Séminaire P. LELONG, P. DOLBEAULT, H. SKODA (Analyse) 24e année, 1983/1984. SUR L'IDENTITE DE KODAIRA-NAKANO EN GEOMETRIE HERMITIENNE par Jean-Pierre DEMAILLY Nous démontrons une identité de Kodaira-Nakano généralisée, reliant les Laplaciens de Beltrami holomorphes et anti-holomorphes d'un fibre vectoriel hermitien au-dessus dTune variété complexe hermitienne, avec calcul explicite des termes de torsion. We prove a generalized Kodaira-Nakano identity relating holomor-phic and anti-holomorphic Laplace-Beltrami operators of a hermitian vector bundle over a hermitian complex manifold, with explicit computations of torsion terms. 0. - INTRODUCTION ET NOTATIONS . Soit E un fibre vectoriel holomorphe hermitien de rang r au-dessus dTune variété analytique complexe X de dimension n . On désigne par D = Dr + D" la connexion canonique de E , et par 2 c(E) = D = D'D" + DTtDT la forme de courbure associée. On suppose donnée une métrique hermitienne uu = 1 2 tu., dz. a dz. l = ô + E (c .z. + cT .z.) + 0(|z|2) , il suffit de poser e (z) = h (z) - Z c .z.h (z) . ? X XW u,j \M 3 UV Etant donné une section s = 2_, s & e de C (X,E) on a alors X à X p,qv DEs = Eds^® e^ + 0(|z|) , 6"s = Eô'^ <8>e + 0(|z|) ,..., - 4 - ce qui ramène la preuve du théorème 1.1 au cas du fibre trivial xx = tw0 + Y = iS X. C A Q avec X. = 1 + y. et v- = 0( |z l) . Posons J = [J.-J.J , Ct = C A...AC , XT = x, -.x, . U= 2uJ,KSJASK ' V= Evj.K£JA^K Jp - 5 - où la somme est étendue aux multiindices J,K croissants tels que |j| = p , |K| = q . Relativement à tu on a (Ç.,Ç.) = \. , d'où dV = £ V1X^1uJ;KvJjKX1...^dV(} = S (l-SY.-SY^ £ Y^u v dV +0(|z|2) Le lemme 1.3 est alors conséquence du lemme suivant : LEMME 1.4. - [y.Aju = S | Tj y. + J,KVjçj J j¤K J l^J^n Jj ^>K J K lequel résulte à son tour des formules V = i(_1)PjfujM"L^CLA?M ' l^^"1' >M|=q"1 YAu = i(-i)Pk£uKYkuJjKCkJACkK , [Y,Aju = S Yku T MCkI ACkM - 2 YkuT KCTA£K " j.kéLUM.j^fk YkUjLJM£kLA^kM = E £ V- _ 2 Y-) UT t/CtACT7 - PROPOSITION 1.5. - ô" = 6JJ + [A0Jôî{JîY] 1 au point xQ , i.e. en ce point les deux opérateurs ont même écriture formelle Démonstration. - D'après le lemme 1.3, ô'r coïncide en x avec l'adjoint de d" pour la métrique (u|v)1 = J A0]u|v>0dV0 . .X Pour tous u Ç & (X) et vÇi (X) on a par définition (u|d"v)1 = J (u-[Y,A0]u;d"v)0dV0 X J <ô-'u-ô'(5([Y,A()]u),v)0dV0 - 6 - Comme oj et uuft coïncident au point x et comme Y(xn) = 0 , on obtient en ce point ; ô"u = ÔJJu - 6JJ([y,A01u) = ÔJJu - [ô»,[YîA0llu , ô" = 5" - [Ô",[Y>AJ1 ? On utilise maintenant l'identité de Jacobi (1.6) (-l)Ca[A,[B,C]] +<-l)ab[B,[CIA]] +(-l)bC[C,[A,B]] = 0 , où a,b,c sont les degrés respectifs de A,B,C . Il vient [A0,ÔJJ] = [d",L0l* = 0 , par suite [60'[Y'A01] + [A^fô^y]] = 0 ce qui démontre 1.5. b Démonstration du théorème 1.1. - Il suffit de prouver (a), la propriété (b) s'en déduit par conjugaison. L'égalité L = L + y et la proposition 1.5 entraînent au point x la relation (1.7) [L,Ô"I = ÏL0,ftJ] + [L0,[A0J6»f.Y]]] +[yîôt(J] > car le crochet triple où y figure 2 fois est nul en x . D'après l'identité (1.6) appliquée avec C - [ô",y! on obtient (1.8) [L0,[A0,C]] = -[A0,[CSL0]] - [C,[L0,A0J] [C,L0] = [L0,[ô»>Yl] = [y,IL0,6»]] . La relation classique [Iin,SUl = - id' donne donc (3.12)[C,L ] - - ty,id'] = id'y - id'uu . D'autre part, le lemme 1.4 montre que (3.13)[L0,A0lu = (p+q-n)u si u est de bidegré (p,q) ; comme C est de type (1,0) il vient - 7 - (1.11) fC,[L0>A0]] = - C = - [ô»fY] - D'après (1.8), (1.9), (1.11) il en résulte la relation [L0,[A0,[ô£,Y]]] = -TA^id'U)] +l6»fY] - On obtient en définitive d'après (1.7) l'égalité : [L, ôff] = t X.Q , ÔJJ] - [AQ,id'uu] = ~ i(df+t) au point x , ce qui achève la vérification de (a), a Par une méthode entièrement différente, J. Le Potier [2] a établi des formules analogues et a obtenu la relation essentiellement équivalente t* = |[A,[A;d'oj]1 , cf. lemme 2.2(b). 2. - IDENTITE DE KODAIRA-NAKANO - Les relations de commutation du § l vont nous permettre d'exprimer A" en fonction de A' comme dans le cas kahlérien, modulo des termes de torsion supplémentaires. PROPOSITION 2.1. - A" = A' + tic(E),A] + [Df,T*l - [D",t*1 ? Démonstration. - L'égalité 1.1 (d) fournit Ô" = -ifA,D'] - t* , d'où A" - [D",ô'!] = -i[DM,[A,D']] - [D",t*] . L'identité de Jacobi entraîne d'autre part [D",tA,D']] = tA,[D',D"]] +[D',[D",M] = [A,c(JS)I + i[D\ôf+T*] compte-tenu de 1.1 (c), ce qui démontre la relation (2.1). n Nous allons maintenant transformer l'égalité (2.1) de manière à absorber les opérateurs différentiels d'ordre un [D',t^] et [D"»t*1 dans l'écriture de Ar . - 8 - LEMME 2.2. - (3.14)[L,tJ - 3dT0J , (3.15)[A,T] = -2ir* . Démonstration. - (a) Comme [L,d'uu] = 0 , l'identité de Jacobi entraîne [L,T] = [L,[A,dTuu]] = - [d'ut), TL,AU = 3d'oj compte-tenu de (1.10) et du degré de d'uu , qui est égal à 3 . (b) On a t = -if&T,,L] - D' grâce à 1.1 (a), d'où [A,xl = - i[A,Iô",L]] - tA,D'] = -i([A,[6",Ll] +ô"+t*) En utilisant de nouveau (1.6) et (1.10) il vient [A,fô"sL]] = - [L,[A,.ôf,l] - [ô",[L,Al] - - [fd",L] ,Al* - 5" = - [d"uu,A]* - ô" = t* - 6" , d'où [A,t] = - 2ix* . ? LEMME 2.3. - (3.16)[Df,t*] = - [D',ô"] = [t,ôt'] , (3.17)-ID»*,t*] = [t,ôt + t*] + [AjA,^d'dMd] - [d'eu, (d^*] Démonstration. - L'identité de Jacobi implique - [D',[A,D'J] + [D',[DT,A]I + [A,[D',D'l] = 0 , d'où [D\[A,D']] =0 et de même [ô",[ô!',L]] = 0 . L'égalité (a) résulte alors de 1.1 (a) et (d). Pour vérifier (b) on part de l'égalité t* = -~[A,tJ fournie par 2.2 (b). Il s'ensuit (2.4) [D'\t*] = |[D",tA,T]] - On utilise maintenant l'identité de Jacobi à répétition ; - 9 - (3.18)[D",[A,t1] - [A,ÏT,D"]] + [t,[D",A]] ; (3.19)[t,D,t] = [D",t] = [D",[A,d'UJ]] = [A, td'ttj.D"]] + [dfuj,[D",A]] = [A,dndruu] + fdfuu,A] avec la notation A = fD",A] = i(ôT + T*) - D'après (2.6) il vient (2.7) [A,[t,Dt']1 = [A, [A,d"d'u)]] + [A, [d'uu.A]] . Calculons maintenant le dernier crochet dans (2.7) : [A, [d'iu, A]] = [AjA^d'½]] - [dfujffA,AÏ] , (2.8) [A,tdfmj,A]] - [t,A] + [d'uu.lA.A]] ; (2.9) [A, A] = i[A,ôT+T*] = i[dT + T,L]* où [dr,L] = d'u) et [t,L] = - 3dTcu draprès 2.2 (a). Les égalités (2.9) et (2.8) fournissent donc respectivement [A, A] = - 2i(d,u))* , (3.20)[A, [d'ut),A]] = [T,[D"}A]] - 2i[dTuu,(d,u))*] . Les formules (2.5), (2.7), (2.10) donnent par conséquent (3.21)[D",[A,T]] = [A,[A,dMd'uu]] + 2[TjD",A]] - 2i[df't«, (d^)'*] . LTidentité 2.3 (b) résulte alors de (2.4) et (2.11), compte-tenu que [D",A] = i(ôT + r*) . ? Le lemme 2.3 (b) montre maintenant que A' + [D\T*] - [D»tï*] = [D' + t, ô' + t*] + [A;[A,^dfd"(ju]] - [df(i),(dftw)*] - Posons AT = [D'+t , ôr + T*] . Comme ôT + t* est l'adjoint de T Df + t , AT est un opérateur autoadjoint > 0 . La proposition 2.1 T peut donc se récrire - 10 - THEOREME 2.12. - ATf = Ar + [ic(E),A] + T T UU avec Ar = [D'+t, ôt + t*1 , t = fA.d'ut)] , T = [AjA idTdMaj]] - fd'uj, (dTLU)*J . ? Dans le cas où la métrique ou est kahlérienne, on a naturellement r = T = 0 . De plus, dans ce cas le lemme 2.3 (a) implique [D',ô,r] - 0 , d'où [D,T,ôT] = 0 par adjonction, ce qui donne A = [D, ô] = [D' + D" , ôT+ô"I = A' + An . Dans le cas non kahlérien, le lemme 2.3 (a) s'écrit [D' + t, ÔM] = 0 et on obtient la relation analogue plus générale [D + t , Ô + T*I = [(D! + t)+D" , (ôT + T*) + ôfr] = AT + A" - T PROPOSITION 2.13. - Soit A = fD + T , ô+t*1 . Alors T A = AT + A" . ? T T 3. - THEOREME D'EXISTENCE EN BIDEGRE (n,q) . Pour toute forme u £ Jfr (X, E) le théorème 2.12 implique la généralisation suivante de l'inégalité de Nakano classique : (3.1) ||ô"u||2 + ||D"u||2 ^ ([ic(E),A]u|u) + (Tulu) . M II M II I yu ! Dans certains cas, le terme (T u|u) pourra se simplifier grâce aux remarques suivantes : si p = n ou n-l , ([d!uu,(dTuu)*]u|u) = ||(df(ii)*u|| si (p,q) = (n5l) , [A,[A,dfd"u)]] = 0 . On suppose maintenant que le fibre E est semi-positif au sens de Nakano. On sait alors que l'endomorphisme [ic(E),A] opérant sur les (n,q)-formes est hermitien s 0 . Soit h une (n,q)-forme à coefficients mesurables sur X . On note ||h||2 = <[lc(E),Al"Vh> , - 11 - i.e. ||h|| est le plus petit réel > 0 (éventuellement +co ) tel que |(h,u>| ^ ||h|| (lic(E),A]u,u) pour tout u . THEOREME 3.3. - On_fait les hypothèses suivantes : (3.22)DT,h = 0 ; (3.23)f irf dV < +½ ; JX "c(E) (3.24)la métrique m est complète et la forme d'oj est uu-bornée (c'est toujours le cas si X est compacte) ; (3.25)drdnuu =0 s[ q>l . Alors il existe une (n,q-l)-forme f et une (n-2îq-l)-forme g sur X à valeurs dans E telles que (3.26)f (||f|l2 + ||g||2)dV <; f ||h||2 AV , dx u i x'i "c(E) (3.27)fa = D"f + P(dfujAg) , 2 où P est le projecteur orthogonal L (X, E) -*? Ker D " . n,q Démon st rat ion. - L'hypothèse de complétude (3.6) montre que 1Tinégalité (3.1) est vraie pour tout u Ç Dom(Ô" ) H Dom(D" ) , grâce n,q' n,q au lemme de densité classique de Hôrmander. Ecrivons alors u = ux + u2 avec u Ç KerD" , un f (Ker Drf ) ; il vient 1 n,q 2 n,q' |(h|u)|2 ^ lOilu^l2 < ||h||2 ([icCEJ.Alu^u^ . 2 Sous lrhypothèse (3.7), le terme (T un ju^) se réduit à - ||(dTuu)*u || par la remarque (3.2). Comme Ker Ô,T Dlmô" = (KerD" ) , n,q n,q+l n,q l'inégalité (3.1) implique donc ([ic(E),A]u lu )