Sur l'enseignement des Mathématiques et des Sciences au Lycée et à l'Université: un cri d'alarme Jean-Pierre Demailly Professeur à l'Université de Grenoble I Membre Correspondant de l'Académie des Sciences Le texte qui suit a pour but de faire état de quelques observations et réflexions sur l'enseignement des mathématiques et des sciences, suite aux évolutions désastreuses intervenues ces dernières années. Ces réflexions me sont propres, mais intègrent des discussions et des échanges de vues avec de nombreux collègues, chercheurs et enseignants du supérieur comme du secondaire. J'ai pu bénéficier par ailleurs d'informations privilégiées grâce à des réflexions et discussions menées à l'Académie des Sciences. Les besoins, face au discours politique actuel Contrairement à des affirmations du Ministre en charge de l'Education Nationale, parues dans quelques grands journaux (France-Soir du 23/11/99) et lâchées sans doute dans l'effervescence de la communication, les mathématiques ne sont pas une science en voie de "dévaluation inéluctable" et elles ne se réduisent pas à la "pratique de calculs" et de "tracés de courbes" à l'aide d'instruments de calcul. Ceux qui croient cela ont ou bien une vision très parcellaire et déformée de ce que sont les mathématiques, ou ignorent tout du sujet. Les Mathématiques restent - et resteront pour longtemps - un outil fondamental d'exploration de notre univers physique et intellectuel. Pour ne citer que quelques exemples ayant trait à la science fondamentale, les théories physiques contemporaines, cosmologie, théorie des champs, mécanique quantique..., utilisent constamment les résultats les plus pointus de la géométrie et de l'analyse; la science de l'information est en partie basée sont des concepts mis à jour par les progrès récents de l'arithmétique et de l'algorithmique. Une part considérable de l'industrie de haute technologie repose de même sur des moyens de production et de calcul dont la mise en oeuvre réclame des mathématiques de technicité élevée. Face à la tendance actuelle qui semble être à une réduction systématique des horaires d'enseignement en mathématiques et des moyens alloués à cette discipline, il y a donc lieu d'exprimer une grande inquiétude. Car, au delà des mathématiques, c'est toute la filière de l'enseignement des sciences qui sera en péril. Et cela, à un moment où la compétition internationale exacerbée réclame toujours plus de spécialistes, sur des sujets en constante évolution, donc réclamant un recul conceptuel important. Dans tous les pays avancés, la maîtrise des savoirs techniques et scientifiques est une pyramide où l'équilibre entre les différentes disciplines, la qualité globale de l'enseignement, jouent un rôle primordial. La perte de la maîtrise dans un secteur donné de la science ou de la technologie est souvent irréparable dans des délais courts, et réclame par la suite des efforts démesurés de remise à niveau. Les propos tenus par le Ministre et rapportés dans le Monde du 24 novembre 1999 (http://www.lemonde.fr/article/0,2320,31922,00.html) sont objectivement scandaleux: "Il n'y a pas eu de gestion prévisionnelle des emplois depuis des années. Humainement parlant, je ne peux pas mettre zéro poste de maths aux concours de recrutement. Je ne peux que réduire graduellement les postes mis aux concours, par honnêteté vis-à-vis des étudiants qui préparent ces concours et ont fait de gros sacrifices pour cela !". Ils montrent à l'évidence que l'enseignement des Mathématiques est en péril. Il est difficile de savoir si le Ministre a tenu des propos qui reflètent sa pensée propre (soulignant alors un grave manque de compréhension du rôle crucial des mathématiques dans le développement de la Science et de la Technologie), s'il cherche plutôt - selon une tactique qui semble sienne - à faire de la provocation pour voir comment le milieu réagira, ou enfin s'il se fait l'écho de voix mal informées et mal inspirées. Il est hélas possible que les trois phénomènes soient concomitants. Cela est très grave dans la mesure où le Ministre manifeste une tendance persistante à la prise de décision impulsive, sans consultation des experts. La "dévaluation inéluctable" des mathématiques constitue sans aucun doute une "exception française": la National Science Foundation américaine, considérant que les Mathématiques constituaient un enjeu stratégique pour le développement de toutes les sciences, vient d'augmenter sensiblement les moyens alloués à la recherche fondamentale et appliquée dans cette discipline... Un constat sur l'enseignement à l'université Il n'est pas exagéré de dire que l'Enseignement des Mathématiques à l'Université, et plus généralement des sciences exactes, est dans un état très préoccupant. Cela est confirmé par beaucoup d'indices et de témoignages directs, même si le niveau des "meilleurs" étudiants - thésards, futurs chercheurs, élèves des Grandes Écoles - est resté à peu près inchangé au fil des ans. Ce qui est principalement en cause, me semble-t-il, c'est la formation des étudiants qui se situent dans la moyenne des promotions de Premier et de Second Cycle, et en particulier ceux qui se destinent à l'Enseignement. L'enseignement mathématique de DEUG est supposé apporter aux étudiants les outils conceptuels les plus basiques et affiner les méthodes de calcul (algébriques, analytiques, géométriques) nécessaires pour la pratique scientifique au sens large. Or, les bacheliers qui entrent à l'Université paraissent très mal préparés à cette épreuve; bien souvent, leur vision des mathématiques au sortir du Lycée se réduit à la pratique aveugle de techniques stéréotypées et une vision "figée" des mathématiques - comme si jamais ils n'avaient eu l'occasion de se rendre compte que les mathématiques sont avant tout la science du raisonnement plutôt qu'une technologie des "recettes de calcul". La structure des DEUG ne fait rien pour arranger la situation. Là où il faudrait que les étudiants