de Taylor en , on trouve Il est donc naturel de comparer à l’intégrale qui se calcule en faisant par exemple le changement de variables ou directement avec Xcas,
supposons(k>0 && k<1);
J:=int(1/sqrt(k^2+(1-k^2)*y^2),y,0,pi/2)
qui donne après réécriture : et on peut calculer le développement asymptotique de en 0
series(J,k=0,5,1)
qui renvoie : on peut alors préciser ce développement par
series(J+ln(k)-ln(pi),k=0,5,1)
qui renvoie (après simplifications et où la notation peut contenir des logarithmes)
donc
Examinons maintenant , il n’a plus de singularité en , et il admet une limite
lorsque , obtenue en remplacant par 0
D’où pour
Pour préciser la partie du développement de en puissances de , nous allons
majorer , puis .
Posons
Majoration de
L’intégrand de la différence est
Soit
On décompose l’intégrale en 2 parties et .
Sur on utilise (??), on majore chaque terme séparément
et on minore et par
Donc
Sur , on utilise (??)
et on minore et par
on obtient
où :
Donc
et
On peut majorer , donc
On majore enfin et par 1,
Le premier morceau se calcule par intégration par parties
Le deuxième morceau se majore en minorant
Finalement
où est donné en (??).
Majoration de
On a
et on va majorer la valeur absolue de chaque terme de la somme.
Pour , on a
Pour le second terme, on majore le facteur par ,
l’argument du logarithme est inférieur à 1 et supérieur à
donc le logarithme en valeur absolue est inférieur à
donc, pour ,
Finalement, pour
que l’on peut réécrire
La formule (??)
permet de calculer le logarithme d’un réel positif
avec (presque) bits
lorsque (ce à quoi on peut toujours se ramener
en calculant le logarithme d’une puissance -ième de ou
le logarithme de , en calculant au préalable ).
Par exemple, prenons , on trouve (en 8 itérations)
.
On a, avec une erreur inférieure à
On peut donc déduire une valeur approchée de si on connait
la valeur approchée de et réciproquement.
Si on veut calculer les deux simultanément, comme les relations entre
et seront des équations homogènes, on est obligé
d’introduire une autre relation. Par exemple pour calculer une
valeur approchée de on calcule la différence
dont on connait le développement au premier
ordre, et on applique la formule de la moyenne arithmético-géométrique.
Il faut faire attention à la perte de précision lorsqu’on fait
la différence des deux logarithmes qui sont très proches, ainsi
on va perdre une trentaine de bits, il faut grosso modo calculer les
moyennes arithmético-géométrique avec
2 fois plus de chiffres significatifs.
L’intérêt de cet algorithme apparait lorsqu’on veut calculer le logarithme avec beaucoup de précision, en raison de la convergence quadratique de la moyenne arithmético-géométrique (qui est nettement meilleure que la convergence linéaire pour les développements en série, ou logarithmiquement meilleure pour l’exponentielle), par contre elle n’est pas performante si on ne veut qu’une dizaine de chiffres significatifs. On peut alors calculer les autres fonctions transcendantes usuelles, telle l’exponentielle, à partir du logarithme, ou les fonctions trigonométriques inverses (en utilisant des complexes) et directes.
On trouvera dans Brent-Zimmermann quelques considérations permettant d’améliorer les constantes dans les temps de calcul par rapport à cette méthode (cela nécessite d’introduire des fonctions spéciales ) et d’autres formules pour calculer .