essaient de se concentrer sur un petit nombre de sujets bien structurés, on voit fleurir dans beaucoup d'universités une organisation des enseignements en petits modules épars censés faciliter l'acquisition des connaissances et la réussite aux examens. L'objectif est sans doute atteint pour le deuxième point (grâce à de savants algorithmes de "compensation" et "d'amélioration" des notes entre les différents modules, éventuellement d'une année sur l'autre) mais c'est une faillite assez marquée en ce qui concerne le premier. Les moyens alloués à l'enseignement sont tout simplement insuffisants ou inadaptés: les cours magistraux en grand amphi (qui sont encore le lot quotidien de la grande majorité des étudiants) sont, on le sait, très peu profitables à des étudiants dont l'autonomie est encore peu développée. L'insuffisance des horaires de travaux dirigés, le manque d'investissement des étudiants face à une matière qui leur parait dépersonnalisée et inaccessible, la pratique insuffisante du travail personnel dans les livres et les documents écrits, sont là encore des handicaps rédhibitoires. Bien sûr, des moyens matériels et humains considérables seraient nécessaires pour résoudre ces problèmes. Une plus grande flexibilité - permettant aux étudiants de s'orienter davantage en fonction de leurs goûts et de leurs aptitudes - serait tout aussi nécessaire, en conjonction avec de meilleures procédures d'orientation et un plus grand sérieux dans les procédures d'évaluation. A l'arrivée en Second Cycle, les lacunes sont telles que l'objectif d'atteindre le niveau supposé des concours de recrutement au CAPES ou à l'Agrégation restera la plupart du temps une pure fiction. (Il est de notoriété publique que les reçus en queue de liste aux concours de recrutement le sont sur la base de résultats très faibles aux épreuves écrites). C'est inquiétant pour la pérennité à long terme du système éducatif, car il est difficile d'être un bon enseignant sans un minimum de recul sur la discipline que l'on enseigne... Sur l'enseignement au Lycée Les objectifs fondamentaux de l'enseignement des mathématiques au niveau du Lycée nous paraissent être 1) l'apprentissage des bases du raisonnement 2) l'acquisition de quelques techniques fondamentales de calcul (algébrique, analytique) 3) le développement de la perception géométrique 4) la compréhension de quelques exemples simples de modélisation 5) l'usage raisonné des outils de calcul (calculettes, micro-ordinateurs) L'observation de quelques manuels édités dans les dernières années fait malheureusement apparaître que la tendance est à une vision assez descriptive des mathématiques, où le raisonnement et la construction logique ont peu de place. En dépit d'une présentation soignée et haute en couleurs, les résultats mathématiques sont présentés comme des "catalogues de recettes" qui ne reçoivent presque jamais de justification, même dans les cas où de simples raisonnements de bon sens permettraient de les atteindre. De longues suites d'exemples et d'exercices type sont là pour illustrer le cours, mais en l'absence de toute démarche d'abstraction ou de généralisation, on voit assez mal comment un fil conducteur pourrait se dégager. Souvent, la profusion de couleurs, de gadgets et de remarques ou distractions anecdotiques vient masquer l'essentiel. Des observations analogues m'ont été rapportées par des collègues au sujet des enseignements de physique au Lycée ("les manuels ne sont plus que des albums-photos"; "je ne songe même plus à proposer les manuels français récents de Physique à nos partenaires des pays en voie de développement, ils auraient un effet toxique"). Or c'est dans la capacité d'abstraire et de modéliser que se situe la pierre angulaire de l'enseignement des mathématiques. Comme il a été dit plus haut, les "lacunes" des étudiants (du moins, d'une grande majorité d'étudiants) lorsqu'ils arrivent à l'université sont hélas telles que toute tentative de faire coller ces étudiants à des programmes censés correspondre à leur niveau d'études reste souvent vaine ou fictive. Cela est particulièrement préoccupant pour les étudiants qui s'orientent ensuite vers le professorat. Il faut compter en effet avec un temps de maturation des notions qui se chiffre en années pour des notions fondamentales telles que la continuité, la géométrie vectorielle, les transformations, la linéarité, l'appréhension de la notion de probabilité... Il faut donc qu'une première approche de ces notions un peu conceptuelles ait lieu à des moments qui ne soient pas trop tardifs dans la scolarité de l'élève. A celà doit correspondre nécessairement une organisation des études susceptible de répondre aux impératifs de qualité de l'enseignement. L'insuffisance de la diversification des filières (notamment de la filière scientifique), la tendance à la baisse uniforme des horaires de l'enseignement des mathématiques nous paraissent être des contraintes incompatibles avec un enseignement mathématique et scientifique de qualité. La démographie de la population lycéenne a certes considérablement évolué depuis une vingtaine d'années, et il est évident que des ajustements importants du système éducatif étaient nécessaires. Or, quelle a été l'évolution constatée? Face à un public fatalement plus hétérogène qu'autrefois, le système éducatif a répondu par une plus *grande uniformisation* (i.e. une plus grande rigidité) des filières menant aux études longues: création de la Seconde indifférenciée, unification des filières C, D, E en une unique filière scientifique baptisée S, en Première et Terminale. Il ne faut pas être grand clerc pour voir qu'une telle stratégie ne pouvait mener qu'à un nivellement par le bas. Il paraît en effet inconcevable d'imposer le "même menu" à des élèves qui ont des goûts, des aptitudes et peut-être déjà des vocations différentes. Au contraire, il faudrait valoriser chez chaque élève ce pour quoi son goût commence à s'affirmer (que ce soit en lettres, en sciences, en art, en sport...), en lui permettant de concentrer ses efforts sur les matières pour lesquelles il se sent une vocation. Le grand tort des anciennes filières C, D, E a été d'instituer un système de sélection par les sciences (et, en l'occurrence par les mathématiques), qui a été ressenti par beaucoup comme une dictature des mathématiques sur l'ensemble des autres disciplines - y compris les autres disciplines scientifiques. Le moyen radical trouvé pour supprimer cette "dictature" a été de nier les différences individuelles et le jeu de balance possible entre les disciplines. C'est tout simplement inacceptable et cela a conduit en fait à un système encore plus inégalitaire qu'autrefois, où seuls les étudiants les plus favorisés et/ou bénéficiant d'un soutien approprié peuvent tirer leur épingle du jeu. Venons-en concrètement aux grandes tendances, telles qu'elles semblent se dessiner pour l'enseignement des mathématiques et de l'informatique au Lycée. Ces tendances résultent de nombreux facteurs: directives ministérielles, propositions du CNP (Comité National des Programmes), travaux des GTD (Groupes techniques Disciplinaires), et enfin, évidemment interprétation de ces différentes orientations par les auteurs de manuels et par le corps enseignant. Il est donc difficile de démêler l'influence et les conséquences exactes des décisions prises, mais je vais néanmoins essayer de me livrer à une analyse des tendances, dans un contexte de réduction continue des horaires consacrés à l'enseignement de Mathématiques depuis plusieurs années. Sur le Comité National des Programmes Le rôle du Comité National des Programmes (CNP) est de réfléchir aux grandes orientations des programmes d'enseignement, en amont des travaux des groupes techniques disciplinaires. J'ai peu d'éléments concernant les débats internes au CNP, si ce n'est des informations rapportées par notre collègue Michel Broué qui représentait les Mathématiques au sein du CNP depuis 1995. Le Président du CNP, Luc Ferry, a affirmé publiquement et à plusieurs occasions qu'il n'a toujours pas été convaincu, qu'il n'est pas convaincu, "de la légitimité de l'enseignement des mathématiques dans le secondaire" [non pas de la légitimité d'enseigner telle ou telle part des mathématiques, ou de les enseigner de telle ou telle façon, mais bien de la légitimité d'enseigner les mathématiques tout court]. Ce faisant, il a exprimé une opinion qui est très largement répandue dans les "cercles dirigeants" (journalistes, voire politiciens), singulièrement chez ceux qui n'ont eu aucune formation scientifique. Ceci pose le problème de savoir si le CNP, par sa composition même, était en mesure d'évaluer les grands enjeux concernant l'enseignement des sciences. Il semble en la circonstance que la légitimité des Mathématiques ait été jaugée au travers de ses seules applications, et singulièrement par ses applications aux sciences sociales et humaines. Or les Mathématiques, qui sont historiquement une des disciplines majeures de l'esprit, se justifient déjà très bien, comme les autres sciences, par leur problématique interne et leur pouvoir d'explication de notre univers. S'il fallait encore chercher des justifications au travers des applications, ce serait évidemment plutôt du côté des sciences exactes qu'il faudrait regarder... En tout cas, il est difficile de mesurer quelle a été l'influence du CNP dans les récentes décisions et orientations ministérielles. Malheureusement pour notre pays et pour l'enseignement des sciences en général, on constate une nette régression des horaires et une baisse de la perception des mathématiques comme outil fondamental de réflexion au service du citoyen. Sur les programmes actuels et les propositions du GTD Compte tenu de ce qui précède, il est clair que les conditions dans lesquelles s'est effectué le travail du GTD (Groupe Technique Disciplinaire) chargé de l'élaboration des nouveaux programmes étaient très difficiles. Le GTD a sans doute essayé de parer au plus pressé, mais les propositions de programmes qui ressortent des documents disponibles (cf. http://www.cndp.fr/lycee/maths/default.htm ) peuvent susciter bien des interrogations. Evoquons d'abord le contenu. Les programmes actuels, il faut le signaler, n'ont pas été élaborés par le prédécesseur du présent GTD, mais directement par l'inspection générale suite à la suppression des groupes techniques disciplinaires par François Bayrou. Dans une lettre datée du 21 octobre 1998, Michel Broué exprimait l'opinion suivante: "les problèmes que posent les programmes actuels me semblent évidents: Affaiblissement de la formation au raisonnement, au profit d'apprentissages d'automatismes pas toujours significatifs; Incompréhension croissante, de la part des élèves, des enjeux et de l'utilité de ce qui leur est enseigné." Or il semble que plutôt que de s'attaquer au coeur de ces problèmes, la tendance soit à essayer de les contourner en augmentant encore la place des aspects technologiques et applicatifs. Il n'est pas condamnable en soi que les mathématiques s'ouvrent aux applications, c'est même très souhaitable, mais lorsque cette vision est poussée trop loin, il y a un danger certain que la plus grande partie du temps qui devrait être normalement utilisé à l'acquisition des concepts de base le soit pour faire tout autre chose que des mathématiques, surtout dans un contexte où les horaires sont en réduction. On risque en effet de cultiver le papillonnage sur des sujets relativement "annexes", et qui souvent, pour une compréhension réelle des phénomènes mis en jeu, réclameraient des connaissances mathématiques excédant largement les possibilités des élèves. Ce n'est donc pas de mathématiques dont il s'agira. Ainsi, l'utilisation de tableurs pour analyser des tableaux de chiffres peut se concevoir dans la perspective d'une formation professionnelle courte débouchant sur l'économie ou la comptabilité, mais elle n'a guère sa place dans un tronc commun de mathématique à vocation généraliste. Il y a quelques mathématiques non triviales à l'oeuvre dans les tableurs, comme le difficile concept de linéarité, mais ces logiciels ne sont pas (et de loin) les plus pertinents pour illustrer les mathématiques en question. Les informaticiens eux-mêmes, qui sont évidemment très concernés par l'introduction de concepts d'informatique au Lycée, semblent avoir sur la question un avis sans équivoque (voir le texte très intéressant de Bernard Lang, http://pauillac.inria.fr/~lang/ecrits/ailf/ ) Venons-en à la question cruciale, qui est celle de savoir quel sens les élèves peuvent trouver à l'enseignement qui leur sera dispensé. Nous prendrons l'exemple des Statistiques, sur lesquelles les programmes actuels (et leurs successeurs potentiels) semblent insister de façon un peu "obsessionnelle" (il est prévu un enseignement de statistiques dès la 6ème, repris chaque année jusqu'en Terminale). Je ne sais pas si cela est en rapport avec la mode actuelle de pratiquer des sondages en toute occasion pour un oui ou pour un non. Mais, si j'interprète bien les projets actuels, les statistiques semblent devoir occuper une place assez disproportionnée par rapport à leur importance dans le contexte des mathématiques en tant que science (à la différence peut-être des mathématiques "ressenties" par le citoyen à l'écoute des grands media). En tout cas, il est prévu de donner aux élèves une idée de la modélisation statistique en la justifiant au travers de la théorie des probabilités. C'est une bonne chose si ces notions interviennent seulement en fin de Lycée et si le programme en reste à la compréhension des concepts de base autour des probabilités. Mais il semblerait qu'il soit prévu de parler de densités de probabilité continues et de la loi normale comme approximation de lois discrètes portant sur de grands échantillons. Là, il me semble qu'on dépasse les bornes. En effet, il serait impensable de faire comprendre aux élèves les mathématiques qui expliquent ces subtils phénomènes de convergence, comme le théorème central limite, totalement hors de portée à ce niveau (et il faut noter à ce propos que les programmes encore en vigueur ont gravement sapé la partie concernant le concept "banal" de limite d'une suite ou d'une fonction, jugé trop difficile!) Il risque donc de s'agir plutôt de recettes de calcul du type de ceux qui interviennent dans la pratique des sondages, et qui ne pourront pas être vraiment justifiés sur un plan mathématique, ou alors il s'agira d'une approche principalement descriptive. Quoi qu'il en soit, la combinaison d'horaires insuffisants, de manque de diversification des filières, les pressions ambiantes pour introduire de multiples aspects "applicatifs" ou "technologiques", la necessité de maintenir simultanément un certain niveau théorique et de préparer convenablement de futurs enseignants et de futurs scientifiques constitue un cocktail hautement contradictoire. Il ne faudra pas s'étonner des résultats (et le GTD ne saurait en être tenu pour responsable, ni critiqué pour des arbitrages effectués dans des conditions défavorables dont il n'a pas la maîtrise). Organisation pratique des enseignements et TPE L'organisation des enseignements telle qu'elle semble être conçue pour la prochaine rentrée scolaire me paraît aussi comporter des risques de dérapage importants. Ainsi il est prévu d'introduire des heures de Travaux Personnels Encadrés (TPE), durant lesquelles les élèves devront mettre en pratique leur connaissances théoriques. C'est sans doute une très bonne idée si les TPE sont faits en relation étroite avec le cours fondamental correspondant. Ce serait une occasion fort judicieuse de mettre les élèves face à des problèmes ouverts, pour lesquels la solution n'est pas connue d'avance mais réclame au contraire une démarche "expérimentale", un questionnement sur les méthodes à utiliser, une progression pas à pas et par tâtonnements successifs (évidemment, le niveau de ces problèmes doit être en rapport avec celui des élèves, ce n'est pas ici de "problèmes réels" de la recherche contemporaine dont il s'agit...). Malheureusement, les modalités pratiques de mise en place des TPE, telles qu'elles sont définies dans les textes officiels, introduisent des contraintes pour le moins étranges et à mon avis néfastes. D'une part - mais ce n'est sans doute pas le point le plus sérieux - les TPE sont multi-disciplinaires et la délimitation entre les horaires des différentes disciplines n'est pas clairement définie; il risque donc d'y avoir des variations considérables d'un établissement à un autre en fonction des disponibilités des enseignants, des emplois du temps des classes, etc. Mais ce qui me paraît nettement plus inquiétant, c'est la directive suivant laquelle les TPE doivent avoir en quelque sorte une "vocation culturelle", sur des thèmes en constant renouvellement (qui ne sont pas laissés à l'appréciation des enseignants et changent chaque année). Outre la difficulté pratique d'évaluer de telles activités, on risque de nouveau d'aboutir à un plus grand morcellement des activités pédagogiques, à la difficulté de gérer des publics d'élèves qui auront reçu des connaissances hétérogènes, déflorant des sujets traités dans les années suivantes et/ou dans d'autres disciplines - et donc non opérationnels. Il aurait sans doute été beaucoup plus sage d'introduire les TPE dans le cadre des horaires de chaque discipline, en insistant sur le rôle fondamental de "l'expérimentation personnelle" pour l'acquisition des connaissances, et non pas de réduire de nouveau les horaires des disciplines pour introduire d'autres activités qui n'ont pas avec celles-ci un rapport clair, direct et soigneusement délimité. Je suis convaincu que les principales disciplines doivent être avant tout au service d'elles mêmes, et lorsque c'est utile, faire apparaître les ponts interdisciplinaires qui les servent - pas l'inverse. Ainsi, la meilleure façon d'illustrer les mathématiques est de les mettre en oeuvre dans des situations concrètes proches de l'environnement quotidien des élèves, mais idéalisées pour faire abstraction des difficultés inhérentes à d'autres problématiques. Pour apprendre l'analyse combinatoire, on peut utiliser avec profit des situations géométriques qui interviennent dans les puzzles, les jeux, etc... même s'il ne s'agit pas d'objets d'étude "savants" liés à d'autres disciplines. De même l'apprentissage de l'analyse et de la géométrie peut donner lieu à d'innombrables exercices en liaison avec l'observation de notre environnement. Sur l'enseignement de l'informatique dans le Secondaire Il y a une forte volonté gouvernementale pour l'introduction de l'informatique à l'École, au Collège et au Lycée. Cette volonté est justifiée dans son principe -- au moins pour ce qui concerne le Collège et le Lycée. Mais là encore, il ne faut pas se tromper de cible ni d'informatique. Il ne semble pas qu'il y ait de menaces très précises de ce côté, mais on observe des dérives étranges dans la pratique éducative, en particulier autour des programmes de mathématiques. D'autre part, compte tenu des propos irréfléchis tenus par le Ministre devant les media, il me semble utile de préciser un certain nombre de points; je voudrais aussi profiter de l'occasion pour parler de la question importante des logiciels libres, qui pourrait (et devrait à mon sens) avoir des retombées éducatives considérables. Tout d'abord, l'informatique est une science autonome qui a ses propres méthodes, son propre cheminement conceptuel. Et cela même si l'informatique est un science qui s'est développée historiquement en osmose étroite avec les mathématiques. C'est un leurre de croire que l'on assurera une quelconque formation à l'informatique en intégrant dans le cours de mathématiques (ou de physique...) une pratique extensive des instruments de calcul. On ne fera en effet au mieux qu'enseigner l'usage d'une "quincaillerie" au service des mathématiques ou de la physique -- usage que les élèves acquièrent par ailleurs assez facilement eux-mêmes sur le tas compte tenu du niveau de diffusion maintenant élevé des outils de calcul. Il me paraît assez vain, pour une formation à vocation générale, de passer un temps important à apprendre l'usage de logiciels "tout prêts" pour des besoins techniques précis (tableurs, traitements de texte, logiciels de présentation de données, logiciels de création de sites...) Surtout quand la durée de vie des techniques et des logiciels est à l'échelle de l'année ou du petit nombre d'années. Céder à la mode Internet et vouloir faire "surfer" les élèves sans justification pédagogique serait absurde. Il serait bien plus utile que les élèves acquièrent, dans des enseignements spécifiques bien ciblés, quelques concepts fondamentaux et universels de la programmation ou de la structuration des données (boucles itératives, procédures de rangement, récursivité, concepts sémantiques...), indépendamment des techniques contingentes du moment. Signalons qu'il y a eu des expériences réussies -- même à un niveau élémentaire -- avec des langages bien adaptés comme le Logo (un peu oublié, mais toujours d'actualité). Savoir si l'on doit introduire des heures spécifiques d'enseignement informatique "véritable" au Lycée est un vaste débat qui mériterait une réflexion approfondie et auquel je ne veux pas apporter de réponse ici -- mon sentiment est qu'il le faudrait, au moins en fin de Lycée et dans le cadre d'une diversification plus grande de la filière scientifique. En direction inverse, remplacer les cours de mathématiques par des cours d'utilisation de calculettes sous prétexte que les calculettes ont maintenant des capacités notables de calcul formel et peuvent donc suppléer à la compréhension des élèves est totalement absurde. La compréhension doit accompagner -- ou mieux encore précéder, et l'usage de l'outil de calcul sera légitime si la pénibilité des tâches calculatoires que doit effectuer l'élève s'en trouve allégée, si sa capacité à appréhender le champ disciplinaire concerné s'en trouve accrue. Enseignement de l'informatique et logiciels libres Les efforts effectués dans des tentatives d'enseignement de l'informatique ne sont pas récents, et, dans la décennie écoulée, un grand nombre d'enseignants très motivés ont passé un temps considérable à élaborer des séquences d'enseignement et des données pédagogiques. Malheureusement, ces efforts ont souvent porté sur des techniques et des environnements tellement fermés que leur travail s'est trouvé rapidement périmé et perdu (l'un des problèmes les plus sérieux étant la non pérennité des formats de données dans les environnements commerciaux les plus répandus). Bien sûr, les outils qui aident à la compréhension des disciplines fondamentales (outils de calcul formel, de géométrie dynamique, de simulation mécanique...) sont les bienvenus et peuvent entrer naturellement dans le cadre du travail disciplinaire. Un souci légitime est de veiller à la durabilité des procédures et des outils utilisés. Dans ce cadre, l'usage de logiciels libres serait un atout considérable, car l'environnement de travail y est beaucoup plus propice à l'apprentissage des concepts et des principes généraux -- de même qu'y sont essentiellement résolus les problèmes de pérennité des données, et que l'accès libre et gratuit à l'information scientifique devient possible. Tous les besoins essentiels sont largement couverts par les logiciels libres, avec de nombreux outils de programmation (environnements performants pour tous les langages existants), de calcul numérique (scilab, octave), de calcul formel (pari, drgenius), de géométrie dynamique (drgeo), de représentations de données (gnuplot, geg), de même que les logiciels à vocation plus technologique (tableur Gnumeric, CAO avec QCad...). Malheureusement l'infrastructure et la formation des personnels à l'usage des logiciels libres est encore très insuffisante. Il faudrait donc ne pas mettre la charrue avant les boeufs, et prévoir dans ce domaine des actions très substantielles de formation à l'intention des personnels enseignants concernés. Pour beaucoup plus de détails sur ces questions, on pourra consulter le site de l'AFUL: http://www.aful.org , http://www.aful.org/education Informations sur les ressources éducatives libres: http://www-fourier.univ-grenoble-alpes.fr/~demailly/exp_linux/exp.html Sites du CARMI Internet Grenoble: (Liens http) http://www.ac-grenoble.fr/carmi-internet/ge/liens.php (Site FTP) ftp://ftp.ac-grenoble.fr/ge Annexe: propositions concrètes de programmes de mathématiques Nous avons voulu donner une forme concrète aux idées précédentes en proposant une architecture de programme pour les deux dernières années du Lycée. Le programme proposé ci-dessous ne prétend pas être matériellement réalisable avec les contraintes actuellement en vigueur au niveau des horaires et de la répartition des filières. Nous avons simplement voulu dégager ce qui nous paraît être le "minimum vital" de connaissances indispensable pour des étudiants qui souhaitairaient s'engager ensuite dans une filière scientifique où les mathématiques, la physique ou la mécanique seront des parties prédominantes. Le programme proposé demanderait sans doute des adaptations importantes pour de futurs étudiants dans d'autres sciences comme la biologie, la chimie la géologie ou l'informatique. Là encore, une plus grande souplesse et une plus grande diversification des filières - en particulier en classe Terminale - nous apparaît particulièrement souhaitable. Il devrait peut être même être envisagé d'en revenir à une diversification partielle dès la classe de Seconde, avec une forte valorisation disciplinaire (et sans exclusive au niveau des disciplines). Propositions pour les programmes de Mathématiques de fin de Lycée (filière Math/Physique/Mécanique) Principes de base Il est évidemment hors de question au niveau secondaire de mettre en place un enseignement formalisé et axiomatique, qui prétendrait tout démontrer à partir des axiomes de base de la théorie des ensembles - l'expérience a été tentée il y a 25 ans et elle n'a pas été concluante! Le point important nous paraît être l'acquisition du *sens sous-jacent* aux principales notions. Or ce sens ne peut se dégager sans que les hypothèses de départ soient clairement énoncées, et dans tous les cas où un raisonnement *simple et intuitif* permet d'aboutir à des résultats clés, ce raisonnement doit être explicité en détail - même s'il faut y consacrer du temps. En mathématiques, le corpus de connaissances actuel montre qu'il est possible de décrire une même "théorie" en empruntant des chemins fort différents. Il est évident que pour un enseignement destiné au plus grand nombre, c'est le chemin qui correspond à la vision *la plus intuitive* et la plus proche du sens commun qui doit être privilégié. Une piste claire est fournie par l'analyse suivante due à Laurent Schwartz: "Une mathématique est riche si elle introduit peu de concepts et de structures, et beaucoup de théorèmes à leur sujet [...] Le but des mathématiques n'est pas de démontrer rigoureusement des choses que tout le monde voit; il est de trouver des résultats riches, et, pour en être sûr, de les démontrer." L'accumulation de résultats anecdotiques ou trop technologiques nous paraît donc contraire à la nécessité d'un certain recul conceptuel dans l'enseignement à vocation généraliste. L'usage des outils de calculs doit aussi être tempéré pour tenir compte de cette nécessité et de l'évolution de la technique, qui rend obsolètes les outils mis sur le marché au bout de quelques années seulement. Ne plus enseigner l'arithmétique parce que "les machines savent faire" serait absurde; il en serait de même de ne plus enseigner les concepts sous-jacents à l'analyse et l'étude des fonctions sous prétexte que les calculettes graphiques mettent instantanément le graphe et les variations d'une fonction sous les yeux des élèves... Proposition pour le programme de 1ère Le programme se compose d'une liste de points qui seront traités non pas comme des faits isolés, mais avec le souci de mettre en évidence leurs relations mutuelles, et chaque fois que cela est possible, de déduire explicitement les conséquences des résultats qui les précèdent ou les motivent. 1. Logique, combinatoire et probabilités a. Langage des ensembles: appartenance, inclusion, intersection, réunion, complémentaire; exemple des ensembles de nombres (intervalles ouverts, fermés, etc...); lien avec les connecteurs logiques "et", "ou", "négation", "implication". Ensemble des parties d'un ensemble, dénombrement de cet ensemble [Ces points seront traités en liaison avec la combinatoire et le langage des probabilités; on les illustrera par des problèmes concrets: nombre de façon d'asseoir des convives autour d'une table...]. b. Applications, injections, surjections, bijections. Permutations d'un ensemble, factorielles. Arrangements avec répétitions (formule n^p). Utilisation d'arbres pour aboutir au dénombrement. c. Evènements, probabilités, équiprobabilité. Notion d'évènements indépendants. Exemples simples [lancers de dés, tirages de cartes... Si le temps et le matériel le permettent, simulations numériques]. 2. Algèbre a. Polynômes du premier et du second degré, résolution d'équations et d'inéquations polynomiales. b. Algorithme de division des polynômes (sur des exemples de bas degré), factorisation des polynômes (degrés 2 ou 3,4 avec racines "évidentes"). 3. Analyse a. Etude des suites. Suites arithmétiques et géométriques, notion de limite d'une suite Nota: On donnera la définition rigoureuse, mais on ne cherchera pas à travailler sur les epsilon autrement que par des expérimentations numériques à l'aide de calculettes, ou dans des cas pour lesquels l'erreur est facilement calculable de manière explicite. b. Généralités sur les fonctions: fonctions monotones, zéros, extrema, exemples pour lesquels on sait calculer les zéros ou les extrema "à la main". c. Notion de limite (à droite, à gauche) d'une fonction en un point (même commentaire que pour les suites). Théorèmes fondamentaux sur les limites (somme, produit, quotient, gendarmes -- admis). d. Fonctions continues. Exemples de fonctions discontinues (fonction caractéristique d'un intervalle, partie entière). Théorème des valeurs intermédiaires (admis), existence d'extrema sur un segment (admis). d. Dérivée (comme limite du taux d'accroissement), équation de la tangente, interprétation de la dérivée comme pente de la tangente. Premiers exemples (polynômes) et contre-exemples (fonction racine carrée en zéro). La dérivabilité implique la continuité, mais l'inverse est faux. e. Signe de la dérivée des fonctions monotones. Annulation de la dérivée en un extremum. Monotonie (admise) des fonctions ayant une dérivée de signe constant. Application à l'étude de la variation des fonctions et à la recherche d'inégalités. Utilisation de calculettes graphiques pour cet usage. 4. Géométrie a. Concept d'espace euclidien de dimension n=1,2,3 Nota: Une fois la définition donnée, on se travaillera pour l'essentiel d'abord en dimension 2. On ne cherchera pas à présenter des "axiomatiques" qui dissocieraient les aspects affines des aspects métriques. On cherchera cependant à adopter une démarche un tant soit peu déductive, rendue particulièrement simple dans l'approche suggérée ici. On introduira systématiquement les concepts à partir de leur définition intrinsèque plutôt que par le calcul en coordonnées (qui, dans la mesure du possible, ne viendra qu'ultérieurement). Il pourra être utile de signaler - de façon purement descriptive et sur un dessin ou une photo - qu'il existe des géométries non euclidiennes, par exemple la surface d'un terrain avec une colline centrale où il peut y avoir deux chemins différents de longueur minimale entre 2 points situés de part et d'autre de la colline. Par définition, un espace euclidien est un ensemble E d'éléments appelés points, muni d'une application d:(M,M')--> d(M,M') de Ex E dans les réels postifs ou nuls, appelée distance, pour lequels la propriété de base suivante est vérifiée: il existe une bijection M --> coord(M)=(x_1,...,x_n) de E dans R^n, appelée application coordonnées, telle que pour tout couple de points (M,M') de E on ait d(M,M') = racine carrée de (x_1-x_1')^2+...+(x_n-x_n')^2. b. (Révisions) Milieu I d'un bipoint (A,B) (unique point tel que d(A,I)=d(I,B)=1/2 d(A,B), l'unicité étant justifiée plus tard), coordonnées du milieu. Parallélogramme ABCD (déf: même milieux des diagonales (A,C) et (B,D)), bipoints équipollents, caractérisation en termes de coordonnées. Concept de vecteur, ensemble E des vecteurs associé à l'espace euclidien E, formule de Chasles, addition et produit d'un vecteur par un scalaire (surtout en dimension 2, uniquement repérage et calculs de coordonnées en dimension 3). c. Segments, droites, demi-droites, vecteurs colinéaires, définitions intrinsèques et caractérisations en coordonnées. Vecteurs directeurs et équations paramétriques d'une droite dans un espace euclidien E de dimension 2. d. Equation cartésienne d'une droite dans un plan. Intersections de droites et résolution des systèmes linéaires 2x2, formules de Cramer. Droites parallèles; demi-plans, intersection de demi-plans, régionnement du plan. e. Notion de base associée à un espace euclidien de dimension 2 (système de 2 vecteurs tel que tout vecteur est combinaison linéaire unique de ceux-ci). Repères (non nécessairement orthonormés), coordonnées associées. Barycentre d'un système de points pondérés. Application à la résolution de problèmes élémentaires dans le plan (géométrie du triangle, étude des polygones...), utilisation de logiciels de géométrie dynamique. f. Produit scalaire. On pourra poser par définition ||vecteur AB|| = d(A,B) et u . v = 1/4 (||u+v||^2 - ||u-v||^2). Expression du produit scalaire en coordonnées canoniques, puis dans une base quelconque, en dimension 2. Mise en évidence de la bilinéarité (sans expliciter ce concept). Cas du plan, interprétation analytique de la condition u . v = 0 (si u est un vecteur non nul de coordonnées (a,b), alors v est colinéaire au vecteur de coordonnées (b, -a)), notion de vecteurs orthogonaux. Théorème de Pythagore, lien entre la définition initiale et la formule de la médiane. Notion de base et de repère orthonormé (et mise en évidence de la non unicité de l'application coord dans la définition initiale d'un espace euclidien!). g. Cercle, équation du cercle. Cercle trigonométrique, angle comme longueur d'arc (notion admise...). Fonctions sinus, cosinus, tangente, cotangente, périodicité, valeurs remarquables. Formules d'addition des angles (obtenues par changement de base orthonormée), dérivées des fonctions trigonométriques déduites de la valeur de la limite lim_{h->0} sin h / h = 1 ce résultat pourra par exemple être justifié par considération du cercle trigonométrique et du rectangle de côtés sin h et 1-cos h contenant l'arc de cercle, la longueur h de celui-ci étant minorée par s=sin h et majorée par le demi-périmètre sin h+(1-cos h) = s+1-sqrt(1-s^2) < s+s^2 en sorte que lim h/s = 1). Sens de variation et graphe des fonctions trigonométriques. Formule de changement de repère orthonormé dans le plan. h. Projections et symétries par rapport à une droite parallèlement à une autre droite. Expression analytique en coordonnées. Cas des projections et symétries orthogonales. Expression analytique de la distance d'un point à une droite. Rotations planes. Composées de rotations/symétries orthogonales, composées de rotations et de translations, de symétries et de translations. Proposition pour le programme de Terminale Le programme se compose d'une liste de points qui seront traités non pas comme des faits isolés, mais avec le souci de mettre en évidence leurs relations mutuelles, et chaque fois que cela est possible, de déduire explicitement les conséquences des résultats qui les précèdent ou les motivent. 1. Arithmétique, combinatoire et probabilités a. Raisonnement par récurrence, illustration sur des formules combinatoires simples (somme des n premiers entiers, des n premiers carrés ou cubes, sommes partielles de la série géométrique). b. Nombres premiers, existence d'une infinité de nombres premiers. Algorithme d'Euclide, ppcm, pgcd, existence (et - facultativement - preuve de l'unicité) de la décomposition en facteurs premiers. Preuve de l'irrationnalité de la racine carré d'un nombre premier p, si p est un nombre premier (on pourra se limiter à p=2). Congruences, table de Pythagore des "anneaux" Z_n (=Z/nZ, notation qu'on évitera cependant d'introduire...) pour des exemples simples de valeurs de n, premiers et non premiers (et bien entendu, il n'est pas question de définir la notion générale d'anneau). Principe de la preuve par 9 et par 11. [Thème possible: dans Z_p, la multiplication par une classe non nulle induit une permutation; vérification avec calculettes programmables; petit théorème de Fermat]. c. Combinaisons et arrangements. C_n^p, formule du binôme (dans R, puis dans C lorsque les nombres complexes auront été vus). d. Variables aléatoires, variance, écart-type (espaces probabilisés toujours finis!). Tirages répétés (avec remise). Loi binomiale. [Thème possible: tirages répétés sans remise, loi hypergéométrique, approximation par la loi binomiale, application aux sondages]. e. Utilisation de calculettes et/ou de microordinateurs, et mise en oeuvre d'algorithmes de programmation élémentaires (boucles itératives...) illustrant a, b, c, d. 2. Analyse a. Majorants, minorants, borne supérieure, borne inférieure d'un ensemble de nombres réels; cas des intervalles et d'ensembles simples du type {1/n, n entier non nul} - on se contentera d'une approche descriptive de ces notions. Existence de la limite d'une suite croissante majorée, égale au sup des valeurs. Développement illimité d'un nombre réel dans une base b, développement décimal propre et impropre. Caractérisation des rationnels par la périodicité du développement dans une base (b=10). Existence d'une limite à droite et à gauche pour les fonctions croissantes. b. Dérivation des fonctions composées. Approfondissement de la technique du calcul des dérivées et des limites; Théorème de Rolle pour une fonction dérivable sur [a,b] (à partir du théorème admis en 1ère sur l'existence des extrema d'une fonction continue); formule des accroissements finis (prouvée en considérant g(x)=f(x)-(x-a)(f(b)-f(a))/(b-a). Justification du fait que la postivité de la dérivée entraîne la croissance; utilisation pour l'obtention d'inégalités telles que sin x 1/x. Fonction exponentielle. Fonctions x^y, cas particulier de la fonction racine n-ième. Comportement à l'infini, dérivation des fonctions logarithmes, exponentielles et puissances. Intégrales mettant en oeuvre de telles fonctions (pas d'intégration par parties...). [Thème: résolution de l'équation différentielle y'=ay - preuve en considérant la fonction u(x)=e^{-ax}y(x)); applications: pression barométrique, décroissance radioactive...]. 3. Algèbre et géométrie a. Nombres complexes, définis comme couples de nombres réels. Notation a+ib. Conjugué d'un nombre complexe. Module et argument. Structure de plan euclidien. Résolution de l'équation du second degré dans C. Formule de Moivre, racines n-ièmes de l'unité [Thèmes possibles: étude du pentagone régulier, Suite définie par une relation de récurrence de la forme u_n=au_{n-1}+bu_{n-2} dans C, utilisation de l'équation caractéristique et de la linéarité]. Similitudes directes et transformations z --> az+b. b. Dépendance et indépendance linéaire de vecteurs en dimension 3. Notions de base et de repères (non nécessairement orthonormés) d'un espace de dimension 3, en liaison avec la résolution des systèmes d'équations de 3 équations à 3 inconnues (méthode pragmatique par combinaisons linéaires). Equations de plans, points coplanaires. Produit scalaire en dimension 3, angle non orienté de vecteurs, plan orthogonal à une droite, distance d'un point à un plan. [Thèmes: produit vectoriel, procédé d'orthogonalisation de Schmidt pour un système de 2 ou 3 vecteurs linéairement indépendants; programmation et visualisation de l'algorithme; un plan est en bijection avec R^2 en sorte que la distance y induit une structure de "sous-espace euclidien"]. Equations cartésiennes et paramétriques d'un plan dans l'espace de dimension 3, intersections de plans et systèmes linéaires de 2 ou 3 équations à 3 inconnues. Barycentres en dimension 3 [Thème: illustrations géométriques, par exemple, étude du tétraèdre]. c. Approfondissement de l'étude des transformations affines dans le plan et dans l'espace: projections et symétries sur un plan parallèlement à une droite, calcul en coordonnées, cas de projections et de symétries orthogonales. Rotation autour d'un axe, composée de deux symétries affines orthogonales par rapport à des plans. Notions d'application affine f: E--> E et d'application linéaire phi: E flèche --> E flèche: On dit que f est affine (resp. que phi est linéaire) si en coordonnées l'application s'écrit Y=AX+B (resp. Y=AX). On a vecteur f(M)f(N) = phi(vecteur MN) si phi est l'application linéaire "associée" à f, et phi satisfait la propriété de linéarité fondamentale phi(lambda_1v_1+lambda_2v_2)=lambda_1 varphi(v_1)+lambda_2 varphi(v_2). [Thème: reconnaissance d'une projection ou d'une symétrie affine par rapport à un plan parallèlement à une droite à partir de l'étude des points invariants par f, des vecteurs annulés ou transformés en leurs opposés par phi.] Nota: ce texte, dans ses différentes versions, a été élaboré uniquement à l'aide de logiciels libres (emacs, amaya, netscape, TeX), sous un environnement GNU/Linux.